Miss Bala

Véritable thriller nerveux et explosif qui suit les tribulations criminelles d’une future reine de beauté forcée de participer aux exactions d’un gang mexicain, le film de Gerardo Naranjo marie adroitement efficacité cinématographique et réflexion politique. Christophe Chabert

À chacun ses rêves. Celui de Laura, fille pauvre des favelas de Mexico, consiste à gagner le concours de beauté de son quartier. Il est vrai qu’elle est un peu timide, mais carrément charmante, alors pourquoi pas ? Poussée par son amie Uzu, elle se présente donc aux sélections. Tandis qu’elle l’accompagne le soir dans une discothèque, elle assiste à un règlement de comptes entre deux gangs. Planquée dans les toilettes, terrifiée, elle voit se déchaîner une violence meurtrière. Faisons ici une petite halte dans le scénario de Miss Bala, quatrième film de Gerardo Naranjo, cinéaste dont la virtuosité nous avait bluffés sur son segment du film à sketchs Revolucion. Jusqu’ici, il déployait une chronique très Iñarritu de la misère mexicaine, par petites anecdotes bien vues, observant avec une pointe d’ironie la naïveté de son héroïne. Et soudain, à la faveur de cette séquence incroyable, il passe un braquet dans sa mise en scène, et c’est le souvenir d’un autre cinéaste mexicain qui remonte à la surface : celui d’Alfonso Cuarón et ses plans-séquences étourdissants.

Ascension par le crime

Naranjo n’a pas à rougir de la comparaison : à plusieurs reprises, il semble vouloir défier son compatriote sur le terrain d’une mise en scène de l’action en temps réel, où le spectateur serait mis dans la position du reporter de guerre esquivant les balles qui sifflent autour de lui tout en maintenant sa caméra allumée. Ainsi de ce morceau de bravoure où une fusillade en pleine rue prend des proportions de guerilla urbaine… Mais Naranjo ne s’en tient pas à ces impressionnantes montées d’adrénaline ; car l’itinéraire de Laura est aussi celui d’une oie blanche qui, face à la corruption et à la terreur qui se sont incrustées dans toutes les sphères de la société mexicaine, choisit peu à peu d’en tirer profit. Kidnappée, forcée à participer aux méfaits d’un gang dirigé par un chef à la séduction vénéneuse, elle découvre en elle un courage et une détermination insoupçonnés, lui ouvrant les portes d’un ascenseur social plus dangereux mais aussi plus payant. On ne sait si Naranjo pensait à l’affaire Florence Cassez en écrivant son film, ou si ce type de fait-divers est courant à Mexico. Mais dans la forme comme dans le fond, Miss Bala s’avère d’une brûlante actualité.

Miss Bala
de Gerardo Naranjo (Mexique, 1h53) avec Stephanie Sigman, Noe Hernandez…

 

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