«L'aspect sulfureux des musiques électroniques n'existe plus».

Entretien / Jean-Pierre Bouchard, chargé de mission "musique actuelles" à la Ville de Lyon et coordinateur de la Fête de la musique. Propos recueillis par Dorotée Aznar

Petit bulletin : Pourquoi la Fête de la musique a-t-elle lieu le 20 juin à Lyon ?
Jean-Pierre Bouchard : Cette année, la Fête de la musique se présentait d’une façon un peu particulière car le 21 juin tombe un dimanche… Nous avons donc décidé de commencer la Fête de la musique le samedi, à minuit, afin de ne pas trop déranger les Lyonnais.Vous recevez beaucoup de plaintes pour les nuisances sonores ou constatez-vous une certaine tolérance ?
C’est difficile de ne pas être tolérant le jour de la Fête de la musique, mais nous essayons d’être vigilants et de ne pas programmer 24 heures d’éléctro sur la place des Terreaux par exemple. On essaie de contenir la fête au maximum.Vous communiquez sur votre volonté d’être une fête «propre». Comment fait-on une Fête de la musique propre ?
C’est une démarche globale, on tente de valoriser la propreté, le développement durable et la sécurité. Nous interdisons les contenants en verre, nous installons des toilettes sèches, un parking à vélo sur la petite prairie de Gerland, nous mettons en place des silos de récupérations… Mais c’est une démarche lucide ; on ne va pas installer des bacs à tri alors même que l’on sait que cela ne sert à rien ce jour-là… Nous voulons à tout prix éviter la prise de risques ; il est illusoire de miser sur le fait que les gens ne boivent pas, nous préférons mettre en place un espace de repos, des systèmes de brumisation… Il faut être pragmatiques.Concernant la programmation, y a-t-il un véritable renouvellement des équipes ?
Il y a au moins 30% de rotation chaque année. Si les associations commencent à penser que chacun a une place bien définie et immuable, on tue la dynamique. Il faut que des petites équipes puissent entrer sur des petits projets. La Fête de la musique peut avoir un rôle formateur pour les petites structures.Combien de réponses avez-vous reçues à votre appel à projets ?
75 au total. 70 ont été retenues. Nous n’avons pas gardé les projets trop coûteux ou orientés vers la vidéo. Nous privilégions la musique live. Cette année, entre 80 et 100 groupes amateurs vont participer aux balades en musique. En les programmant un dimanche dans des parcs, nous leur offrons l’assurance d’avoir du public. Ces balades nous permettent de répondre positivement au plus grand nombre.Vous fonctionnez généralement sans tête d’affiche. Pourquoi Keziah Jones est-il programmé cette année ?
Cela fait effectivement sept ans que l’on se passe de têtes d’affiche. En fait Keziah Jones est présent pour le lancement de Tout l’monde dehors, le soir de la Fête de la musique.On voit cette année une volonté nette de déplacer la Fête loin de la Presqu’île et des quais du Rhône…
Oui, nous souhaitons déplacer le centre ville à Gerland. Il y aura la prairie, le boulevard électro. Pour faire 24 heures d’électro, il nous fallait un lieu adéquat et la mairie du septième arrondissement était ravie de nous accueillir.Des élus sont ravis d’accueillir 24 heures d’électro dans leur arrondissement ?
Oui, parce que nous avons prouvé que nous savions gérer la liberté. Quand on a commencé, en 2002, le boulevard électro finissait à 2 heures du matin. Aujourd’hui, faire une scène de midi à minuit, cela ne choque plus personne. C’est presque un peu étrange de ne plus avoir à se battre avec les services... L’aspect sulfureux des musiques électroniques n’existe plus. Si ma mission était de rendre tout cela normal, on peut dire qu’elle est réussie ! Quel est le budget de la Fête de la musique cette année ?
En tout, avec le matériel, le suivi logistique, la communication… On atteint environ 120 000 euros de budget.Comment répartissez-vous cette somme ?
Je donne de l’argent à chacun en dessous de l’équilibre financier. Aux participants ensuite d’organiser leur buvette, de récolter des fonds. Tous nos efforts se portent sur les associations et les groupes en émergence. Notre principe est de n’accompagner que des projets qui vont réussir.À qui pensez-vous vous adresser avec cette Fête de la musique ?
Je souhaite que le grand public croise un public de passionnés. Avec l’idée de déambulation, j’espère créer des inventures individuelles ; que l’on vienne à la F^te de la musique pour rencontrer des potes et des musiciens. La musique est la pratique qui concerne le plus grand nombre de Français. Il faut que le grand public voie qu’il y a des centaines de groupes dans cette ville.On raconte que vous ne souhaitez plus organiser la Fête de la musique… Pourquoi ?
C’est la Fête de la musique, ce n’est pas la fête de Bouchard ! Un turn over est nécessaire, mais pour l’instant le maire est réticent à cette idée. Aujourd’hui, je pense qu’il est assez facile de me remplacer, c’est une manifestation qui fonctionne bien. Et si je n’organise plus la Fête de la musique, je pourrais reprendre les projets de fond qui n’avancent pas et sur lesquels la ville doit agir.

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