Entrelacs au château

Des œuvres de Camille Claudel disséminées dans les pièces d’un château : quelle heureuse surprise réservée par le conseil général de l’Isère, quelle fabuleuse idée et, en somme … quelle visite à ne pas rater cet été ! Laetitia Giry

Perdu dans une nature verdoyante et vallonnée, entre Voiron et le lac de Charavines, le château de Longpra siège fièrement au bout d’une allée d’arbres au cachet millénaire (et d’ailleurs classée). Entouré de douves et d’un petit pont-levis encore remonté chaque soir pour protéger l’intimité des propriétaires des lieux – qui vivent dans l’aile gauche une partie de la semaine –, et l’aile droite, celle ouverte au visiteur, conservée dans son état datant du temps des dernières grandes heures d’une noblesse aujourd’hui déchue. Les visites guidées découvrent l’histoire du lieu, sa chapelle, et surtout son majestueux salon carré paré de miroirs, d’élégants tissus jaunes et gris, riche en ouvertures vers l’extérieur, et valant à lui seul le détour. Cet été, des œuvres des sculpteurs Camille Claudel et, de manière plus anecdotique, Auguste Rodin, ponctuent ce parcours. Un événement très étonnant pour un lieu privé, mais fort appréciable et absolument recommandable…

Le charme et la torture

Camille Claudel, c’est d’abord la sœur du génie littéraire Paul Claudel, puis l’amante tourmentée du grand et fameux Rodin, et bien évidemment une âme possédée par la folie créatrice, puis la folie tout court (elle vivra trente ans en asile avant d’y mourir). Si la charnière entre le dix-neuvième et le vingtième siècle a vu éclore beaucoup de courants fatidiques et d’œuvres déterminantes, celle de cet être à part, inclassable, en fait indéniablement partie. Les sculptures montrées ici sous verre ne sont que corps lancés en défi à l’apesanteur, jetés en équilibre ; des corps ancrés dans des drapés au sol,   et n’aspirant pourtant qu’à l’élévation par le mouvement. La chair s’incarne en volutes, en torsions du bronze - cette matière pérenne brillamment travaillée pour être l’expressivité corporelle même, acharnée et désespérée. Plus que des portraits (sa mère ici, une petite fille là), ce sont des corps anonymes (La valse, La fortune, L’abandon, La suppliante), allégories triomphantes, qu’émane le mieux ce qui définit la vibrante et charnelle Claudel : l’intense émoi du tragique.

Un été Claudel, jusqu’au 30 septembre à la Maison Ravier (Morestel) et au château de Longpra (Saint-Geoire-en-Valdaine)

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