L'odyssée de l'espèce

Germinal

Hexagone

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

"Germinal" est un roman phare de la littérature française. Mais depuis peu, c’est également un spectacle d’Antoine Defoort et Halory Goerger qui, soit dit en passant, n’a pas grand chose à voir avec Émile Zola. Et dans ce cas précis, c’est plutôt une excellente nouvelle ! Aurélien Martinez

On a déjà tout écrit dans ces colonnes sur Antoine Defoort, artiste « technophile » que l’on défend bec et ongle depuis son premier passage à Grenoble. C’était en 2009, avec le barré Cheval, savoureux ovni scénique présenté comme « un traité abstrait du ricochet » au cours duquel il s’agissait « de faire rebondir des objets mous (idées, concepts ou stratagèmes) sur des surfaces dures (écrans, guitares ou piano) ». Un régal d’inventivité et de fantaisie.

Puis il y eut Indigence = Élégance, objet hybride entre la fausse conférence et la performance ludique, où Defoort mixait l’ensemble de ses obsessions : la technologie, les sciences, mais aussi – surtout même – l’art en général. Un spectacle auquel nous avions consacré notre une en 2011 lors de son passage à la MC2, avec un titre qui résume parfaitement le personnage : Game boy. Oui, Antoine Defoort aime à jouer avec l’idée de représentation, comme avec le public, qu’il prend souvent à rebrousse-poil tout en essayant de maintenir avec lui une complicité constante. Mais pour Germinal, sa dernière création dévoilée en septembre 2012 à la Biennale de la danse de Lyon (pourquoi pas !), il a franchi un pas de plus en construisant une réelle pièce de théâtre et non une suite de séquences. Un résultat qui, une fois de plus, surprend et enchante, tant dans la forme que le fond.

lol

C’est l’histoire de la vie. Ou du commencement de la vie. Enfin, plutôt les premiers pas de la société. « Une allégorie de l’histoire de l’humanité » explique Defoort. Oui, c’est bien ça. Où il est donc question de refaire le monde, depuis les origines. Au début, le plateau est nu. Logique. Seuls quatre personnes l’habitent, dont Defoort lui-même, et son complice Halory Goerger. Quatre individus qui vont tour à tour découvrir le langage, la communication, la nature, les lois de la physique, ou encore le pouvoir du schéma. Tout ça à tâtons, avec naïveté, gaucherie, et un humour nonchalant ravageur, le duo aux commandes s’autorisant les plus grandes libertés pour faire avancer son récit. On passe ainsi d’une scène chantée façon comédie musicale à une autre convoquant une hotline avec Dieu en chef du service client.

C’est drôle, ça pourrait sembler bricolé sur un coin de table, mais ça ne l’est pas, tant la construction est subtile et le sous-texte pertinent. Alors bien sûr, certains resteront à la porte du monde de Defoort et  Goerger  – un confrère du Progrès de Lyon écrira même que cette création n’est faite que pour « une intelligentsia de la gaudriole qui se marre pour un rien » –, mais c’est le jeu. Un jeu qui vaut le coup, car pour peu que l’on adhère au principe, cette odyssée de l’espèce est une aventure qui marque.

Germinal, mardi 16 et mercredi 17 avril à 20h, à l’Hexagone (Meylan) 

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Lundi 10 septembre 2018 Du mentalisme, du théâtre, du clown, de la musique… La quatrième édition du festival d’arts de rue Merci, Bonsoir ! s’annonce, comme chaque année, passionnante et variée. Comme nous n’avons pas pu voir beaucoup de spectacles en amont, nous avons...
Lundi 22 juillet 2013 Ça y est : après deux semaines intenses (avec quatre à six spectacles par jour), l’équipe du Petit Bulletin a quitté Avignon. Dans nos valises, une trentaine (...)
Mercredi 9 janvier 2013 Comme nous sommes de grands professionnels, nous sommes allés voir le spectacle Germinal des géniaux Antoine Defoort (souvent vu à Grenoble, et à qui nous (...)
Mercredi 5 septembre 2012 Antoine Defoort est un artiste atypique que l’on a souvent pu apprécier sur les scènes de l’agglo : que ce soit à l’Odyssée d’Eybens (dans le cadre de la (...)
Jeudi 12 mai 2011 Les Soirées, mini festival de trois jours programmé par la MC2 (et coproduit par le Centre chorégraphique de Gallotta), fait cette année le « grand écart » en s’intéressant « à la danse curieuse ». Un thème assez large qui permet d’englober divers...
Mercredi 16 juin 2010 Quelqu’un qui se définit comme "scientophile", "artophile" et "ludopathe" ne peut pas être foncièrement mauvais. La preuve avec Antoine Defoort, mathématicien et plasticien de formation qui déstabilise avec un détachement presque insolent les arts...
Vendredi 9 octobre 2009 Dans le cadre des Rencontres-i, Antoine Defoort, plasticien de formation, présente Cheval, un spectacle fantasque basé autour d’un dispositif surprenant. On a rarement vu ça ! Propos recueillis par Aurélien Martinez

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X