Un pavé dans la mare

Jeunes Publics / La seizième édition de la Biennale du Théâtre Jeunes Publics débute cette semaine. Véritable panorama du théâtre destiné aux plus jeunes, cette Biennale est également l'occasion de dresser un état des lieux dans un domaine certes fragile, mais en constante évolution. Dorotée Aznar

Trente ans d'existence, 6 000 spectateurs en 1977 pour plus de 35 000 en 2005, les directeurs de la Biennale du Théâtre Jeunes Publics ont sans conteste prouvé la raison d'être d'une telle manifestation. Cette année, une quinzaine de spectacles français et internationaux sont proposés dans les principaux théâtres de Lyon et devraient attirer aussi bien les spectateurs que les programmateurs français et étrangers. Mais la Biennale est autre chose qu'une course aux chiffres. C'est l'occasion d'une réflexion profonde sur le sens des spectacles qui sont donnés à voir aux enfants. Des minots, pas des jambonsToutes les salles de théâtre ont aujourd'hui l'obligation de programmer des spectacles pour le jeune public. Résultat ? Des créations au rabais, aussi bien financier qu'artistique sont proposées aux plus jeunes. «On ne cherche pas à faire du théâtre ou de la danse mais «du spectacle». On prend un peu de danse, un peu de théâtre, un peu de vidéo et de cirque, on touille et cela fait un spectacle», déplore Michel Dieuaide, co-directeur de la Biennale. Selon lui, impossible d'envisager un travail théâtral qui ne soit pas porté par une pensée : «on ne peut pas se contenter de proposer du divertissement sans contenu aux enfants», affirme-t-il. La programmation de la Biennale s'appuie donc sur des spectacles bien faits, mais pas uniquement : «cette année, nous voulons montrer que nos choix sont exigeants, sans pour autant promouvoir une intellectualité ennuyeuse. Nous voulons des pièces qui ont du sens, et pas des travaux formatés». Cette seizième édition s'articule autour des metteurs en scène (il y a quatre ans, les choix s'étaient portés sur des auteurs). Treize metteurs en scène proposent une pièce de leur choix et, selon toute probabilité, les œuvres présentées devraient provoquer si ce n'est des polémiques, au moins des discussions vives. «Cela est dit sans arrogance et sans aucune prétention, mais le travail que nous faisons, c'est de l'art, pas de l'artisanat. Je vois revenir avec horreur les spectacles du début des années 70 qui parlent de la nature, des animaux. Des spectacles qui sont colorés, qui vont vite. J'ai l'impression que l'on se remet à croire que les enfants n'ont pas de pensée. Ce n'est pas vrai ; les enfants nous regardent et ils savent très bien dans quel monde ils sont», déclare Michel Dieuaide. Effet de loupeLa situation du théâtre destiné au jeune public offre un «effet de loupe» sur la condition du théâtre en général. On y retrouve bien sur les mêmes problèmes économiques, mais on voit également que les questions d'élargissement du répertoire et de recherche de nouveaux langages s'y font sentir de manière plus aigue. On constate par exemple cette année que des vieux contes peuvent naître des œuvres qui affichent une liberté de ton peu commune (À la soupe, les enfants ! de Gerda Dendooven raconte les aventures de deux gamines orphelines qui partent en quête d'une maman) ou que les metteurs en scène se penchent sur des textes non écrits pour le théâtre (Métaphysique des tubes d'Amélie Nothomb par exemple). Enfin, le théâtre jeune public n'échappe pas à la règle du mélange des genres. C'est aujourd'hui une évidence que les arts se «parlent» et la programmation reflète ces influences diverses : on y trouve du théâtre dansé, du théâtre musical, un opéra, du théâtre de marionnettes ou des escapades vers la vidéo. Mais que les amateurs de formes simples se rassurent, certains artistes souhaitent encore aujourd'hui travailler sur des formes dramatiques très épurées où l'acteur est au centre (c'est le cas de La Peur bleue, une adaptation de Barbe bleue interprétée par un acteur conteur chanteur seul en scène).Jeunes publics, public de jeunesAujourd'hui, les enfants de moins de quinze ans représentent environ 35% des spectateurs de théâtre en France. Emmener les enfants au théâtre, considérer que le théâtre est une manière d'accéder à la connaissance est devenu une évidence. C'est donc du côté des parents qu'il faut lorgner. Beaucoup de jeunes adultes entament en effet leur culture théâtrale mais aussi musicale et chorégraphique en emmenant leurs enfants aux spectacles. La première fois des enfants est aussi souvent la première fois des parents. C'est pourquoi les spectacles jeunes publics s'adressent souvent à tous les publics, afin que les parents y trouvent goût et intérêt. Si le rôle de l'école comme prescripteur de la sortie au théâtre est évident, la sortie en famille est aujourd'hui un élément pris en compte par tous les metteurs en scène qui s'adressent aux plus jeunes. Autre nouveauté, les jeunes grands-parents sont de plus en plus les accompagnateurs culturels des enfants. Toutes ces évolutions permettent de faire changer le théâtre pour les plus jeunes qui, aujourd'hui plus qu'hier, ne s'adresse plus uniquement aux enfants.Biennale du Théâtre Jeune PublicDu 6 au 15 juinVoir le programme sur ce site

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