The Green Hornet

Faute d’orientation claire et de script solide, The Green Hornet, comédie d’action pourtant prometteuse, ne transcende jamais son statut d’Iron Man du pauvre. Le premier gros gâchis de talents de 2011. François Cau

L’alliance entre la réalisation inventive de Michel Gondry et l’écriture acérée de Seth Rogen et Evan Goldberg, binôme formé à l’école Judd Apatow, avait tout pour nous réjouir. Mais c’était oublier un peu vite le spectre du terrible producteur Neal H. Moritz – responsable de trucs pas possibles comme les Fast & Furious, les xXx ou Furtif, et dont l’influence se manifeste ici via un rythme claudiquant, une narration à la fois effrénée dans son déroulé et amorphe dans son exécution, visant l’efficacité à tout crin en dépit du bon sens et des personnalités artistiques en présence. Dans l’une des meilleures scènes du film, le bad guy en chef Chudnofsky (Christoph Waltz, à des lieux de sa performance mythique d’Inglourious Basterds) se trouve confronté à un gros problème de crédibilité face à un jeune gangster arrogant. Les prémices d’un running gag mollasson, au gré duquel le personnage va adopter le patronyme de Bloodnofsky, s’habiller en rouge et se trouver une punchline pour accompagner chacun de ses meurtres. Consciemment ou non, Michel Gondry, Seth Rogen et Evan Goldberg ont résumé dans cette sous-intrigue tous les problèmes du film - un produit hybride qui ne sait jamais sur quel pied danser, un ersatz assez ringard d’Iron Man (la ressemblance entre Britt Reid et Johnny Stark est carrément gênante) qui arrive après la bataille cinématographique de refonte du mythe du super-héros.

En vert et contre rien

Ce problème d’identité gangrène constamment The Green Hornet, et malgré son apparente désinvolture, le film n’a pas les coudées assez franches pour le mettre astucieusement en abyme. D’un côté, les deux scénaristes n’arrivent jamais à faire avaler les monstrueuses erreurs de casting du film (Seth Rogen dans le rôle principal, le choix en sidekick du falot Jay Chou – c’est cruel, mais la consonance française de son nom résume bien son sens de l’interprétation), et concentrent toutes leurs forces amoindries sur l’alchimie (plutôt sympathique il est vrai) entre les personnages, au détriment d’une intrigue dégrossie à la truelle. De l’autre, Michel Gondry n’a jamais été aussi effacé dans sa mise en scène, dont on ne retrouve les grains de folie que lors des scènes d’action, foirées une fois sur deux par le montage pompier habituel des productions de ce salopiot de Moritz. Et pour parachever ce triste état des lieux, à un moment, il faudrait arrêter de prendre les spectateurs pour des jambons en prétendant que “si si, la 3D était prévue dès le départ“…

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