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Le Château ambulant

Hayao Miyazaki pousse au paroxysme son art baroque, féerique et torturé, dans un film foisonnant livré sans mode d'emploi, comme un feu d'artifice des sens et de l'esprit. Christophe Chabert

Devenu une véritable icône depuis le triomphe mondial du Voyage de Chihiro, Hayao Miyazaki semble n'avoir eu qu'une seule possibilité pour prolonger son œuvre (dont il ne cesse d'annoncer la fin) : labourer une fois encore son territoire de cinéaste pour espérer en faire sortir un fruit plus mûr et plus juteux. Ainsi se livre Le Château ambulant aux yeux du spectateur fidèle : une compilation des thèmes, des formes et des personnages qui ont fait la fortune des opus précédents, avec la certitude absolue qu'il n'y a même plus besoin d'en expliquer les codes ou les racines. Qui l'aime le suive, car Le Château ambulant sera miyazakien ou ne sera pas (même si, pour la première fois, le maître adapte une œuvre littéraire, signée Diana Wynne Jones, ancienne élève de Tolkien, ce qui se sent à plus d'une reprise).L'ivresse des cimes
Sophie, petite marchande de chapeaux victime, après rencontre inopinée avec un prince magicien peroxydé, d'un sort lancé par une vilaine sorcière qui la transforme en petite vieille voûtée, est un peu la sœur fictive de Chihiro ; et le background géographico-historique, proprement indéterminable (un mélange entre Vienne, la Rühr et les Alpes suisses, à une époque de conflit qui pourrait être aussi bien 1870 que la première guerre mondiale), permet à Miyazaki de juxtaposer à nouveau paysages immaculés et grises fumées industrielles, chaos belliciste et romance enfantine, fascination pour les esprits et les démons menaçants et empathie sincère envers un message d'amour et de paix. Parlons donc des esprits du film, frappés plus que frappeurs : non seulement ils atteignent ici une sorte de vertige dans l'imaginaire débridé (un feu de cheminée qui parle, une grosse sorcière qui peine dans les escaliers - scène magistrale, des monstres en caoutchouc, un chien asthmatique...), mais ils semblent avoir pris le contrôle d'un scénario dont la complexité risque de perdre plus d'un bambin en route. À l'image de ce fameux château ambulant, bric-à-brac monstrueux fait de fer, de bois et de pierre, machine vivante, mouvante et émouvante, on ne sait jamais trop dans quel espace-temps on va se retrouver d'une séquence à l'autre, dans quel univers le magicien japonais va nous envoyer. Ou surtout si Mamie Sophie va redevenir, le temps de quelques plans, la jeune fille candide du début, ou bien une sorte de mère quadra attentionnée pour la ménagerie délirante qui occupe cette moderne tour de Babel. Passé, présent et futur, réalité et onirisme, fable écolo-politique et conte cruel de la jeunesse envolée, Le Château ambulant nous jette sans ménagement dans ce labyrinthe d'images qui sollicite le regard et les neurones jusqu'à une forme d'épuisement. Tant pis, tant mieux : le maître a, pour le meilleur et pour le pire, atteint une nouvelle cime.Le Château ambulant
D'Hayao Miyazaki (Jap, 1h59) animation

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