Grand Cuisine Cinéma Club / Le Grand Cuisine Cinéma Club retend la toile et remet le couvert pour un second festival de mets et de films, dont une avant-première goûtue : à savourer sans modération.
C'était en septembre de l'année dernière : un festival de cinéma (le premier du genre) offrant autant à voir qu'à manger. Pour la première édition du Grand Cuisine Cinéma Club, les spectateurs-dîneurs enchaînaient douze heures de films (documentaires, animation, fiction et courts-métrages) sur la cuisine, et de tapas apparus à l'écran (du houmous pour accompagner Hummus not war, des ramens pour suivre Tampopo...).
Mat Gallet (Nuits sonores, Le Sucre) et sa bande recommencent ce week-end dans une formule moins boulimique, avec un nombre restreint de convives et une sélection filmique plus resserrée. En parallèle, quelques-uns des jeunes chefs lyonnais les plus en vue du moment « cuisineront en live, pendant les séances, dans la salle » pour (en plus de nombreuses surprises) servir un vrai repas, à table.
Le thème de cette seconde édition ? La disruption. Ce terme technique (pour qualifier par exemple un claquage électrique détruisant l'isolation d'un milieu ; ou une livrée de poissons dont les bandes et les taches trompent les prédateurs) est devenu un concept économique à la mode (pour désigner une rupture technologique ou en terme d'image de marque). La disruption en cuisine, ce serait le fait de faire sauter les carcans, de tromper son monde, de secouer un milieu encroûté. « Régulièrement, certaines personnes explosent les codes de la cuisine, bousculent les marchés, réinventent tout. Parfois à partir de rien. C'est à ces personnes-là que nous consacrons cette édition » explique Mat Gallet. Or la rupture et le renouvellement concernent aussi l'univers du film culinaire, actuellement en plein essor. « Il y a dix ans sortaient cinq food films par an (dont quatre mauvais). En 2016 ? Rien que pour préparer le festival, j'en ai vu 300... Le Web et les médias sociaux ont bousculé la donne. »
Parmi les films présentés ce week-end, notons — outre des histoires « d'inventeurs d'eau ou de saveurs téléchargeables sur Internet » — l'avant-première de Noma au Japon, consacré aux pérégrinations nippones de René Redzepi et de son équipe. Pour rappel : le Danois est le chef du Noma, considéré comme l'un des meilleurs restaurants du monde. Son établissement de Copenhague étant en cours de déménagement (il va bientôt s'installer dans une ancienne friche du quartier hippie de Christiania, transformée en ferme urbaine), Redzepi s'est reconverti, à temps partiel, en cuisinier itinérant. Il a notamment officié à Sidney, on l'a vu le mois dernier à Paris, et il s'apprête à s'envoler pour le Mexique, pour tenir (seulement pour quelques semaines) un restaurant en plein air dans la ville côtière de Tulum.
À chaque fois, il évite de servir hors-sol les plats de son Noma (très inspirés par le terroir danois). Aussi prospecte-t-il plusieurs semaines à l'avance pour élaborer un menu (de 14 plats, quand même) en adéquation avec l'endroit où il pose ses casseroles. « Alors que lui et sa team sont au top du top, ils inventent à la fois le restaurant gastronomique éphémère mais aussi une nouvelle méthodologie pour créer en cuisine », explique-t-on au Grand Cuisine. C'est ce processus de recherche et d'élaboration qui a été filmé par Maurice Dekkers alors que l'équipe du Noma s'était installée pendant deux mois au Japon.
Pour sustenter des spectateurs affamés par les images, ce sont les chefs lyonnais de la Bijouterie, de Substrat et des Apothicaires qui ont été choisis par Mat Gallet et ses acolytes : « Je me suis dit qu'il fallait monter la brigade éphémère la plus dingue et la plus brillante qui soit. Ce sont des makers. Ils vont vite. Droit au but. » Une bande de chefs qui secouent au quotidien le gastro-landernau lyonnais et qui devra, ce dimanche, faire sortir la nourriture de l'écran et s'emparer des sens délaissés par le dispositif cinématographique.
Pour proposer un repas, un banquet (ou une orgie — la forme est gardée secrète) créatif, perturbant, éclatant... disruptif ? Relevons sur ce point la promesse des organisateurs : « Au Grand Cuisine, on essaie de créer les conditions pour que les spectateurs puissent échanger, causer des films ou des plats qu'ils ont mangé. Mais aussi boire des verres, échanger avec les chefs ou simplement pécho le 06 du garçon ou de la fille qui était en bout de table. Et pour créer cet échange, il faut des surprises, de l'imprévu. » Qui mangera verra...
Grand Cuisine Cinéma Club
Au Sucre le dimanche 18 décembre
Deux séances à 11h30 et 19h30 ; 45€
Réservation sur Internet indispensable : http://grand-cuisine.fr