Théâtre Nouvelle Génération / Stigmatisé et clivant, instrumentalisé, le voile pourrait être un vêtement comme un autre. Myriam Marzouki dédramatise le port de ce bout de tissu dans une pièce délicate avec de multiples de points de vues.
Dans cette France meurtrie par les attentats, l'islam est trop souvent confondu avec le fanatisme et la bêtise assassine. Un symbole de ces regards irréconciliables qui renvoie à notre européanocentrisme ? Le voile. Myriam Marzouki, franco-tunisienne, féministe et athée, comédienne et metteur en scène, interroge le poids de ce bout de tissu au travers de plusieurs personnages et saynètes avec des textes empruntés à Virginie Despentes, à Pasolini, à Saint-Paul et d'autres écrits pour cette pièce.
« Malheur à celui qui est différent »
Créée au précieux festival Théâtre en mai de Dijon l'an dernier, ce travail a fatalement une valeur pédagogique voire didactique, mais heureusement Marzouki ne s'en contente pas. Entre vidéo, son, un plateau relativement nu mais avec plusieurs espaces de jeu, elle crée une scénographie mouvante et fluide, comme une caméra embarquée sur ces femmes et ceux qui les accompagnent.
Que sont ces voiles ? Les turbans des femmes russes des années 60, les foulards dans la chevelure de Grace Kelly ou Audrey Hepburn ? D'où vient que, comme le dit le père d'une adolescente qui choisit de se couvrir la tête, cela soit aujourd'hui synonyme de « couscous, folklore et guerre d'Algérie » ? Le contrôle capitaliste n'est-il pas plus étouffant, « constant et massif » que le contrôle patriarcal ou celui d'un Dieu ? La vraie religion, celle du commerce, est ici mise en avant et bouscule de façon bienvenue les préjugés sans toutefois éviter une culpabilisation inutile : « si je l'avais connue voilée, nos rapports auraient été différents. »
Ce qui nous regarde, de Myriam Marzouki
Au TNG jusqu'au 17 février à 20h