Pop / Pour son troisième album, The xx se transforme pour de bon en une radieuse machine à tubes contrastant à plein avec la morosité ambiante régnant en Angleterre : une lumière au bout du Tunnel sous la Manche.
« Heureux soient les fêlés car ils laissent passer la lumière » disait Michel Audiard. C'est peut-être bien à travers les failles invisibles, car hermétiquement colmatées, à l'œuvre depuis le début de leur carrière que The xx a fini par laisser passer la lumière qui inonde son dernier album, I See You. Comme une affirmation en miroir de ce que pourrait également conclure l'auditeur à l'écoute de ce disque, « We see you, the xx». Enfin, serait-on tenté d'ajouter.
Hermétique, on a pu l'être aux précédents disques, sans jamais en retrancher le potentiel tubesque ou addictif, mais gêné aux entournures dans nos enthousiasmes et nos mouvements par une certaine tendance à la neurasthénie, à la récession de soi-même.
Or c'est comme un contre-pied au repliement sur elle-même de la Grande-Bretagne que The xx semble avoir construit son album. Une réponse, aussi, en forme de fin de non recevoir à l'album Coexist, réalisé dans l'isolement et la claustration par un groupe se sentant comme prisonnier de sa formule magique en mode ombres et brouillard.
Chaleur, couleur
Ici, The xx a rompu l'isolement, ouvert ses chakras autant que ses horizons, est parti enregistrer à l'étranger, décomplexé aussi par l'expérience vécu par Jamie xx avec son album solo In Color, rassuré quant à ce que peut constituer le regard de l'autre, y compris au sein du groupe (d'où sans doute aussi ce titre, I See You). Sur sa pochette, The xx s'est fait de la place autour de cet immuable X brandi comme une interdiction de s'afficher ; s'est inondé de couleur aussi.
De fait, les chaloupes r'n'bisantes de l'album (On Hold, pas affranchi pour autant de la basse new wave d'antan) et son côté pop fricotant avec le mainstream (la chaleur des synthés d'un Replica s'avère presque aussi surprenante que le recours à la machinerie et au vocoder tombés sur le FLOTUS des countrymen alternatifs de Lambchop, autre importante sortie de la charnière 2016/2017).
Quoi qu'il en soit, voilà enfin un groupe qui s'assume sous le feu éclairant des projecteurs, y compris quand il s'agit de monter sur la scène, par exemple, d'une Halle Tony Garnier, quand auparavant on craignait tant de se produire en live. Enfin, la lumière est ; un groupe est né à lui-même.
The xx
À la Halle Tony Garnier le mardi 21 février