Le jeu vidéo, ça se discute

Colloque : Le Jeu Vidéo, au carrefour de l'Histoire, des arts et des médias

École Émile Cohl

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

10e Art / Un colloque aura lieu les vendredi 22 et samedi 23 mars au sein de l'École Émile-Cohl, discutant la place du jeu vidéo dans notre société et parmi les arts aujourd'hui.

1958. Dans le Laboratoire national de Brookhaven, aux États-Unis, William Higinbotham, physicien, et Bob Dvorak, technicien, profitent de leur temps libre et du Systron Donner 3300 à disposition, ordinateur alors surpuissant coûtant 200 000€, pour concevoir en trois semaines ce qui va devenir le tout premier jeu électronique : Tennis for Two. Un spot qui bouge sur un oscilloscope sera la balle, une barre en guise de filet au milieu : ultra simpliste, oui, mais pourtant au summum de l'innovation en cette année où Chuck Berry caracole en tête des charts avec Sweet Little Sixteen. Ce sont les prémices d'une révolution. Car le jeu vidéo, depuis, est devenu une industrie plus massive que celle du cinéma : 81, 5 milliards de chiffre d'affaire en 2014, soit plus du double de celui du 7e art l'année précédente...

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Le premier et massif succès public arrivera en septembre 1972 avec Pong, un jeu « si facile que même un poivrot pourrait y jouer » lancé par Atari sous l'égide du brillant et un peu limite Nolan Bushnell. Un jeu d'arcade, nouvelle machine à sous pour tavernes enfumées. D'emblée, un public adulte : dès ses débuts, la culture du jeu vidéo ne s'est pas limitée aux adolescents. En 1973, Pong permit à Atari de faire 3, 2 millions de dollars de bénéfices.

Vint ensuite le succès des consoles de jeu (de la Atari 2600 à la PS4 en passant par la Wii...), l'arrivée des auteurs dans le monde des développeurs de jeu vidéo (comme le mythique Japonais Shigeru Miyamoto, à qui l'on doit entre autres Donkey Kong, ou encore ceux qui ont été fait Chevaliers des Arts et des Lettres en 2006 : Michel Ancel et Frédérick Raynal), des légendes (le bide apocalyptique de l'adaptation par Howard Warshaw du E.T. de Spielberg, dont les cartouches Atari finirent dans une décharge à Alamogordo). Des jeux sont entrés dans la pop culture, comme Pac Man, Tetris ou Mario. Comme ses studios phares, tels Electronic Arts ou les punks de Rockstar. Et cette question lancinante, depuis une quinzaine d'années : le jeu vidéo, au-delà d'un divertissement de masse, est-il bien devenu le dixième art ?

De nouveaux usages sensoriels

L'École Émile-Cohl, sensible à la question - et aux réticences qui émanent d'encore un peu partout -, organise un colloque sous l'impulsion de Cyril Devès (coordinateur du Centre de Recherche et d'histoire inter-médias de l'école) pour discuter du sujet. Car la puissance de ce medium, sa diversité, ses intentions en font aujourd'hui sans conteste un art à part entière, en perpétuel renouvellement. Encore critiqué ? Oui, comme l'était le cinéma en son temps, accusé de prendre la place du livre. Ou le rock'n'roll des fifties, soupçonné de nuire à la "grande musique". Aujourd'hui, les chefs d'œuvre se nomment Shadow of the Colossus, God of War et Red Dead Redemption 2. Les émotions et la réflexion que ces jeux provoquent en nous n'ont pas d'équivalent dans un autre art.

Dans le programme du colloque, Cyril Devès explique ainsi :

il est nécessaire de réaffirmer que le jeu vidéo est un art et que comme toutes les autres disciplines, il s’affirme en "aspirant" ce qui a été fait avant lui. Comme la photographie a renouvelé les codes du portrait et du paysage, comme le cinéma a réinventé ceux de la narration et de la prise de vue, le jeu vidéo apporte à ses contemporains de nouveaux usages sensoriels : immersion dans un scénario, réalité augmentée... L’individu n’est pas simplement le spectateur d’un monde virtuel esthétisé, il en est un acteur, sinon le co-producteur.

Ainsi, les liens du jeu avec l'Histoire (pensons à la série Assassin's Creed de Ubisoft, qui s'imprègne des grandes périodes historiques !) seront débattus en particulier lors de deux rencontres, dont l'une intitulée "du salon à la salle de classe : étudier la Première Guerre mondiale avec Battlefield 1" avec l'enseignant et animateur de la chaîne YouTube Histoire des Jeux, William Brou. L'autre sera centrée sur "le projet Bretez : quand le jeu vidéo vient au secours de l'Histoire", avec Mylène Pardoen, chercheuse et initiatrice de ce projet qui vise à recréer les rues du Paris du XVIIIe siècle à partir d'un plan de l’ingénieur Louis Bretez réalisé pour le prévôt des marchands Michel-Étienne Turgot, entre 1734 et 1739. Principale innovation : une nouvelle approche pour restituer le passé « en combinant les trois dimensions de l’espace avec une dimension sonore qui rend le passé disponible et tangible pour un très large public ». De même, "les influences artistiques, historiques et idéologiques dans la série The Legend of Zelda" seront explorées.

Le chercheur Cédric Plessiet et le metteur en scène Georges Gagneré feront le lien entre le jeu vidéo et les expérimentations théâtrales (samedi 23 à 11h25), tandis qu'une vingtaine d'autres thèmes seront discutés durant ces deux jours, allant de la réception du jeu vidéo ou son rapport à l'objet muséal, en passant par le game art et la place du créateur de jeu vidéo. Ensuite, il sera temps de... jouer.

Le jeu vidéo, au carrefour de l'Histoire, des arts et des médias
À l'École Émile-Cohl (1 rue Félix Rollet, Lyon 3e) les vendredi 22 et samedi 23 mars

À lire : Harold Goldberg, Aybabtu (Allia)

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