"Embrase-moi" : l'amour à nu de Kaori Ito et Théo Touvet

Quand un couple de danseurs (Kaori Ito et Théo Touvet) se met à nu devant le public afin d'évoquer son amour, ça donne une proposition déroutante et captivante baptisée "Embrase-moi". À découvrir à l'Hexagone de Meylan.


Ils sont deux. Elle, Kaori Ito, fascinante interprète chez Decouflé, Preljocaj, Thierrée, Platel ou encore Bory, passée à la chorégraphie il y a quinze ans. Lui, Théo Touvet, véritable touche-à-tout (comédien, danseur, acrobate, circassien, musicien…) passionné par la roue Cyr, un agrès de cirque hypnotique. Tout deux s'aiment d'un amour présenté comme mature, de celui qui arrive une fois que l'on a bien vécu, que l'on est nourri d'expériences.

Le passé, c'est justement ce qui est au cœur de la première partie de leur spectacle astucieusement titré Embrase-moi. Séparé en deux groupes, le public écoute soit l'une, soit l'autre, revenir sur sa vie de jeune adulte, notamment amoureuse. Comme un hommage à celles et ceux qui les ont préparés (aussi bien sentimentalement que sexuellement) à l'amour fou qu'ils vivent aujourd'hui. « Je rencontre dans ma vie des millions de corps ; de ces millions je puis en désirer des centaines ; mais, de ces centaines, je n'en aime qu'un », écrivait le philosophe français Roland Barthes dans son fameux essai Fragments d'un discours amoureux que le duo cite ouvertement.

Fusionnons-nous

Embrase-moi est une proposition originale, entre conférence, mise à nu et, forcément, spectacle de danse. Une proposition construite avec habileté, les deux artistes restant constamment sur le fil entre l'envie de parler à tout le monde et le besoin de parler d'eux. La première partie est ainsi une mise en bouche passionnante (du moins celle avec la facétieuse Kaori Ito, à laquelle nous avons assisté), avant la réunion du public et, donc, du couple.

En nous ayant permis, au préalable, de rentrer à ce point dans leur intimité, Kaori Ito et Théo Touvet deviennent universels et émouvants, grâce à une dernière séquence où leurs deux corps, diamétralement opposés, et leurs passés, loin l'un de l'autre, fusionnent en une évidence dansée. « Le langage est une peau : je frotte mon langage contre l'autre », écrivait encore Barthes. C'est exactement ça.

Embrase-moi à l'Hexagone jeudi 12 et vendredi 13 mai ; de 9€ à 22€


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