Le Cabaret a encore frappé

Après une édition exceptionnellement déplacée à l'Anneau de vitesse l'année dernière pour raison sanitaire, le Cabaret Frappé est de retour au Jardin de ville dans son format habituel mêlant scène locale et têtes d'affiche prestigieuses. Un festival 100% gratuit qui fait du bien au cœur de l'été incandescent.


Ultime soubresaut estival, avant que la ville ne sombre définitivement dans une torpeur aussi lourde que l'atmosphère, le Cabaret Frappé n'est pas qu'un festival de musique. C'est une consolation pour les Grenoblois qui n'ont pas la chance de pouvoir fuir le coton brûlant de la Cuvette dès le début des vacances scolaires (on est nombreux dans ce cas-là). Entièrement gratuit depuis 2016, on s'y rend avec insouciance, pas toujours au fait de la programmation du jour, juste pour boire une bière fraîche en attendant que la nuit tombe enfin… Et puis, au cours de la semaine, on est souvent cueillis par une découverte (le souvenir d'Altin Gün transcendant la foule en 2018 reste impérissable, idem pour Aufgang en 2017), ou parfois déçus par une prestation un peu trop idéalisée en amont (Jacques et son bric-à-brac techno peu convaincant, en 2017 toujours). C'est le jeu. En vaut-il la chandelle cette année ? Comme d'hab', il faudra vérifier sur place.

Du local un peu trop localisé

Connu pour mettre également à l'honneur la scène locale et notamment des artistes de la Cuvée grenobloise, ce Cabaret 2022 manque de diversité à ce sujet, non d'un point de vue esthétique mais, disons, démocratique. Sur les six formations programmées, cinq (Aamiral, Adèle & Robin, Lamuzgueule, Anita Dongilli, Bobato) sont issues de la société de production Le Comptoir des Arts/Outside The Box, dont l'un des membres s'appelle Romain Deschamps, lui-même chanteur de Lamuzgueule. Si l'on ajoute que les deux acolytes de Bobato jouent ou ont joué avec Lamuzgueule, cela commence à faire beaucoup. Seul le rappeur Nemo Nebbia semble étranger à ce cercle. Dommage… La scène locale grenobloise, dont la diversité et la qualité étonnent à l'échelle d'une aussi petite grande ville, mériterait que les programmateurs prennent plus de risques.

Vive la pop !

Coup de gueule à part, cette 23e édition promet de belles soirées, à commencer par celle du lundi 18 juillet qui prouve, en trois noms (QuinzeQuinze, Aurus et Terrenoire), que la pop n'est pas tant un genre de musique qu'un état d'esprit. Puisqu'à condition d'être moderne et philanthrope, elle permet toutes les formes, toutes les inventions, tous les propos – décloisonnement absolu. Programmé le mardi 19, juste avant la tempétueuse Aloïse Sauvage et après un trio de rappeuses en devenir (Eesah Yasuke, Soumeya et Ossem), Ichon ne dira pas le contraire, lui qui s'alanguit à merveille dans un rap langoureux, mélodique et, donc, résolument pop. En toute première partie ce jour-là, Anita Dongilli dévoilera sa musique très perso qu'on aime bien au PB. On ira aussi voir avec grande curiosité la charismatique Noga Erez, le dimanche 17, dont le dernier single Nails est totalement à la hauteur des inspirations qu'elle invoque, à savoir Billie Eilish et M.I.A – rien que ça. En guise de conclusion, le Cabaret Frappé accueillera le Bal Marmaille, orchestre de huit musiciens et deux comédiens venu du Bénin, qui raconte aux enfants l'histoire de l'animateur radio Solo Soro. Puis, après Bobato (dont la pop décalée ne respire pas le doute), place à Cimafunk pour un final mêlant hip-hop, funk et rythmes cubains. À voir en live, assurément.

Cabaret Frappé du 15 au 20 juillet à Grenoble


À la suite de la parution de cet article, Le Comptoir des Arts a souhaité apporter ces précisions, que nous publions ci-dessous :

"Le Comptoir des Arts travaille avec cinq des groupes locaux programmés sur le Cabaret Frappé 2022 : Aamiral, Adèle & Robin, Anita Dongilli, Bobato et Lamuzgueule.

Ils ont toutes et tous acquis la légitimité de leur présence sur le festival et ont été choisis par le programmateur missionné par la Ville de Grenoble. Ce choix est une fierté pour notre structure et les artistes ne doivent leur place sur le festival qu'à leur talent artistique et non à un quelconque favoritisme. Le cas de Adèle & Robin est lui spécifique puisque la personne en charge de leur programmation est différente, c'est l'équipe de Divercities qui les a choisis pour jouer le 16 juillet.  Artistiquement les groupes proposent une diversité d'esthétiques qui permettra aux public de découvrir la richesse de la scène locale grenobloise. Pop, chanson, electro, de quoi satisfaire le plus grand nombre !

Les groupes concernés sont accompagnés à des niveaux bien différents par Le Comptoir des Arts et ces derniers ne sont pas "issus" de notre société. Nous avons à coeur d'accompagner les artistes dans le développement de leurs projets et ils et elles sont libres de travailler avec les partenaires qu'ils souhaitent.

Le fait que cinq groupes programmés travaillent avec une même société de production peut interpeller mais il est à noter qu'il existe peu de structures comme la nôtre au niveau local (et l'ensemble de ces structures se connaissent et collaborent tout au long de l'année). Il n'est donc pas étonnant que des groupes locaux soient amenés à travailler avec une même structure de production. 

Les groupes, Aamiral, Adèle & Robin, Anita Dongilli, Bobato et Lamuzgueule ont toute leur place sur le Cabaret Frappé et la meilleure façon de s'en convaincre reste de venir les écouter au jardin de Ville du 15 au 20 juillet.

Le Comptoir des Arts"


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