"Odile et l'eau", chlore et émotions

Seule-en-scène chorégraphique et poétique écrit et interprété par Anne Brochet, "Odile et l'eau" nous immerge dans les eaux bleutées d'une piscine municipale et les états d'âme d'une femme solitaire.


Pour peu qu'on prenne le temps d'y réfléchir, la piscine municipale constitue, derrière son apparente banalité, une expérience des plus singulières. Sorte de capsule hors du temps où chacun, simultanément exposé au regard de l'autre et protégé par l'anonymat et l'indifférence ambiante, se retrouve temporairement sur un pied d'égalité, elle offre un cadre narratif d'une richesse insoupçonnée. Dernière création en date de l'actrice, réalisatrice et écrivaine Anne Brochet, Odile et l'eau nous immerge dans ce microcosme chloré et familier, en décryptant non sans humour les us et coutumes des différents usagers pour mieux bifurquer, par fines strates successives, vers ce qu'on devine rapidement être son véritable sujet : retracer les divers questionnements existentiels et expériences émotionnelles d'une femme quinquagénaire à une phase charnière de sa vie. Désormais célibataire, supportant avec difficulté la solitude et la perte de sa mère, elle va non sans courage se jeter à l'eau, au propre comme au figuré, embarquant avec elle le spectateur par le biais d'une écriture fine et d'une mise en scène à la fois minimaliste et sophistiquée. Indéniablement touchante (il est difficile de résister à la franchise mêlée de pudeur qui se dégage du personnage d'Odile), l'expérience s'avère néanmoins un peu attendue une fois les principaux ressorts narratifs posés. En dépit d'une bifurcation vers d'autres antipodes à mi-parcours, la pièce ne maintient ainsi son impact émotionnel qu'in extremis, lorsqu'Odile, enfin, parvient à sortir la tête de l'eau.

Odile et l'eau jusqu'au vendredi 14 octobre à 20h à la MC2 ; de 5€ à 28€


<< article précédent
Scènes de crime au musée de Grenoble