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Quand on arrive en livre !

Pas terrible

Deadlinesde Ludi Boeken et Michael Alan Lerner (GB-Fr-Tunisie, 1h43) avec Stephen Moyer, Anne Parillaud...1983. Alex, pigiste top model à Paris, entreprend de perdre son pucelage journalistique en se rendant à Beyrouth, "in the shit" comme on dit apparemment dans le jargon. Là, entre deux défilés dans les rues canardées sur fond de folk-rock hasardeux, et un petit cours de vulgarisation géopolitique (la séquence "le conflit libanais expliqué aux 7-10 ans" est assez impayable), il flashe total sur Julia Miller, photographe intrépide. On ne met pas en doute la sincérité des deux artisans derrière ce film, on leur reproche "juste" d'avoir cédé aux sirènes du cinéma de divertissement, quitte à noyer leur propos par le fond. Acteur principal fadasse au possible (son brushing joue mieux que lui), seconds rôles caricaturaux, intrigue faussement nébuleuse, autant de données qui font que le discours de Deadlines est plus proche de Michael Kael contre la World News Company que du brûlot politique dont il se donne les airs.Dear Wendyde Thomas Vinterberg (Danemark, 1h41) avec Jamie Bell, Bill Pullman...Depuis Billy Elliott, Jamie Bell a choisi les chemins de traverse, préférant les films marginaux aux héros tout tracés qu'on n'a pas manqué de lui proposer. Après Nicholas Nickleby et L'Autre rive, le voilà dans la peau d'un ado de 18 ans dans une petite ville minière écrivant en voix-off à sa chère Wendy qui n'est autre que son arme préférée dont il ne saurait se séparer même s'il se refuse à l'utiliser. Dans ce scénario de Lars Von Trier, on retrouve le pire de son inspiration : propos naïf jusqu'à la niaiserie (une arme, dès que tu la touches...), voix-off qui alourdit et complique la narration pour rien (Trier ne s'est manifestement jamais remis de sa vision de Barry Lyndon) et violence impromptue rigoureusement inutile. C'est d'autant plus navrant que Thomas Vinterberg, après Festen, s'avère ici totalement incapable de donner un tant soit peu de crédibilité à ce western pour gamins qui semble s'ennuyer sur une aire de jeux. Reste Jamie Bell, naturellement charismatique, qu'on a hâte de retrouver dans le King Kong de Peter Jackson. A dirty shamede John Waters (EU, 1h29) avec Tracey Ullman, Johnny Knoxville...Le plus mauvais film de l'enfant terrible du cinéma américain ! Après l'épatant Serial Mother où une mère de famille bien sous tous rapports désossait tout ce qui passe, John Waters nous la rejoue version sexe avec une bonne catholique qui vire au lubrique. Comédie sur un scénario de film porno (tout le monde ne pense qu'à ça, et ne parle que pour arriver à ça), A dirty shame ne montre pourtant jamais de scène de sexe (Waters va d'ailleurs jusqu'à filmer une orgie où chacun se donne des coups de boule en guise d'orgasme !). Du coup, on assiste à un catalogue interminable, essentiellement gynécologique, où chacun bavasse sans jamais pouvoir rien faire. La mise en scène délibérément sitcom du grand John finit d'achever la frustration. Sauf dans un finale totalement dégelé où les anus et les vagins poussent sur les troncs d'arbre, et où toute la ville s'embrase dans une orgie dyonisiaque jusqu'à l'éjaculation galactique ! ‚a ne suffit pas à rattraper le film mais ça nous montre que Big John a encore de la sève.Les Enfantsde Christian Vincent (Fr, 1h28) avec Karin Viard, Gérard Lanvin...Christian Vincent a l'humilité de s'effacer derrière ses sujets ; avec Je ne vois pas ce qu'on me trouve ou Sauve-moi, il a su à côté d'un Pierre Salvadori très bien filmer les gens ordinaires. Ici, le voilà qui aborde délicatement le thème des familles recomposées. Lanvin, qui n'a pas le rôle le plus facile, n'y est manifestement pas très à l'aise et si le naturalisme propre à Vincent lui permet une observation souvent juste, elle ne lui épargne pas sur la longueur une certaine tendance à la banalité. Heureusement, Karin Viard, la plus belle femme caméléon du cinéma français, sait infléchir son personnage jusque dans les scènes de ménage les plus triviales pour lui conférer épaisseur et humanité.Lemmingde Dominik Moll (Fr, 2h09) avec Laurent Lucas, Charlotte Gainsbourg, Charlotte Rampling...Dans Harry, un ami qui vous veut du bien, on aimait l'intrusion d'un psychopathe bonhomme dans la vie d'une famille lisse jusqu'à la névrose. Autrement dit le grignotage par le cinéma de genre américain de la chronique sociale à la française. Lemming, malgré son titre (du nom d'un rongeur scandinave), ne grignote pas grand-chose : scénario en forme de boucle parfaite, atmosphère de menace planant dans chaque plan, décors glacés dans lesquels évoluent des personnages fantômatiques... Dominik Moll récite avec application les leçons de ses maîtres et n'arrive pas à faire oublier le matériau dont il s'inspire (Lost Highway de Lynch et Super-Cannes de Ballard), ratant cette fois-ci la fusion entre un cinéma de l'intime et un cinéma du cerveau, ne produisant qu'un exercice de style faiblard et ennuyeux.Mar adentrod'Alejandro Amenabar (Esp, 2h) avec Javier Bardem, Belen Rueda...Vie et mort de Ramon Sampedro. Programmatique, le quatrième film d'Alejandro Amenabar l'est à l'excès. Plaidoyer jamais voilé pour l'euthanasie, le film agace par sa manière de forcer le spectateur à acquiescer à ses "évidences". Les belles idées de mise en scène (comment offrir au paraplégique Sampedro un autre horizon que celui, bouché, des quatre murs de sa chambre) sont immédiatement contrecarrées par ce discours sans nuance, trop sûr de son bon droit. Cette année, il y aura clairement eu deux camps cinématographiques : le camp Amenabar-Leigh, partisans de la bonne conscience et du point de vue surplombant, et le camp Araki-Eastwood, pour qui la frontière entre le juste et l'injuste est avant tout une question d'expérience émotionnelle. Doit-on dire celui que l'on choisit ici ?Otagede Florent-Emilio Siri (EU, 1h53) avec Bruce Willis, Kevin Pollak...Le jeune Florent Siri est très satisfait de son film. Et la fin de la première projo privée à l'attention du seul Bruce Willis, ce dernier lui aurait même fait part de son émotion. Et l'on se dit, en entendant ça, que notre John McLane préféré doit vraiment être à fleur de peau en ce moment pour n'avoir ressenti ne serait-ce qu'un vague frisson devant ce produit calibré, se camouflant grossièrement derrière une noirceur rétive pour faire oublier son manque de propos. Ajoutez à cela une version française aux petits oignons (le déjà culte Hey ! Tu veux un oinj' ?), et vous n'obtenez qu'un demi-nanar osant à peine péter plus haut que son cul. La petite Chartreusede Jean-Pierre Denis (Fr, 1h30) avec Olivier Gourmet, Marie-Josée Croze...Fait pour le moins étrange (quoique), Jean-Pierre Denis semble plus à l'aise avec les sujets polémiques qu'avec les grosses machines lacrymo-consensuelles. En effet, ses Blessures Assassines sur les soeurs Papin étaient aussi vénéneuses que cette Petite Chartreuse est falote. Filmé avec à peine plus de soin qu'un épisode de Plus Belle la Vie (la nouvelle sitcom culte de France 3), enchaînant les péripéties avec un manque de passion qu'on ne retrouve plus guère que chez les présentatrices météo de M6, La Petite Chartreuse se laisse suivre sans hurler par la seule présence d'Olivier Gourmet, définitivement l'un des meilleurs acteurs français du moment. The Worldde Jia Zhang-Ke (Chine, 2h23) avec Tao Zhao, Taisheng Cheng... Sis dans un décor (un parc d'attraction reproduisant les plus grands monuments mondiaux) au potentiel métaphorique quasi-infini, The World témoigne pourtant de l'impuissance de son réalisateur à tirer parti de ses idées, jetées ici à l'état d'ébauches disparates. Le fond, évasif jusqu'à l'ennui le plus brutal qui soit, n'est de plus pas vraiment aidé par une forme rédhibitoire. Images ternes, montage lénifiant, inserts animés particulièrement foireux à chaque fois qu'un personnage reçoit un texto... Ne reste donc qu'un long métrage dont on a la furieuse impression qu'il est fasciné par sa propre inanité. Les Yeux clairsde Jérôme Bonnell (Fr, 1h27) avec Nathalie Bouttefeu, Marc Citti...Après Le Chignon d'Olga, Jérôme Bonnell réunit sa famille d'acteurs pour une nouvelle comédie douce-amère : le portrait d'une fille borderline qui décide de quitter un cercle étouffant (son frère et sa belle-soeur) pour s'évader dans l'incertitude et enfin se révéler à elle-même. Le film accompagne fidèlement le trajet de son anti-héroïne : d'abord par une sorte de burlesque dépressif, puis par un dépouillement où, au milieu d'une nature sauvage, les corps se découvrent et se rapprochent sans dire un mot ou presque. Cette durée obstinée devrait être un atout, mais elle finit par passer pour de la pose : les plans livrent trop vite leur vérité, et l'ennui gagne devant un film qui confond contemplation du monde et contemplation de sa propre mise en scène.

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