Le soleil et la lune

Le trio Olivier Cadiot (au texte), Ludovic Lagarde (à la mise en scène) et Laurent Poitrenaux (au jeu) débarque à Grenoble pour présenter deux spectacles très différents, mais animés par la même foi en un théâtre contemporain ouvertement tourné vers le verbe. Aurélien Martinez

Laurent Poitrenaux est un comédien magnétique : Ludovic Lagarde l’utilise à merveille, convoquant selon les projets les diverses facettes de cet artiste kaléidoscopique. En ce début mars, le metteur en scène dévoile à Grenoble deux créations où rayonne son acteur fétiche : Un nid pour quoi faire d’abord, à la MC2, puis Un mage en été, à l’Amphithéâtre. Deux pièces nées d’une autre relation savamment entretenue par Ludovic Lagarde : celle avec l’auteur Olivier Cadiot, dont il adapte ici deux textes originaux, pour deux résultats diamétralement opposés dans la forme, même s’ils se rejoignent sur le fond, nourris par cette envie de porter sur la plateau une langue riche et poétique. Le bavard Un nid pour quoi faire évoque ainsi une cour fantasque exilée à la montagne, et dirigée par un roi haut en couleur. Dans le rôle du souverain capricieux qui essaie tant bien que mal de donner le change, Laurent Poitrenaux excelle. Le spectacle rassemble alors plusieurs genres théâtraux, pour un imbroglio pop agréable à savourer (la scénographie tout en bois en met plein la vue ; les passages comiques le sont effectivement…), qui néanmoins peine à véritablement décoller, laissant un léger goût d’inachevé. Précisions tout de même que nous avons découvert ce Nid au festival d’Avignon 2010 (où Olivier Cadiot était artiste associé), et qu’il a pu se densifier depuis.

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Un mage en été est l’autre proposition du trio. Changement de registre ici, avec plus qu’un seul interprète sur scène. Laurent Poitrenaux campe comme toujours Robinson, personnage récurent chez Cadiot – dans Un Nid pour quoi faire, Robinson est un jeune étranger qui va être propulsé dans le nid royal. Un Robinson cette fois-ci à la logorrhée hypnotique (hypnotisme renforcé par le travail sonore impressionnant de l’Ircam, et la scénographie minimaliste mais évocatrice), qui aborde ses métamorphoses et ses voyages intérieurs. Quand dans Un nid pour quoi faire le fil narratif, quoi qu’emmêlé, s’imposait facilement, ici, c’est tout le contraire. Le spectateur est invité à se laisser emporter par ce poète solaire, ce mage malgré lui qui ferme les yeux pour voir les choses. Quitte à se perde en route, mais qu’importe : le principal, ce n’est pas la destination, mais le voyage.

 

Un nid pour quoi faire, du mercredi 29 février au samedi 3 mars, à la MC2.
Un mage en été, du mardi 6 au jeudi 8 mars, à l’Amphithéâtre (Pont-de-Claix).

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