Appelez-le Arthur...

Télévision / Découvert sur les planches lyonnaises avec Le Jour du Froment, Alexandre Astier donne une suite à son court-métrage Dies Irae en reprenant le créneau de Caméra Café sur M6. Kaamelott : 3 minutes 30 quotidiennes pour découvrir les dessous burlesques des Chevaliers de la Table Ronde. Christophe Chabert

En 2002, Alexandre Astier s'offre une année faste... Alors qu'il écrit et interprète sous la direction de Jean-Christophe Hembert le formidable Jour du Froment au Théâtre de la Croix-Rousse, il prépare en parallèle un court-métrage intitulé Dies Irae. On y découvre les Chevaliers de la Table Ronde aux prises avec une réalité très quotidienne, glosant dans un langage contemporain très fleuri sur les problèmes qu'ils rencontrent dans leur quête (poussive) du Graal. Une galerie de portraits croqués avec ce sens du dialogue percutant qui est déjà en train de faire la réputation d'Astier, redoublé par sa prestation en Arthur colérique, loin de la noblesse habituelle du premier Roi de Bretagne. Dies Irae confirme l'aptitude d'Astier à travailler un rythme imparable, mais aussi, plus inattendu, son œil de réalisateur, le film étant composé avec un soin inattendu pour du court métrage comique.Les ratés de la table ronde
"Mon agent m'a dit que cette idée marcherait bien dans un format court, explique Astier. Je n'aurais pas couru après un truc télé parce que ce n'est pas mon monde, mais elle avait raison, ça s'y prêtait. C'est pour ça qu'on a enquillé sur des pilotes autoproduits, toujours avec l'Acting Studio." Soit 6 petits films dans le même registre où l'action ne se déroule plus seulement autour de la Table Ronde, mais aussi en extérieurs, devant le château, au bord d'un lac, aux funérailles du beau-père d'Arthur... Le principe est le même : comment les Chevaliers et leur Roi règlent l'intendance complexe d'une époque soumise à de grands bouleversements, se foutent sur la gueule pour des questions d'égo, tentent de concilier vie privée et vie publique... Le ton s'affirme : pas d'anachronismes à la Monty Python dans Sacré Graal, mais un langage trivial sur des sujets emblématiques de l'époque traitée. Et les personnages se dessinent un peu plus : Leodagan, le réactionnaire, Perceval et Karadoc, les crétins patentés, Bohort, le lâche efféminé, Lancelot, le preux chevalier dont tout le monde se fout... Sans oublier un Astier/Arthur de plus en plus acariâtre, affligé par la mollesse et la bêtise de ses suivants, s'emmerdant avec sa femme légitime ou avec ses bouffons. Dies Irae est devenu Kaamelot, et ce sont ces "maquettes" que l'acteur-réalisateur va apporter à Calt et M6, alors en quête d'un successeur à Caméra Café, pastille quotidienne ayant triomphé pendant trois ans en access prime-time.Une famille et des guests pas stars
Après quelques semaines de tractations, Astier se voit proposer de réaliser des pilotes sur le format 3 minutes 30. Il obtient de tourner en Numérique Haute Définition (HD) à deux caméras. Le résultat séduit les responsables de la production, et Astier signe alors pour une centaine d'épisodes. Nous sommes en juin 2004, et l'aventure Kaamelott touche au but. Astier écrit d'abord la Bible, puis constitue sa distribution. À l'arrivée, c'est une "famille" et non pas une "troupe" (Astier est allergique à l'idée) qui va se retrouver à la cour. On retrouve quelques fidèles, dont Jean-Christophe Hembert (par ailleurs "assistant" officieux d'Astier), mais aussi d'autres figures croisées par l'auteur pendant ses "dix ans de scène" à Lyon. Jacques Chambon, avec qui il jouait Nous crions grâce en 1999 ; Thomas Cousseau, le Timon d'Athènes d'Hembert aux Subsistances ; Nicolas Gabion, remarqué chez Meirieu (notamment dans Ressusciter les morts, dont Astier a composé la musique) ; et deux acteurs venus de l'ENSATT : Jean-Robert Lombard, qui joue le Père Blaise, et Anne Girouard, vue cette année en Lisette dans Le Jeu de l'amour et du hasard. Un casting à 100% lyonnais dans lequel, au fil des épisodes, vont défiler des guests (Antoine et Emma De Caunes, Elie Semoun, Bruno Salomone, Didier Bénurau, Lorant Deutsch ou, clin d'œil, Yvan Le Bolloc'h et Bruno Solo). Astier a tenu à ce que ces "stars" ne soient jamais traitées comme telles : "Ce n'est pas le pognon qui les attire parce qu'il n'y en a pas beaucoup. Ceux qui ont aimé les pilotes et les textes sont venus pour ça. Je pense à Antoine De Caunes, avec qui j'ai été vraiment heureux de tourner, qui s'est noyé dans l'équipe avec une simplicité touchante pour un mec de sa réputation. J'ai en mémoire beaucoup d'émotions liées à ces gens qui viennent en toute simplicité, par plaisir, pour jouer avec nous."Maniaque et fier de l'être
Astier va, tout au long de la fabrication de Kaamelott, gardé un contrôle scrupuleux sur la série. Au départ, il devait être assisté par des scénaristes. Exit en cours de route : il écrira tout tout seul ou presque. "Je tiens à la langue que j'emploie, et je veux que Kaamelott ait cette signature-là, que ce ne soit pas forcément des conneries écrites pour du médiéval, et qui auraient pu être écrites pour n'importe quoi d'autre." Idem pour la réalisation des épisodes, qu'Astier veut soigner pour ne pas la rendre trop "télévisuelle" : "Ça ne fait pas télé pour pleins de raisons. Parce que c'est en HD, en costumes avec un aspect réaliste. Par contre, il n'y a pas de richesse de plans : si l'action se passe dans une taverne avec deux personnages, il y a un cadre A pour un personnage et un cadre B pour l'autre." Et en plus de jouer dans 99 épisodes sur 100, il ira même jusqu'à superviser le montage ou à refaire les bandes-annonces, pas assez attractives à son goût. "Je veux être fier de ce qui sorte de la salle de montage pour pouvoir le revendiquer plus tard". Une maniaquerie qui est la preuve définitive du talent de Astier, talent qui aujourd'hui porte ses fruits : avant même la diffusion du premier épisode de Kaamelott, cent autres sont déjà en préparation, et leur auteur a déjà la tête vers d'autres horizons. Télévision française, en garde !Kaamelott
À partir du 3 janvier à 19h50 et 20h40 (sur le câble ) sur M6.

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