La magie du spectacle

Après La Flûte enchantée, La Traviata et West Side Story, la Fabrique d’Opéra s’apprête à nous dévoiler sa création 2010, Don Giovanni. Entretien avec le chef d’orchestre Patrick Souillot. Propos recueillis par Georges Renau

Petit bulletin : Lorsqu’en 2007 vous avez imaginé la formule l’Opéra pour tous, quels en étaient les objectifs ?
Patrick Souillot : L’objectif premier de notre projet est de faire découvrir l’opéra et de le rendre accessible au plus grand nombre. Sa particularité est de considérer qu’en devenant acteurs d’un projet, des jeunes s’y intéresseront davantage et y porteront une attention particulière. La dimension sociale est donc un paramètre déterminant de notre action, et elle permet de valoriser toutes les compétences d’un territoire, notamment celles des établissements d’enseignement technique et d’apprentissage, dans lesquels il y a des ressources incroyables de talent et de créativité.Les décors, costumes, maquillages et coiffures sont assurés par les élèves de plusieurs écoles et lycées de la région grenobloise. Comment s’est passée la collaboration de ces élèves avec les autres participants de l’opéra ?
C’est chaque année un plaisir de travailler avec des équipes pédagogiques motivées et motivantes, qui sont un relais formidable auprès des jeunes et en tirent le meilleur. C’est étonnant de voir le regard de ces jeunes lycéens et apprentis qui découvrent et peu à peu se prennent au jeu, s’investissent dans un projet dont ils étaient au départ étrangers. Ils ont un talent fou, et le message qu’on peut leur faire passer c’est qu’ils ont de l’or entre les mains. Le projet est exigeant et se déroule dans des conditions professionnelles, il leur apporte la rigueur et la satisfaction de se dépasser. Quant aux musiciens de l’orchestre, ils travaillent depuis près de 6 mois, et prouveront qu’avec du travail, on peut déplacer des montagnes et en premier lieu s’étonner soi-même !Ce sera avec Don Giovanni la quatrième fois que la Fabrique d’opéra va produire un opéra important à Grenoble. Quels changements avez-vous constaté dans l’évolution de votre production ?
Nous essayons à chaque production de tisser des liens directs avec la population. Cette année, nous avons travaillé spécialement à l’ouverture des répétitions au public et à une nouvelle forme de répétitions “pédagogiques“ que nous appelons “Dans la tête d’un chef d’orchestre“. Nous tissons aussi des partenariats avec des entreprises de la région, et entrons en contact directement avec les Comités d’Entreprise. Nous voulons aller chercher le public là où il est, partager ce projet car il ne fonctionne que quand tout le monde se l’accapare un petit peu.La mise en scène est de Jeanne Roth, avec laquelle vous aviez déjà collaboré pour La Traviata en 2008 et West Side Story en 2009. Est-ce que Don Giovanni présente des difficultés particulières de mise en scène par rapport aux autres œuvres ?
Don Giovanni est vraiment une étude sur des personnages. Le talent du metteur en scène est primordial pour en comprendre l’évolution. J’aime ce que fait Jeanne, elle rend les choses simples… sans les rendre simplistes. Au contraire, elle traite toujours le fond avec autant d’intérêt que la forme. Elle a beaucoup travaillé sur des formes moins académiques d’opéra, et du coup son expérience, y compris en théâtre de rue, lui permet d’aborder ces grands projets avec une autre vision, qui correspond à notre éthique.La perception du public en général est que l’opéra est un spectacle élitiste réservé à un public averti. Pensez-vous que le public du Summum pourra apprécier le Don Giovanni ?
Je n’oublie jamais que l’opéra est avant tout un art populaire… avant que les puissants et la bourgeoisie ne se l’accaparent. Notre ambition est de renouer avec ce succès populaire, sans bien entendu transiger sur la qualité des productions. Je veux défendre le spectacle vivant, car l’Homme est au centre de la création, qui pour moi est un aboutissement de l’intelligence humaine. Combien de personnes qui n’avaient jamais vu de tels spectacles nous ont dit ou écrit les émotions qu’ils avaient eues ? Entendre en direct un orchestre au complet, des voix exceptionnelles, des chœurs, le tout avec des décors, costumes, lumières… C’est la magie du spectacle !Le choix du Summum pour la représentation est-il bien adapté à un opéra ?
L’acoustique du Summum est un faux problème ! Le Summum est une salle populaire… Donc accessible. Son acoustique n’est pas mauvaise. C’est une salle qui accueille des spectacles de musique amplifiée, elle n’est pas “équipée“ et donc tout dépend de la technique qu’on met dedans. Notre stratégie n’est pas de faire de la musique amplifiée, ce qui d’ailleurs ne fonctionnerait pas avec un orchestre en direct de 80 musiciens et des chanteurs qui ont l’habitude de chanter dans tous les théâtres du monde. Nous mettons en place un dispositif sonore qui ne fait que “reprendre et préciser“ le son direct que tout le monde peut entendre de sa place. Nous faisons très attention à ce qu’il n’y ait pas de distorsion d’échelle entre ce que l’on voit et ce que l’on entend.Est-ce que vous pouvez nous dévoiler le programme pour l’année prochaine ?
On peut d’ores et déjà dévoiler notre prochain projet, Carmen, et en 2012 nous reviendrons à une comédie musicale… Nous essayons d’aborder des styles différents, sans exclusive. L’important, c’est de prendre les gens par la main pour leur faire découvrir l’opéra, comme on irait au musée, une sorte de visite guidée initiatique. Nous avons d’autres projets sur des formats plus petits, qui permettraient à nos productions de voyager et aller à la rencontre des publics oubliés.Don Giovanni
Du 5 au 9 mars, au Summum

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