Walkyrie

Cinéma / S’il peine à dessiner les contours précis de cette tentative de coup d’état contre le IIIe Reich, Bryan Singer offre néanmoins un thriller efficace, où la tension cinématographique monte crescendo. François Cau

1943, Tunisie. En plein cœur de la machine de guerre nazie, le colonel Stauffenberg cache à grand peine sa défiance du régime. Laissé dans un piteux état par une attaque alliée, il est approché pendant sa convalescence par un groupuscule d’officiers du Reich, conscients du danger que représente Hitler… Dans la première séquence du film, Singer se plie à un classique d’une mise en scène qui passe en force : faire avaler aux spectateurs que ses personnages s’expriment autrement que dans leur langue naturelle. L’enrobant d’un cadre classique et d’une photo crépusculaire, le réalisateur nous fait entendre la voix-off d’un Tom Cruise s’exprimant d’abord en allemand, puis, à la faveur d’un discret changement de plan, en anglais. Problème : le stratagème n’est pas aussi évident qu’il le voudrait, principalement à cause de l’acteur sur lequel il se repose – Tom Cruise joue volontairement en retrait, comme pour rendre encore plus tangible l’état de doute permanent dans lequel s’enferme Stauffenberg. Malheureusement, à cause de ce parti pris, l’acteur ne donne jamais réellement chair à son personnage, et par incidence à toute la dramaturgie qu’il est censé véhiculer. Ce qui s’avère plutôt gênant dans un film replié sur son héros… Homme d’action
La longue mise en place du complot s’aligne sur cette distance, répercutée par une mise en scène plus effacée qu’à l’accoutumée chez Singer (qui avait pourtant déjà évoqué la Seconde Guerre Mondiale avec autrement plus de panache dans Un élève doué ou même dans le prologue du premier X-Men). Certaines séquences souffrent clairement de cette retenue, en dépit de leur puissance d’évocation. Mais dès que l’opération Walkyrie démarre, c’est un autre film qui se dessine peu à peu, où quelques éléments narratifs jusqu’ici esquissés (l’opposition entre politiciens et militaires, le spectre d’une paranoïa étouffante, les enjeux humains du complot) prennent toute leur ampleur. Témoins de cette transformation, la mise en scène se fait plus alerte et le rythme plus effréné. Le réalisateur réussit dès lors un tour de force assez impressionnant : offrir au spectateur une montée dramatique d’une efficacité redoutable. Sa mise en scène, incroyablement immersive, nous prouve que Singer est un homme d’action : plus la frénésie s’accentue, plus il fait preuve d’inventivité et de réflexion pertinente sur le sujet qu’il aborde. Mais de fait, il nous dévoile par la même occasion le chef-d’œuvre qu’aurait pu être Walkyrie…Walkyrie
De Bryan Singer (ÉU, 1h50)
avec Tom Cruise, Kenneth Branagh…

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