"Maine Océan", l'odyssée vendéenne de Jacques Rozier

Maine océan
De Jacques Rozier (Fr, 1986, 2h11) avec Bernard Ménez, Luis Rego, Yves Afonso...

En ouverture de ses Traversées urbaines, la Cinémathèque présente le génial "Maine Océan". Où comment le plus secret des cinéastes français, Jacques Rozier, transformait les tribulations de deux contrôleurs SNCF en parcours burlesque. Christophe Chabert

« Schtong à la gare », « Toute la smala ! » ou la chanson Le Roi de la Samba… Tous ceux qui, depuis sa sortie il y a presque trente ans, ont vu Maine Océan se souviennent de ces répliques et séquences ô combien cultes, véritables mots de passe pour cinéphiles amateurs d’objets insituables. Jacques Rozier, son réalisateur, est lui-même une sorte de mystère. Depuis ses débuts, en pleine Nouvelle Vague, il n’a tourné qu’une poignée de films, tous irréductiblement singuliers, que ce soit son opera prima Adieu Philippines, le délirant Les Naufragés de l’île de la tortue (avec Pierre Richard et Claude Rich !) ou encore le séminal Du côté d’Orouet, croisement improbable entre Pascal Thomas et Éric Rohmer. Mais de tous, Maine Océan s’impose comme le plus abouti, le plus drôle et, surtout, le plus imprévisible.

Hors de contrôle(urs)

Tout commence lorsque deux conducteurs de la SNCF (Luis Rego et Bernard Ménez, dans son plus grand rôle) tentent de faire comprendre à une jolie passagère brésilienne qu’elle n’a pas composté son billet. À la barrière linguistique s’ajoute l’intervention d’une avocate tatillonne, qui se rend sur l’île d’Oléron pour défendre un marin vendéen, Marcel Petitgas (Yves Afonso, génial), accusé d’avoir agressé un automobiliste avec un démonte-pneu. Rozier se plait à étirer les scènes jusqu’à une sorte de vertige comique, laissant les personnages s’empêtrer dans le malentendu, souvent lié à leurs origines -l’accent à couper au couteau de Petitgas, la flamboyance frimeuse et grotesque du manager brésilien) quand il ne s’agit pas simplement d’un abus caractérisé d’alcool fort local.

En cela, le fameux passage où Ménez et ses camarades improvisent une chanson – séquence qui semble en effet avoir été improvisée sur le tournage – pendant une bonne dizaine de minutes, fait figure de réponse burlesque au concours de chant dans le bar de Husbands de Cassavetes. Cette durée hors norme est aussi à la source d’un dernier acte qui semble ne jamais vouloir connaître de point final, l’important n’étant pas le but à atteindre, mais le parcours lui-même. Maine Océan, dit le titre, inventant une ligne purement fictive qu’il s’agit, en bout de course, d’inventer par tous les moyens de transport possibles.

Maine Océan
De Jacques Rozier (1986, Fr, 2h11) avec Luis Rego, Bernard Ménez, Yves Afonso…
À la Cinémathèque, lundi 6 octobre à 19h30

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