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Quand on arrive en livre !

Fin de partie

Nécro / Décédé à l’âge de 61 ans, l’écrivain Pascal Garnier disparaît au moment où son œuvre, trop longtemps étiquetée «roman noir», s’affirmait comme l’une des plus singulières de la littérature française contemporaine. Yann Nicol

Le Grand Loin, paru chez Zulma en début d’année sera donc le dernier roman de Pascal Garnier, qui nous a quittés le 5 mars dernier. On ne trouvera désormais son humour grinçant, son sens du décalage, son exigence radicale et son amour de la provocation que dans ses livres, nombreux, qu’il publiait avec régularité depuis la parution, en 1986, d’un recueil de nouvelles, L’Année sabbatique, chez POL. Dès le mois de mai, son éditeur proposera une réédition de trois de ses textes courts (Les Insulaires et autres romans noirs), histoire que le sevrage ne soit pas trop brutal. Car le monsieur va nous manquer, tant son travail était inclassable et intègre, et tant le personnage détonnait dans l’univers parfois compassé d’une République des Lettres dont il semblait se méfier comme de la peste. Car ce qui l’animait, c’était ce qu’on a désormais coutume d’appeler les vrais gens : ses héros, parfois en révolte, souvent en marge, semblaient refléter son propre rapport au monde, qu’il résumait ainsi : «Je m'aperçois qu'on m'a vendu le monde sans mode d'emploi et qu'on a abusé de mon innocence par le biais d'une publicité mensongère». C’est dans l’écriture (et la peinture) que cet autodidacte, qui a également publié de nombreux textes pour la jeunesse, avait trouvé sa place. Une place de choix.Ombres et lumière
Ces dernières années, Pascal Garnier avait publié de nombreux romans où l’on retrouvait son univers si particulier, mélange de noirceur profonde et de dérision, de brutalité et de tendresse, de désespoir et de beauté. Ses héros, toujours en quête d’un endroit où vivre, avaient la solitude chevillée au corps. On se souvient notamment de Gabriel, le personnage principal de La Théorie du Panda, qui consolait les âmes chagrines grâce à ses dons de cuisinier. Comme tous ses héros, il était marqué par une profonde ambiguïté, qui le rendait à la fois attachant et effrayant. Le noir allait si bien à Pascal Garnier que l’étiquette "polar" lui a collé à la peau, tant et si bien que l’on oubliait trop souvent la qualité de son style, l’inventivité de sa langue et la puissance tout en retenue de son écriture à la fois pudique et flamboyante. Si ce n’est pas encore fait, lisez Pascal Garnier. Un dernier mot pour vous confier une anecdote personnelle. Lors de la dernière interview qu’il m’avait accordée, Pascal Garnier m’avait lancé, avec le sens de la formule qui le caractérisait, une expression qui pourrait être le symbole de sa personnalité et de son œuvre. «La vie est un spectacle magnifique. Mais qu’est-ce qu’on est mal assis !». Souhaitons lui d’avoir trouvé un siège plus confortable…

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