The Box

On attendait comme le messie le nouveau film du réalisateur maudit de Southland Tales, Richard Kelly. Une seule certitude à l’arrivée de ce thriller parano et ésotérique : son cinéaste est un grand cinglé ! Christophe Chabert

À l’origine de The Box, une courte nouvelle de Richard Matheson adaptée à l’écran dans un épisode de La Quatrième dimension période années 80. Un homme étrange dépose un carton chez un couple ordinaire ; à l’intérieur, une boîte, avec une sorte de buzzer, et un pacte : si on appuie sur le bouton, quelqu’un meurt, mais le couple gagne 100 000 dollars. La vie d’un inconnu contre la promesse du confort matériel : voilà un conflit moral diabolique que The Box règle assez vite, dans un premier quart d’heure réussi quoique très classique pour qui suit de près le cinéma de Richard Kelly. Encore jeune, le cinéaste a déjà à son actif un film culte (Donnie Darko) et un film maudit (l’incroyable et controversé Southland Tales). Le défi de The Box, se dit-on, est aussi celui de son metteur en scène : tuer symboliquement sa personnalité de chien fou dans le cinéma américain et vendre son âme aux studios hollywoodiens.

L’enfer, c’est les autres

Or, ce qui est passionnant, c’est la manière dont Kelly va faire exploser son matériau de départ en le plongeant dans l’acide de son imaginaire tordu et hautement référentiel. Premier détour : un cours donné par la gentille prof Cameron Diaz à ses élèves sur Huis clos de Jean-Paul Sartre. On pense d’abord que cette référence à une œuvre clé de l’existentialisme est un gadget. Mais le film reviendra comme un aimant vers Sartre, jusqu’à son étonnante boucle finale. Quant au cours, il se termine par une révélation incongrue : Diaz a perdu tous ses orteils lors d’un accident ! Une chair blessée qu’elle retrouve en miroir sur le visage défiguré de son étrange visiteur, revenu d’entre les morts pour mettre les vivants face à leur lâcheté. Pendant ce temps, son mari traverse des portes aquatiques, la première sonde américaine s’envole pour Mars, la CIA, le FBI et la NASA participent à un gigantesque complot… On se paume souvent dans ces nœuds complexes qui ressemblent au délire terminal d’un internaute ruminant théories conspirationnistes, near death experience, métaphysique pour les nuls et prophéties apocalyptiques jusqu’à en perdre la raison. Derrière l’épiderme sage du film (pas de clips pop ou de flashs info comme dans Southland Tales), Kelly se pose en savant fou manipulant sa narration pour tester la résistance du spectateur. On lui reprochera quand même de prendre tout cela un peu trop au sérieux, tant il avait jusque-là su se moquer de cette culture geek ésotérique. Dans la confusion du récit, on distingue pourtant un véritable auteur qui, petit à petit, élabore un cinéma de son temps, complexe, foisonnant, difficile et stimulant.

The Box
De Richard Kelly (ÉU, 1h55) avec Cameron Diaz, James Marsden, Frank Langella…

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