Élie Chouraqui : « On a le devoir de montrer l'immontrable »

L'origine de la violence
De Élie Chouraqui (Fr-All, 1h50) avec Richard Berry, Stanley Weber...

Choc des Rencontres cinématographiques du Sud d’Avignon, où il a été projeté en avant-première, "L’Origine de la violence" a été présenté par un Élie Chouraqui combatif et serein. Interview.

Y a t-il de la violence en vous ? Avez-vous réussi à en déterminer l’origine ?

Élie Chouraqui : Il y en a, oui. J’ai fait un peu d’analyse, je me suis fait “suivre” comme on dit, parce que j’avais des questions auxquelles personne n’avait répondu. Des vides dans mon passé, des inquiétudes, des angoisses – qui m’habitent toujours, qui ne sont pas complètement dissipées – m’empêchant parfois de “bien” vivre. J’avais tendance à me mettre dans des situations désagréables alors que ce n’était pas du tout indispensable. Et puis j’ai compris pourquoi. Maintenant, je vais mieux (rires). Je suis beaucoup plus apaisé.

Vous évoquez à travers le film les interdits pesant sur la représentation des camps d’extermination – et l’impossibilité de montrer des déportés en train de rire. C’est rare…

Ce principe de Claude Lanzmann, selon lequel on ne montre pas l’immontrable, c’est comme un lieu commun, c’est stupide. Pardon pour Lanzmann, pour lequel j’ai beaucoup de respect, mais il n’est pas question de garder les choses mystérieuses, sans en parler. Il faut au contraire tout montrer et tout analyser – si possible avec talent et intelligence. On a non seulement le droit, mais aussi le devoir de le faire. Sinon, que restera-t-il à mes arrières-petits-enfants ? Uniquement des documentaires ? Croyez-vous que dans 150 ans, ils regarderont Shoah ? La majorité de ceux qui seront touchés le seront par le film de Spielberg [La Liste de Schindler] et les autres fictions…

En avez-vous parlé avec lui ?

Lanzmann est un homme rigide. C’est un peu compliqué d’avoir une conversation avec lui…

Est-ce facile de faire une coproduction avec l’Allemagne sur un tel sujet ?
Ils sont demandeurs, mais de moins en moins. En revanche, les jeunes acteurs le sont. Pour que Lars Eidinger accepte de s’habiller en SS, il faut une implication forte de sa part. D’ailleurs, la première scène qu’on a tournée avec lui a été coupée : Lars s’était mis à sangloter pendant un quart d’heure, c’était bouleversant. Les Allemands sont totalement concernés par ce qui s’est passé, ils sont dans la rédemption, dans un espoir de résilience. Mais n’est-il pas plus facile pour le petit-fils d’une déporté de vivre, pour que pour le petit-fils d’un nazi ? Là est la vraie question…

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