«Être à la marge de l'institution» - Interview du collectif Grrrnd Zero

Dope Body + Dieb13 + Shocking pinks

Grrrnd Zero Vaulx

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Forcé de déménager à Vaulx-en-Velin suite à son expulsion des usines Brossette, le collectif Grrrnd Zero s'apprête, suite à quelques concerts en extérieur, à reprendre le chemin du nomadisme. L'occasion de faire le point sur l'avancée de son installation, débutée il y a un peu plus d'un an dans une papeterie à l'abandon.

Avec le recul, compte tenu de l'état de vétusté de votre nouveau domicile et de son éloignement du centre-ville, avez-vous l'impression d'avoir reçu un cadeau empoisonné ?
Grrrnd Zero :
La localisation n'est pas si problématique. Par contre, l'ampleur du chantier, effectivement... On a encore beaucoup de taf à abattre. On savait que ça allait prendre du temps, mais il y a quelque chose d'intéressant dans cet effort. On repart avec une énergie nouvelle.

Avec du recul, on regrette surtout l'enfumage de départ. On nous a forcé à partir très vite d'un endroit qui aurait pu être utilisé plus longtemps et nous permettre de préparer les travaux sereinement. C'était tellement urgent que le bâtiment est encore debout trois ans après. Le déménagement en lui-même n'est pas compliqué, c'est vraiment le contexte dans lequel il s'est produit : dans le speed, avec beaucoup de retards administratifs et des moyens insuffisants. Ce n'est pas rien, 300 000 balles de subventions. Mais d'après nos estimations, on est sur un projet à un million minimum. Même avec des architectes arrangeants et beaucoup de bénévoles, on est obligés de recourir à la débrouille.

Vous êtes confiants dans l'endurance de ces bénévoles et leur renouvellement ?
Le renouvellement fonctionne bien. Il y a une centaine de personnes qui sont passées sur le chantier. Par contre, très peu sont régulières. Le chantier repose sur les épaules de quelques héros qui donnent leur vie, gratuitement. Si, demain, ils décidaient d'arrêter, ce serait une heure assez sombre. Grrrnd Zero, c'est une mécanique humaine alimentée par la motivation des individus. En onze ans, il n'y a jamais eu d'arrêt total. On est hyper chanceux. Les forces de l'amour sont infinies, man (rires).

On a tout de même prévu le coup, en ouvrant au fur et à mesure, en restant actifs hors les murs, en obtenant cette autorisation de concerts en extérieur... Si on n'avait rien montré pendant deux-trois ans, là ça aurait été la panique.

On n'est pas là pour faire des partenariats, des échanges, animer des événements municipaux... Après, on aimerait bien que Gérard vienne manger des Mars glacés sur le chantier, avec son petit casque (rires)

À terme, à quoi va ressembler votre QG ?
Il y a aura, on l'espère, la même dynamique qu'à Gerland : des studios de répétition, une salle de concerts et des locaux autres, des bureaux associatifs, des espaces de création artistique... La différence avec Gerland, c'est qu'on a aussi un grand terrain, qui devrait nous permettre de faire plus de choses en extérieur. C'est une véritable propriété, qui va se peupler dans les semaines à venir. Il y a déjà des gens qui font un jardin, un atelier de sérigraphie va bientôt attaquer, un autre de couture... On a par contre fait exprès de garder des espaces libres, pour accueillir des gens qu'on ne connaît pas encore.

Votre aventure a toujours été marquée par des relations houleuses avec les autorités, du procès qui a sanctionné vos débuts à vos récents démêlés avec les différents échelons de la Métropole. Est-ce derrière vous désormais ?
Ce serait mentir de dire qu'il n'y a pas eu de soutiens. Il y a des gens qui se sont montrés très sympathiques dès le début. Mais en général, ça a été conflictuel oui. On a débarqué en mode coup de force, et ce n'est pas comme ça que les puissants aiment soutenir des initiatives. L'année dernière, on a dû remettre en scène notre propos, mener une campagne un peu incendiaire en collant des affiches avec le portrait de Gérard Collomb pour obtenir la signature de la convention d'occupation. Depuis, on a peu de contacts avec la mairie centrale, on avance.

C'est plus le Grand Lyon qu'on a du mal à passionner. Dès qu'on a un problème, que ce soit une histoire de gestion de poubelles ou un portail qui ne marche pas, il y a une énorme inertie... Ça a mis dix ans pour s'assainir avec la Ville ; avec le Grand Lyon, propriétaire des lieux, on repart à zéro. Quand tu es une petite structure face à une grosse machine, ça passe toujours par de la patience et de la gueulante. Des deux côtés.

Grrrnd Zero, c'est une mécanique humaine alimentée par la motivation des individus. En onze ans, il n'y a jamais eu d'arrêt total. On est hyper chanceux. Les forces de l'amour sont infinies, man (rires)

Il y a quand même une contradiction dans le fait de revendiquer un esprit do it yourself et de recourir à des financements publics...
Ça a été notre positionnement dès le début : être à la marge de l'institution. N'être ni un SMAC ni un squat. Garder notre indépendance artistique tout en négociant avec les pouvoirs publics. Il n'y a pas eu de glissement. On a délimité un cadre très précis. On n'est pas là pour faire des partenariats, des échanges, animer des événements municipaux... Après, on aimerait bien que Gérard vienne manger des Mars glacés sur le chantier, avec son petit casque (rires).

Pour revenir à cette notion de DIY, en partant du principe qu'elle consiste à chercher toutes les solutions possibles pour mener à bien un projet indépendant sur le plan artistique, la négociation avec les pouvoirs publics fait partie de la boîte à outils. Mais on ne revient pas sur nos principes de fonctionnement : pas de service d'ordre privé, pas de fouilles, possibilité de rentrer et sortir, d'amener ses consos, d'entrer même si tu n'as pas les moyens payer... On n'infantilise pas les gens. Ce devrait être comme ça partout.

Zéro à l'infini

De par son ouverture aux organisateurs locaux, le programme de Grrrnd Zero est l'un des plus denses (et imprévisibles) de l'agglo. Rien que cette semaine, quatre soirées y sont programmées : une sous pavillon Humanist SK Festival, un beau bordel noise avec le quintette cosmico-zinzin a.P.A.t.T. et le duo rustique Casa Fantom (le 23 septembre), un autre avec les convulsifs Dope Body (le 28) et un punk rock show avec les furies new-yorkaises de La Misma (le 24). Ce seront là, jusqu'à nouvel ordre, les derniers concerts que le collectif donnera à domicile. Une seule adresse pour être informé de la suite : www.grrrndzero.org.

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