Voilà du théâtre qui crisse, qui ne prend pas le spectateur par la main avec un gant de velours. D'ailleurs Denis Lavant est de la partie et il n'a pas pour habitude de jouer des bluettes. Habitué des planches théâtrales et re-re-re-re-révélé au cinéma avec le puissant et hors-normes dernier film de Leos Carax, Holy Motors, le comédien offre une composition parfaite des textes peu montés d'Heiner Müller : Paysage sous surveillance, Libération de Prométhée et Nocturne.
Dans ces trois séquences distinctes, il opère un travail sur son corps et sa voix proprement unique, se fondant tel un animal dans la musique électronique de Kasper T. Toeplitz, devenant tour à tour élastique ou rugueux. Une matière au sens propre que le metteur en scène Wilfried Wendling malaxe. Toutefois ce n'est pas un solo de l'acteur en singe savant de la scène auquel on assiste mais bien à un spectacle sensoriel qui intègre, au-delà du jeu et de la musique, des bruits d'ambiance et la danse aérienne de Cécile Mont-Reynaud, qui se déplace dans une forêt de cordes par une nuit de pleine lune. Müller Machines est à voir et ressentir au Théâtre de la Renaissance les 28 et 29 novembre.
Nadja Pobel