Des liens pour délier

Saâdane Afif

Institut d'Art Contemporain

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Sur le mode de la ramification et de la réinterprétation, les œuvres nomades de Saâdane Afif voyagent d’une forme à l’autre, d’une installation à une chanson, d’un artiste à d’autres. Une démarche intéressante mais peu à sa place dans le cadre d’un musée. Jean-Emmanuel Denave

En 2004, à partir d’une installation de Saâdane Afif (un caisson de guitare renfermant un réveil relié à un amplificateur), Lili Reynaud-Dewar compose Blue Time, chanson narrant les déconvenues d’un crooner qui, gardant foi en son talent, ne parvient pas pour autant à percer. Cette chanson deviendra elle-même la matrice de différentes interprétations, concerts, performances… Ainsi travaille Saâdane Afif, artiste aussi conceptuel que paradoxalement mélancolique, cheminant entre installations plastiques et musique, essaimant et métamorphosant ses projets à travers différentes commandes ou transmissions à d’autres artistes. «Mon travail se ramifie d’une exposition à une autre. A l’IAC, tout est parti en 2004 d’une œuvre assez anodine à partir de laquelle j’ai tissé beaucoup de liens. On retrouvera sur des affiches beaucoup des différentes personnes qui ont collaboré avec moi. Elles font partie intégrante de mon œuvre». On l’aura compris, chez Afif tout est processus, devenir, passage. Contre la figure d’Apollon (le bel objet), l’artiste joue la figure d’Hermès, dieu des passages et de l'entre-deux. Passage de la sculpture ou de l’objet à l’onde musicale, passage d’un artiste à l’autre, passage d’une signification à une autre.

Lignes de fuite

Cette démarche paraît particulièrement pertinente à une époque où la consommation d’objets se joue sur le (la) mode du remake, du "retour à", du recyclage. Les œuvres de Afif & co. en prennent le contrepied avec une conception plus libre, ouverte, du partage, de la circulation, de la ligne de fuite. «Dans une société du spectacle et de la communication qui voue l’art à cette mort qu’est la réification, les chansons et remakes de Saâdane Afif, en évitant que l’œuvre ne se laisse enfermer dans un seul objet, une seule forme, sous un seul concept, entendent peut-être se donner la chance de rester en vie» écrit le critique Michel Gauthier. Le revers de la médaille de cette belle idée de liberté en mouvement est que, concrètement, on ne verra pas grand chose dans les salles de l’IAC, où il est exposé depuis le début du mois de mars : quelques œuvres plastiques ultra-minimalistes, un peu de musique, des textes, des affiches… Au point qu'on se demande si le musée est un endroit idoine pour Afif. On retiendra, a minima, une étrange atmosphère de suspens, de vide et d’attente.

"Blue time, blue time, blue time…", Saâdane Afif
jusqu’au 28 avril à l’Institut d’Art Contemporain, Villeurbanne

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