MARIO TOBINO
Roman (La Fosse aux ours)
En 1978, Mario Tobino a presque 70 ans. Il s'apprête à quitter l'hôpital psychiatrique où il fut médecin pendant quarante ans lorsque la loi visant à démanteler tous les asiles du territoire est promulguée. Une loi qui représente l'aboutissement d'un courant de nouveaux psychiatres, des innovateurs qui considèrent ces établissements comme des prisons, les médecins comme des bourreaux à la botte du pouvoir, et les prétendus fous des malades passagers à soigner dans des structures normales. Les internés sont priés de se "réinsérer", de retrouver leur famille, de faire à nouveau partie de la société. Malgré quelques articles pour dénoncer cette erreur, Mario Tobino ne peut que constater les ravages de cette décision : des suicides, des crimes, des descentes aux enfers viennent ponctuer la nouvelle "liberté" des malades. Car pour Tobino, il s'agit bien de malades, de névrosés. "La folie est une déesse aux yeux bandés, une danse dionysiaque, un pleur inconsolable, elle est violence. Comment peut-on l'ignorer, à moins d'être des dandys infatués ?" Si les instigateurs de cette loi l'ignorent, c'est qu'ils n'ont pas, contrairement à Tobino, connu la folie avant qu'elle ne soit bâillonnée, camouflée par le fameux "chariot de médicaments", lorsque le pouvoir chimique a remplacé les barreaux aux fenêtres. Ce témoignage du psychiatre Tobino apporte un éclairage passionnant sur le traitement de la folie au cours du 20e siècle. Mais Les Derniers Jours de Magliano ne s'arrête pas là. C' est aussi un récit envoûtant, dans lequel on découvre un médecin intègre, voué à ses patients, autant qu'un écrivain vibrant et raffiné. Un livre riche et émouvant. YN
