Quand Clôde Coulpier met « un certain bordel » au Bauhaus

Surrounded by chaos

Bauhaus

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Il se joue sur les murs du Bauhaus un bazar visuel déroutant mais captivant. Cet étrange paradoxe plastique a surgi de la tête du Grenoblois Clôde Coulpier, qui expose au bar rue Chenoise un éventail de son travail, sur le fil du chaos. Rencontre avec un artiste du geste.

Votre exposition au Bauhaus s’intitule Surrounded by chaos. Pourquoi ce choix ?

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Clôde Coulpier : C’est le titre d'une de mes photos, celle d'une fille qui joue dans la neige. Le but du jeu était d’entourer cette œuvre de chaos. C’est la première fois que je fais une expo dans un bar et c’est un contexte super compliqué comme ce n’est pas un lieu d’expo.

J’aime beaucoup travailler sur l’espace, par contre je ne voulais pas travailler sur quelque chose de contextuel. Et malgré cette difficulté, je ne souhaitais pas prendre une série et juste l’étaler comme ça. C’est presque une expo de pratique, une expo collective tout seul. Du coup, il y a plein de choses. L’image, Surrounded by chaos, c’est la seule image unique, toutes les autres pièces sont issues de séries.

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Pourquoi travailler par série ?

Je ne m’intéresse pas tant au sujet qu’au geste que le sujet me permet. Il va y avoir un geste que j’aime beaucoup faire et qui va me permettre d’avoir du temps pour réfléchir à autre chose.

Et c’est le fait de travailler par série ou d’exposer dans un bar qui a abouti à une expo de pratique ?

D’habitude, j’ai envie de créer un lien entre les choses, ou plutôt de voir ce qui se passe entre les œuvres. Ce "entre" fait apparaître une autre chose, mais là, dans le bar, ce n’est pas possible. Du coup, j’ai fait en sorte que ça soit le bordel, et que tu te demandes ce que ça dit.

Malgré le « bordel », on peut s’apercevoir qu’il y a certaines récurrences dans vos œuvres…

Effectivement. Même si je fais des choses très différentes, il y a forcément un fond qui revient, plus ou moins consciemment. Généralement, quand je travaille, je ne sais pas ce que je fais. Je fais une forme, ça me plaît, je continue, j’arrête quand ça me saoule. Mais surtout, cette forme m’a donné l’envie d’en faire une nouvelle. Et ainsi de suite. C’est après souvent que je m’aperçois de ce qu’il y a entre les choses, ou qu’il y a la même chose dans tout.

Quand je suis trop précis à la base, c’est souvent les plus mauvais boulots parce que ça devient l’illustration d’une idée. C’est moins intéressant, j’ai moins la possibilité de me retrouver dans une position d’être surpris.

Alors comment se manifestent ces récurrences dans votre travail ?

Il y a des manques, des trous, des espaces. J’ai l’impression qu’en regardant ce que je fais, j’essaie de montrer avant tout ce qu’il n’y a pas sur l’image. De faire en sorte de pouvoir faire regarder à côté. Souvent, ce qui m’intéresse, ce sont les espaces entre les choses : qu’est-ce que chacun va produire comme image pour relier deux pièces, qui n’ont pas l’air d’être liées ?

C’est pour ça aussi que c’est compliqué avec le Bauhaus, parce que c’est compliqué de jouer avec l’espace, parce que le lieu change suivant le moment. Par exemple, aussi bizarre que cela puisse paraître, la galerie Showcase, malgré sa configuration [une vitrine sur un mur, à l'angle de la place aux Herbes et de la place Claveyson – NDLR], tu peux plus la penser comme un lieu d’exposition, c’est plus simple.

Pour votre exposition au Bauhaus, comment avez-vous constitué le corpus présenté ?

Il y a beaucoup de choses que je montre pour la première fois. Il y a deux-trois trucs qui n’ont pas de titre, c’est la première fois que je fais ça. Ce sont des pièces encore superembryonnaires mais que j’avais envie de montrer quand même. Comme le but du jeu c’était de mettre un certain bordel, pourquoi ne pas exposer des pièces que je n’ai pas encore définies et que ça soit le bordel pour moi aussi d’une certaine manière.

Mais ça aurait pu être encore plus le bordel ! C’est le problème quand tu connais trop ton boulot et que tu n’es pas dans une optique de spatialisation pour raconter quelque chose d’autre. C’est vraiment un travail sur le travail.

Comment a été pensée l’exposition ?

Quand j’ai pensé l’expo, il y avait trois pièces que je voulais mettre : La Particule en pâte à fixe ; Dry Idea, photographie de la fille avec les goutes d’eau ; et Surrounded by chaos. Ce sont les trois seules choses dont j’avais déjà l'emplacement en tête, je savais où il fallait qu’elles soient et du coup tout s’est "construit" autour, comme un Big Bang.

Surtout qu’en ce moment je repense beaucoup à la soupe prébiotique, comme quoi le vivant serait né d’une mare chaude grâce aux minéraux, qui ont créé les éléments et les particules. Finalement, je vois mon travail un peu comme ça : faire se frotter deux éléments qui n’ont pas forcément à voir l’un avec l’autre mais qui vont donner un troisième.

Du coup ça c’est amalgamé autour des ces trois pièces sans qu’elles soient directives. Ces trois pièces m’ont permis de créer l’espace dans ma tête pour que je puisse après faire le reste, c’était mes murs en gros.

Votre pratique est très éclectique : dessins, photographie, et aussi la pâte à fixe...

Oui, je travaille beaucoup à la pâte à fixe. Par exemple La Particule, elle a été prise d’une autre pièce en pâte à fixe qui s’appelle L’Idiot du village. En gros, j’extrais des choses qui en font d’autres. La pâte à fixe est assez totémique comme matière dans mon boulot. C’est une boule de pratique, t’en fais une autre et quand ça sera fini, ça va se réintégrer à l’intérieur.

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