Le Chat du rabbin

De Joann Sfar et Antoine Delesvaux (Fr, 1h40) animation

Compresser en un film d’une heure quarante les cinq volumes du Chat du rabbin était une gageure pour le peu modeste — il peut, vu son talent — Joann Sfar. Depuis son entrée par la grande porte du cinéma français avec Gainsbourg (vie héroïque), Sfar affiche un appétit d’ogre pour ce nouveau media, et on retrouve sa soif d’étreindre tous les possibles avec ce film d’animation (en 3D, mais on peut largement s’en dispenser, le dessin de Sfar étant fondé sur la ligne, et non sur les volumes). Le problème, c’est que ce désir-là se traduit par une écriture dont la spontanéité ouvre les vannes à un certain foutoir. Parti sur un amusant dialogue philosophique et théologique entre un rabbin et son chat (qui parle avec la voix de François Morel), le film bifurque vers un récit d’aventures à la Hergé (dont Sfar se moque brièvement, et avec malice), oubliant en chemin son personnage principal (le chat). Non seulement on se moque un peu des péripéties picaresques de ce voyage vers la terre promise, mais Sfar tombe dans son autre gros défaut (déjà sensible avec Gainsbourg) : il ne peut s’empêcher de mettre du discours partout et de faire de la pédagogie par-dessus son récit. Cet entêtement à faire primer le sens sur l’action nuit gravement à la santé romanesque d’un film déjà touffu, et aussi bonnes soient les intentions de Sfar (le racisme se nourrit de ceux qui préfèrent le taire, pour résumer à gros traits), on voudrait qu’il soit un peu plus cinéaste, et un peu moins didactique, pour aimer définitivement et sans réserve son travail à l’écran.Christophe Chabert

à lire aussi

derniers articles publiés sur le Petit Bulletin dans la rubrique Cinéma...

Mercredi 6 septembre 2023 C’est littéralement un boulevard qui s’offre au cinéma hexagonal en cette rentrée. Stimulé par un été idyllique dans les salles, renforcé par les très bons débuts de la Palme d’Or "Anatomie d’une chute" et sans doute favorisé par la grève affectant...
Lundi 9 mai 2022 Trois ans après sa dernière “édition normale“, le Festival du cinéma italien de Voiron est enfin de retour au printemps en salle. Avec un programme dense, des invités et… sa désormais célèbre pizza géante. A tavola !
Vendredi 22 avril 2022 Orfèvre dans l’art de saisir des ambiances et des climats humains, Mikhaël Hers ("Ce sentiment de l’été", "Amanda"…) en restitue ici simultanément deux profondément singuliers : l’univers de la radio la nuit et l’air du temps des années 1980. Une...
Lundi 11 avril 2022 Alors que quelques-unes de ses œuvres de jeunesse bénéficient actuellement d’une ressortie dans des copies restaurées en 4K grâce au travail toujours (...)
Mardi 12 avril 2022 Un film de 8 heures qui raconte l'histoire d'activistes débutants, qui s'attaquent, à Grenoble, à des sites techno-industriels... C'est la projection que propose le 102, dimanche 17 avril.
Lundi 11 avril 2022 Piochés dans une carrière où l’éclectisme des genres le dispute à la maîtrise formelle et à l’élégance visuelle, les trois films de Mankiewicz proposés par le Ciné-club rappellent combien moderne (et essentiel) demeure son cinéma. On fonce !
Mardi 12 avril 2022 Né sous les auspices de la Cinéfondation cannoise, coproduit par Scorsese, primé à Avignon, "Murina" est reparti de la Croisette avec la Caméra d’Or. Une pêche pas si miraculeuse que cela pour ce premier long-métrage croate brûlé par le sel, le...
Mardi 29 mars 2022 Il s’agit désormais d’une tradition bien établie : chaque année, le festival Ojo Loco rend hommage au cinéma de genre le temps d’une nuit (agitée !) à (...)
Mardi 29 mars 2022 Aussi singulière soit l’histoire d’un voyage, il y a toujours un fond d’universel qui parle à chacun. Le festival isérois Les clefs de l’aventure n’existe (...)

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X