article publi-rédactionnels
Nos petites bulles - Juillet 2011
Par Benjamin Mialot
Publié Vendredi 15 juillet 2011 - 6644 lectures
Photo : Benjamin Mialot
Chaque mois, la sélection BD du Petit Bulletin. Juillet 2011 : où il est question d'une quête de gloire, d'une quête de vérité, d'une quête d'amour, d'une quête de territoire et d'une quête de bonheur. Voici les BD qui ont retenu notre attention le mois dernier.
Bourbon Street – Tome 1 (Bamboo) Scénario : Philippe Charlot Dessin : Alexis Chabert Pas assez accrocs à la petite lucarne pour vous abonner au bouquet La TV d'Orange et pas assez technophiles pour télécharger une série au lendemain de sa diffusion ricaine, vous vous languissez de Treme, la dernière série en date de David Simon ? Voici de quoi tempérer votre impatience. Non pas que Bourbon Street rivalise avec la verve sociologique et le storytelling romanesque du créateur de l'indépassable show policier The Wire. Non, c'est dans la méticulosité avec laquelle il met en case ce mélange de joie de vivre, de douleur, de distinction et de misère caractéristique de la Nouvelle-Orléans et du jazz que le diptyque de Philippe Charlot et Alexis Chabert laisse sur les fesses. À tel point qu'on se fiche pas mal qu'Alvin, guitariste à la retraite, parvienne à retrouver Cornélius, prodige de la trompette disparu cinquante ans plus tôt : le voyage est trop exaltant pour qu'on se focalise sur sa destination. Nirvana – Tome 1 (Soleil) Scénario : Jean-Luc Istin Dessin : Arnaud Boudoiron Jean-Luc Istin est, à l'instar de Morvan ou Corbeyran, de ces scénaristes pour lesquels on éprouve autant d'affection que de méfiance. La faute à leur hyperactivité, responsable de pas mal de projets fadasses. Fadasse, Nirvana ne l'est pas, bien que n'y apparaisse l'avaleur de fusils le plus célèbre de Seattle. Le Nirvana en question est en fait le nom d'une drogue aiguisant la perception par voie de dispersion moléculaire. Or dispersion rime avec disparition. En l'occurrence celle de la bombastic Mya, survenue au terme d'un trip extrasensoriel et que son fonctionnaire de mari va tenter d'élucider en signant chez les Stups. On n'en dira pas plus pour préserver l'inventivité de ce premier volume à la croisée du polar, de la science-fiction et du super-héroïsme. Sachez juste qu'il se dégage de ces illustrations d'une majesté nord-américaine comme de la vélocité de son action, l'enthousiasme communicatif qui fait les bons blockbusters. Abélard – Tome 1 (Dargaud) Scénario : Régis Hautière Dessinateur : Renaud Dillies À quoi reconnait-on un chef d'œuvre du neuvième art en devenir ? À l'envie qui vous prend, une fois les présentations effectuées, d'en acquérir tous les exemplaires en circulation en vue d'être le seul à en connaître les vertus. Avec cette histoire de poussin enjoint par son chapeau-distributeur de leçons de vie à décrocher la Lune, seul cadeau à même de lui attirer les faveurs de la belle Épilie, Régis Hautière et Renaud Dillies ont fait plus fort. Il nous a en effet suffit d'un coup d'œil sur la couverture du premier tome d'Abélard, sur ses couleurs doucement automnales et ses traits à la précision de gravure à l'eau-forte pour être pris de ce sentiment exclusif. On exagère à peine : en matière d'anthropomorphisme animalier, on n'a rien lu d'aussi enchanteur et digne de figurer dans la sélection du festival d'Angoulême que ce conte philosophique depuis De capes et de crocs et Georges Frog. Svoboda! - Tome 1 (Futuropolis) Scénario : Kris Dessin : Jean-Denis Pendanx On a beau connaître le goût prononcé de Kris pour les mouvements sociaux (Un homme est mort) et les drames historiques (Notre mère la guerre) et sa capacité à en extraire la substantifique moelle narrative, à chaque fois on se fait avoir comme des bleus : on attend le projet de trop, celui qui le verra verser dans le bolchevisme bas du front et le pédantisme historique, et paf, c'est d'un bijou d'humanisme et de didactisme qu'il accouche. Des compliments que méritent amplement Svoboda!, ambitieuse plongée, sous la forme d'un carnet de guerre imaginaire, dans les tourments du XXe siècle naissant sur les traces d'une légion tchèque condamnée à l'exil en attendant que des décombres de l'Empire austro-hongrois surgisse la Tchécoslovaquie. De la documentation, du souffle et de l'humour, rien ne manque, pas même la mise en images lyrique et vintage, courtoisie du talentueux Jean-Denis Pendanx. L'oublié du mois Beauté – Tome 1 (Dupuis) Scénario : Hubert Dessin : Kerascoët (Marie Pommepuy et Sébastien Cosset) Ça devait arriver. À mesure que nous approchions des hautes sphères de la critique d'art séquentiel, synonymes de piles de bande dessinées babéliennes et de choix cornéliens, il était évident qu'un jour ou l'autre nous oublierions de vous relayer un coup de cœur. Il a fallu que ça tombe sur Beauté, la nouvelle série des auteurs du piquant et attendrissant Miss Pas Touche, pourtant parée de tout le nécessaire à l'accession au sommet d'une sélection telle que la nôtre. À commencer par son fond, le titre contant le cruel destin de Morue, laideron méprisé qu'une pas-si-bonne fée va faire passer pour la plus belle femme jamais enfantée, au point d'allumer chez ses courtisans d'irrépressibles pulsions sexuelles et chez ses rivales de toutes aussi irrépressibles envies d'immolation. La forme, elle, est à la hauteur de ce qu'on attend des Kerascoët, couple à la ville comme à l'atelier : racée, moderne et intergénérationnelle. Et aussi... Le Chant de la machine (Manolosanctis) : Réédition augmentée (notamment d'une préface de Daft Punk et d'une dizaine de playlists) de l'ouvrage de référence de David Blot et feu Mathias Cousin sur la culture électronique. De témoignages réels en anecdotes plausibles, Le Chant de la Machine foudroie par son érudition et son élégance fanzinesque. Konungar – Tome 1 (Glénat) : Premier volet d'une trilogie nordique qu'on prédit magistrale. On le concède, on ne prend pas un gros risque au vu du sujet (une querelle d'héritiers sur fond d'invasion de centaures) et de son traitement visuel, d'une splendeur à ressusciter Stendhal pour lui refaire goûter le syndrome portant son nom. Cartigan – Livre premier (Akiléos) : Saturé, le marché de la traduction de productions anglo-saxonnes de qualité ? Akiléos dément avec ce récit qui, sous ses airs d'énième repompe de La Planète des singes et Kamandi (un monde dominé par des boucs humanoïdes, un esclave humain en fuite), déploie une fantaisie et une rugosité évocatrices de la grande époque de Metal Hurlant. Tonoharu (Le Lézard Noir) : Saturé, le marché de la traduction de productions anglo-saxonnes de qualité ? Le Lézard Noir dément aussi avec ce roman graphique qui, sous ses airs d'énième autobio en terre inconnue (le Japon provincial et ses verrous sociaux), cerne la solitude et l'incommunicabilité avec une retenue évocatrice du Lost in Translation de Sofia Coppola. L'Intrus à l'Étrange (La Boîte à Bulles) : Un jeune homme hérite d'une valise close et d'une boîte truffée de lettres d'amour et se met en tête de les remettre à leurs propriétaires. De ce pitch convenu comme un film de Jean-Pierre Jeunet, Simon Hureau tire un captivant thriller campagnard, où secrets et superstitions s'entrechoquent dans un noir et blanc d'une belle humidité.
pour aller plus loin
vous serez sans doute intéressé par...
Mercredi 14 février 2024 "Heureux soient les fêlés" assure François Mallet, humoriste « bipolaire, gay et patineur artistique ». Un cocktail détonnant pour un spectacle surprenant, inattendu et, surtout, hilarant. À découvrir à l'Espace Gerson de Lyon.
Mardi 6 février 2024 Vous est-il déjà arrivé, quand vous lisiez un poème, de vouloir savoir quand, pourquoi, comment il avait été écrit ? Quelle était l’histoire qui se nichait derrière les figures de style ? Hollie McNish, avec Je souhaite seulement que tu fasses...
Mardi 6 février 2024 À deux pas de Bellecour et de la Saône, sur une placette, cet élégant café sert au déjeuner une cuisine de bistrot ; sans chichis.
Mercredi 24 janvier 2024 Une poésie des entrailles aussi politique qu’elle est protéiforme : avec son recueil Frénésies, Stéphanie Vovor explose les frontières du genre. À lire aux éditions du Castor Astral ou à écouter le 1ᵉʳ février à la librairie La Virevolte.
Mardi 23 janvier 2024 De tous les festivals de courts ayant lieu dans la métropole, Un poing c’est court à Vaulx-en-Velin a toujours eu un statut à part : c’est un festival engagé, (...)
Mardi 31 octobre 2023 Le festival Lumière vient de refermer ses lourds rideaux, les vacances de la Toussaint lui ont succédé… Mais ce n’est pas pour autant que les équipes de (...)
Mardi 31 octobre 2023 Si le tourisme en pays caladois tend à augmenter à l’approche du troisième jeudi de novembre, il ne faudrait pas réduire le secteur à sa culture du pampre : depuis bientôt trois décennies, Villefranche célèbre aussi en beauté le cinéma francophone....
Jeudi 19 octobre 2023 Hugo Frison succèdera à Gérard Lecointe à la direction du théâtre de la Renaissance en janvier 2024.
Mardi 17 octobre 2023 Nicolas Piccato a quitté à la rentrée ses fonctions de directeur de Lyon BD, à sa demande. Arrivé en 2021 en remplacement du fondateur Mathieu Diez, parti au (...)
Mardi 19 septembre 2023 Ou l’inverse. Dans un ex-vieux rade des pentes.
Mardi 19 septembre 2023 La saison à peine entamée – et entamée en pleine bourre le concernant – le Ninkasi ferme ses portes dès le 5 novembre, après une grosse fête de clôture. Suivront 20 mois de travaux pour un Ninkasi Gerland new look et une nouvelle salle à La Saulaie...
Mercredi 13 septembre 2023 Pour sa 5e édition, le festival de street-art Peinture fraîche quitte la halle Debourg pour investir sa voisine aux anciennes usines Fagor-Brandt. Du 11 octobre au 5 novembre, 75 artistes s'exposent sur 15 000m2.
Mardi 5 septembre 2023 C’est littéralement un boulevard qui s’offre au cinéma hexagonal en cette rentrée. Stimulé par un été idyllique dans les salles, renforcé par les très bons débuts de la Palme d’Or Anatomie d’une chute et sans doute favorisé par la grève affectant...
Mardi 5 septembre 2023 Les bonnes nouvelles de cette fin d’été sont dans le 7e arrondissement et tournées vers le sud : d’abord un coffee-shop et, pas loin, un néo-bistrot.
Mardi 29 août 2023 Et voilà quatre films qui sortent cette semaine parmi une quinzaine : N° 10, La Beauté du geste, Alam puis Banel & Adama.
Suivez le guide !
Jeudi 17 août 2023 [mise à jour mercredi 23 août 2023] Déjà interdit à Paris, Montpellier et Toulouse ces derniers jours, le spectacle de Dieudonné a été interdit à Lyon, amis s'est tenu dans un champs privé à Décines, et est interdit à Grenoble une semaine plus tard....
Lundi 12 juin 2023 Le musée à l’architecture déconstructiviste accueille, jusqu’au 18 février, "Afrique, mille vies d’objets". Ces 230 objets africains, principalement datés du XXe siècle, collectés par le couple d’amateurs et marchands d’arts Ewa et Yves Develon,...
Lundi 12 juin 2023 Parmi les jeunes maîtres du cinéma nippon, Kôji Fukada est en train de se tailler une place de plus en plus importante. Présenté à la dernière Mostra, Love Life est un film sur les liens invisible, l’incommunicabilité, la famille et la résilience....
Mercredi 19 avril 2023 Invité aux Rencontres du Sud pour présenter sa nouvelle comédie avec Charlotte Gainsbourg, "La Vie pour de vrai", Dany Boon évoque les lointaines inspirations qui l’ont aidé à modeler son personnage de candide. Comme son rapport inattendu à Agnès...
Mardi 28 mars 2023 Un nom douillet, une verve grivoise, crue, parfois joliment obscène : Doully — celle qui surnomme son public « ses p’tits culs » — passe deux fois en région ce mois-ci, nous voici ravis.
Mardi 28 mars 2023 Nouvelle expérience chorégraphique singulière avec l’enfant rebelle de la danse, Boris Charmatz, qui nous entraîne dans les plis de sa somnolence et de son inconscient.
Mardi 28 mars 2023 Très en vue depuis quelques années, accueillis déjà aux Subs, Alexander Vantournhout (né en 1989 en Belgique) a été formé à la fois en école de cirque et à l’école de (...)
Mercredi 18 janvier 2023 Parce que le comedy club ne semble pas se définir pas par ce qu’il est, mais plutôt par ce que l’on y fait, à Lyon, un bar tranquille du 6e peut se (...)
Mercredi 30 novembre 2022 Deux lieux atypiques accueillent des projections en ce début décembre. D’abord, la Maison de l’Écologie dans le 7e arrondissement ce jeudi 1er à 20h à (...)
Mercredi 30 novembre 2022 Le Festival du Film Court du Zola ayant servi de warm-up, on ne lâche pas l’affaire et l’on continue avec entrain avec la deuxième édition de Mutoscope, (...)
Jeudi 1 décembre 2022 Le titre un brin lapidaire de la livraison mensuelle du cycle Ciné Collection concocté par les salles du GRAC (“Femmes à la caméra“) ne doit pas susciter (...)
Mercredi 30 novembre 2022 L’un aurait fêté son centenaire, l’autre ses 130 printemps en 2022. Mais tous deux sont d’une étonnante contemporanéité et — curieusement — complémentaires. Ernst Lubitsch et Francesco Rosi finissent l’année à l’Institut Lumière.
Mardi 29 novembre 2022 A priori similaire à l’édition dernière (trente propositions), très essentiellement sur une zone de Presqu’île qui s’élargit peu à peu, la Fête des Lumières, du 8 au 11 décembre, fait néanmoins place à des artistes européens majeurs, jamais venus...
Lundi 10 octobre 2022 Le spectacle vivant est un des rares moment où l’on ne fait qu’une chose à la fois. Pour le public, du moins... Car Les Rois Vagabonds, eux, jonglent entre les disciplines durant plus d'une heure. Leur "Concerto pour deux clowns" est joué au Grand...
Jeudi 6 octobre 2022 Huit ans après "La French", le réalisateur et le comédien se retrouvent pour un film à nouveau tiré d’un fait historique mais beaucoup plus contemporain : les attentats de 2015. Rencontre autour de la conception d’un film sur une tragédie française.