«Le film est arrivé au bon moment»

Entretien avec Fernando Meirelles, réalisateur de Blindness. CC

Fernando Meirelles arrive à la conférence de presse avec le sourire malgré l’accueil excessivement violent réservé à Cannes par la critique française à Blindness. Blessé, certes, mais lucide aussi : «L’erreur a été d’accepter de faire l’ouverture, ça nous a pressé pour terminer le film avec dix jours d’avance. Il n’était pas fini lors de sa présentation, le mixage et l’étalonnage n’étaient pas bons…» On comprend pourquoi Meirelles n’a pas résisté aux sirènes de Cannes : son premier film, La Cité de Dieu, y a commencé sa prestigieuse carrière internationale. Mais le scénario aurait pu être bien différent : «J’ai lu L’Aveuglement, le livre à l’origine de Blindess, en 1997 et j’ai voulu l’acheter pour en faire mon premier long-métrage. Mais José Saramago a refusé d’en vendre les droits… Avec le recul, je suis très content de ce refus, car je n’étais pas prêt émotionnellement pour le réaliser». Entre temps, les événements mondiaux ont rattrapé le sujet et justifié sa parabole : «Avec l’épidémie de SRAS, nous avons vu une situation similaire à celle décrite dans le livre, la mise en quarantaine notamment. Et avec l’affaire de l’Anthrax, on a assisté à une remise en question des droits civiques. Je pense que le film est arrivé au bon moment».Fragilité de la civilisation
Plus que ce commentaire d’actualité qui le rapproche d’un autre cinéaste «apatride», Paul Greengrass, c’est le postulat philosophique du bouquin qui intéresse Meirelles : «Cette fragilité de la civilisation… Nous sommes civilisés, éduqués, mais un simple accident peut nous faire revenir à nos instincts les plus primitifs.» Une idée qui est à la base de tous les survival movies, et qui pousse à comparer Blindness avec le cinéma de genre. Meirelles reste sceptique sur la question : «Je ne vois pas ce film comme un film de genre, ceux qui ont envie de voir un film de science-fiction seront déçus. Je ne traite pas la maladie, mais ses conséquences et les comportements face à cette épidémie. Les personnages du film sont comme des rats pendant une expérience dans un laboratoire…» Expérimental, Blindness l’est dans sa mise en scène, mais aussi dans la manière dont les acteurs y ont été préparés : «Nous avons créé un atelier pour les figurants avec de vrais aveugles… Ça a tellement bien marché que toute l’équipe a suivi cet atelier, puis les acteurs principaux. Les dix premières minutes, on se déplace comme des zombies, les bras en avant, ensuite les mouvements deviennent plus naturels. Ces exercices ont aussi influencé la mise en scène». Comme s’il voulait encore se justifier auprès des journalistes, il ajoute : «Ça paraît froid pour certains spectateurs, mais je ne sais pas pourquoi !»

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