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Avril et le monde truqué

Avril et le monde truqué
De Franck Ekinci (Fr, 1h45) animation

Si vous pensez qu’un film d’animation français alliant intelligence de l’écriture, maîtrise du style graphique et virtuosité de réalisation est impossible dans notre espace-temps, préparez-vous à changer de monde…

Voir fleurir avril sur les écrans début novembre tient déjà de la gageure, alors que dire d’un 1941 à Paris dépourvu du contexte de l’Occupation ! Avril et le monde truqué appartient à cette catégorie rare de films d’animation bouleversant les repères, renversant les habitudes, changeant les règles données pour fixes. Alors que la majorité d’entre eux sont construits en privilégiant leur essence graphique (et se trouvent, de fait, prisonniers des codes propres à sa narration), celui-ci, parce qu’il procède à l’inverse, transcende le genre.

À l’instar du Tombeau des Lucioles de Isao Takahata ou du Géant de Fer de Brad Bird, il conjugue les bénéfices d’une histoire astucieuse qui aurait pu être racontée sous la forme d’un long métrage "traditionnel" et d’un traitement animé de luxe. Cette histoire, une uchronie dystopique, est le premier joyau du film : une expérience scientifique ratée (en apparence) a conduit à la mort de Napoléon III à la veille de la déclaration de la guerre contre la Prusse et scellé le sort de la révolution industrielle, bloquant l’humanité à l’âge du charbon. Dans une atmosphère rétro-futuriste et enfumée, la pénurie menace. Et les scientifiques disparaissent un par un, ravis par une force occulte. L’intrépide Avril enquête…

Steampunk Tardi

Renouant avec l’esprit du serial début XXe siècle, transposé dans une ambiance familière de Jules Verne ou de Gustave Le Rouge, le film de Christian Desmares et Franck Ekinci tire profit du goût de Tardi (l’inspirateur de l’univers graphique) pour la sorcellerie scientiste de cette époque, ainsi que de sa complémentarité avec le co-scénariste Benjamin Legrand. Ce dernier, également amateur de mécaniques imposantes (il avait contribué à la renaissance du Transperceneige), possède en outre, semble-t-il, la faculté de travailler aisément avec le bougon créateur d’Adèle Blanc-Sec.

Or la symbiose est nécessaire à toute réussite. Le trait tardien s’inscrit ici naturellement, offrant une continuité logique à l’œuvre du dessinateur, plus (é)mouvante et fidèle que l’adaptation d’Adèle par Besson. Décors grandioses, fluidité remarquable, choix chromatiques impeccables et interprétation vocale admirable des comédiens pour servir une aventure palpitante aux échos très contemporains (la nécessité de canaliser la science pour préserver la planète et le vivant, puisqu’il est impossible d’arrêter le progrès) : Avril et le monde truqué méritait largement le Cristal que lui a décerné le jury du festival d’Annecy. Comme le César qu’il est en droit d’emporter l’an prochain…

Avril et le monde truqué
De Christian Desmares et Franck Ekinci (Fr/Bel/Can, 1h45) animation

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