Avec Empty Picture, Alexandre Roccoli propose aux spectateurs du Toboggan une descente dans une mine avec des lumières, une bande-son et des mouvements battant la cadence lourde et hypnotique de concasseurs à percussion. «Dans cette pièce, précise le chorégraphe, je me suis demandé comment un corps de mineur arrive dans une mine à seize ans et comment il finit à quarante-six ans... Comment ses capacités de résistance se mettent en place et comment ses gestes ont été conditionnés par certains outils.» Cette plongée dans les entrailles de la terre est aussi une plongée dans le passé, dans la mémoire des corps ouvriers et de leur solidarité.
Elle est interprétée sur scène par deux danseurs de krump, danse de rage et de colère née dans les années 1990 dans les quartiers déshérités et traversés d'émeutes de Los Angeles (et immortalisée par le photographe David Lachapelle dans Rize). L'écriture d'Alexandre Roccoli, toujours très inspirée depuis ses débuts par la transe et ses expériences du clubbing à Berlin, évoque par bribes des récits de vie de mineurs collectés lors d'entretiens. Comme beaucoup des pièces du chorégraphe (formé auprès de Mathilde Monnier puis du Théâtre du Soleil d'Ariane Mnouchkine), Empty Picture a été présentée aux Subsistances en 2013 et se pose comme une sorte de trip ayant une grande confiance dans les possibilités du corps à s'exprimer dans son propre langage, à communiquer affects indicibles et histoires anciennes à d'autres corps.
Jean-Emmanuel Denave
Empty Picture
Au Toboggan jeudi 5 février