David Kimelfeld : « Dans des lieux déjà existants, on peut développer des concepts nouveaux »

Politique Culturelle / Il est le dauphin désigné, celui que Gérard Collomb a choisi pour lui succéder à la mairie de Lyon. David Kimelfeld, actuel maire du 4e arrondissement, est toujours resté discret question culture. Il a inauguré ce mois-ci un concept de scène ouverte à la Maison des Associations et s'est connecté aux pratiques urbaines du street art et du skate : mots choisis.

Vous inaugurez un concept de scène ouverte à la Maison des Associations...
La Maison des Associations fonctionne de manière classique : on y empile des activités, parce que les gens ont besoin de créneaux horaire pour faire leurs réunions, des répétitions... Cette maison-là, pour qu'elle mérite son nom, il fallait lui donner du sens et une identité : comment faire, comment la rendre utile aux associations au-delà des bureaux temporaires ? On en a déjà fait un lieu de vie, avec un bar, un babyfoot, on a voulu l'animer pour le rendre convivial, avec des rencontres, des cafés-débats. Maintenant, les gens qui ont une activité là-bas se croisent. De là, l'idée a germé de le mettre à disposition d'équipes émergentes dans la culture, pas forcément intégrées dans des réseaux, qui cherchent des lieux sans savoir forcément à qui s'adresser. Des gens ont besoin d'un lieu pour montrer ce qu'ils savent faire, dans le domaine de la musique mais aussi du théâtre ou de la lecture publique : tous les arts sont possibles.
On a donc équipé le lieu, pour faire de la musique. On met aussi à disposition de la communication, nos réseaux. Et on va réfléchir à ce que l'on peut faire de mieux, collectivement, pour les accompagner.

à lire aussi : La bibliothèque, ce pilier de la démocratie que Lyon chérit

Est-ce qu'il y a un personnel accompagnant, du coaching ?
Non. Mais il y a des gens qui parrainent. C'est de la mise à disposition de locaux. Il y a du personnel technique, aussi. On est dans l'expérimentation : en fait, on a pas un rond pour faire ça. Mais on a un équipement, un personnel attaché à la Maison des Associations. On recueillera les idées des uns et des autres pour aller plus loin derrière. Il faut co-construire, installer une régularité, on sera sur une mensuelle avec ces scènes ouvertes.

Qui peut se produire ?
Ce seront des artistes émergents. On ne veut pas concurrencer les lieux de l'arrondissement. Ce qui manque, c'est le tout premier accès, celui où il n'y a pas besoin d'être sélectionné.

à lire aussi : Après Nova, voici France Bleu

Ça ne concurrence pas le circuit des Scènes découvertes initié par la mairie centrale ?
Non, je ne pense pas. On est dans une phase qui précède ça, me semble-t-il. On ne sait pas encore ce que ça va donner, mais on a senti un vrai besoin. L'idée, c'est à partir de ça d'avoir une réflexion plus large sur la ville et de voir quels enseignements on peut en tirer. On a tout un tissu qui a besoin de lieux. Souvent, dans le passé, les réponses tournaient autour d'une grande friche culturelle mise à disposition. Ça reste souvent un rêve, qui quand il se concrétise est souvent mal géré dans la durée. Je pense que l'on a une réflexion à avoir en terme de proximité, par arrondissement, et de montrer que dans des lieux déjà existants, on peut développer des concepts nouveaux. On peut toujours attendre la friche culturelle de demain, mais en attendant, il faut apporter des réponses.

On dit que vous êtes un ardent défenseur du street art dans votre arrondissement.
C'est le fruit de rencontres. J'y vois plusieurs intérêts : déjà, il y a une formidable énergie qui s'en dégage. Mur69, on les a fait intervenir à deux reprises : la première après les attentats au Bataclan, en face du cimetière de la Croix-Rousse. Je ne connaissais pas ce milieu : j'ai découvert une excellence artistique. Et une proximité avec les publics : c'était frappant, les mémés du quartier venaient voir. Et les graffeurs avaient une vraie culture du dialogue et de l'échange, y compris pour tester : j'ai vu des mamies avec les bombes, peindre sur le mur. Dans des quartiers comme le nôtre, où il y a confusion entre graffiti et tag (il ne se passe pas une semaine sans que je reçoive un courrier au sujet d'un tag), ça permettait de construire un moment pour dialoguer autour de ce thème. De dégonfler le sujet.
Le second événement, c'était sur la place des Tapis. Ça a provoqué là encore des dialogues, des questions : on est très rarement interpellés en tant que maire sur des questions artistiques, à moins de faire une expo scandaleuse en mairie... C'était la première fois que j'étais interpellé sur des questions de goûts artistiques ! Et ça déplace beaucoup de monde. Il se passe un truc. C'est intéressant. C'est aussi l'envie des gens de s'occuper plus de ce qui se passe sur l'espace public. Quand on fait des rénovations de lieux, on le voit, comme sur notre projet de Clos Jouve. Il y a un appétit des plus jeunes pour savoir ce que l'on fait de ces lieux.

Ce qui ramène aussi aux débats récents avec les skateurs, au sujet de la place de la Comédie.
Exactement. C'est une réflexion que j'ai, sur tous ces sujets. Lors de notre grande concertation pour la place des Tapis, à aucun moment, nous sommes entrés en contact avec les skateurs. Cette place a été pensée, mais les usages se sont complètement transformés. C'est devenu un spot de skate, dans une cohabitation harmonieuse : j'ai dû recevoir un seul courrier en trois ans. La seule connerie que l'on a faite, c'est que l'on n'a pas discuté en amont avec les utilisateurs, on n'a donc pas pensé à la protection de l'espace tel que l'on aurait pu le faire.
Place de la Comédie, c'est ce que l'on a fait : on a eu des propos un peu polémiques, c'était un peu voulu de notre part et ça a mobilisé les skateurs. Ça a marché : on s'est mis autour de la table pour discuter. Et j'ai découvert qu'ils avaient plein de bonnes idées, ce ne sont pas des fous furieux. Pour que l'espace soit aménagé avec des bons matériaux, que ça dure et que ça ne dérange personne. On va travailler avec eux aussi pour le Clos Jouve. À la Ville, on avait un temps de retard là-dessus : on n'avait jamais dialogué avec eux. On doit dialoguer avec les gens du skate, du street art...

Maison des Associations
28 rue Denfert-Rochereau, 4e

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Lundi 18 octobre 2021 L'utilisation temporaire de Fagor-Brandt est prolongée jusqu'en novembre 2023, à la demande des acteurs culturels occupant le lieu. Mais rien n'est résolu pour la suite qui, au contraire, semble se compliquer, la Métropole n'ayant rien anticipé.
Jeudi 23 septembre 2021 Le réseau des galeries lyonnaises continue de s’étendre avec la réouverture d’Outsiders, qui convie Onemizer pour une exposition solo. Après une année semée d’empêchements et d’incertitudes, la troisième galerie du nom est pressée de mettre en...
Mardi 18 février 2020 Peinture Fraîche a dévoilé sa programmation et son ambition de métamorphoser la Halle Debourg sous l’impulsion des nouvelles technologies. Un parti pris qui installe Lyon à l’avant-garde du street art.
Mardi 8 octobre 2019 Le président de la Métropole David Kimelfeld a décidé de faire de l'urbanisme transitoire un axe fort de la fin de son mandat comme de sa campagne électorale à venir, lançant des projets visant Fagor-Brandt, la Halle Debourg ou les Halles Sernam à...
Lundi 24 septembre 2018 Elle en aura mis du temps à se trouver une voie en matière de culture, la Métropole. Mais près de trois ans après sa création, elle choisit d'aider financièrement les festivals Sens interdits, Karavel et la biennale Hors normes. Un geste politique...
Mardi 29 août 2017 Vous connaissez tous Pec : c’est le créateur des Birdy Kids. Ces oiseaux ronds et colorés,  vous n’avez pas pu passer à côté. Mais ces gentils volatiles ne sont que la face émergée de l’iceberg.
Mardi 29 août 2017 L’art visuel se résume-t-il aux œuvres exposées dans les galeries et les musées ? L’art de rue n’est-il que vandalisme ? La réponse est non. Prenant ses marques au milieu du siècle dernier, le street art est devenu progressivement un art à part...
Mardi 30 mai 2017 Fred Mortagne a bientôt 35 ans de skate dans les pattes. Le réalisateur et photographe lyonnais, connu et respecté à travers le globe, a contribué à faire connaître les spots de sa ville sur la scène internationale. Il présente une exposition...
Mardi 14 mars 2017 Raccommodeur secret de bitume, Ememem est un adepte du "flacking". Cette technique remplit nos trottoirs tristes de carrelages multiformes, aux couleurs qui détonnent du triste gris du béton.
Mardi 24 janvier 2017 Big Ben rend hommage à l'auteur de Rebel Rebel disparu il y a un an, avec une œuvre intense à dénicher au cœur des pentes de la Croix-Rousse.
Mardi 29 novembre 2016 "HDV" pour "Hôtel de Ville" désigne un spot de skate qui se trouve place Louis Pradel, dans le 1er arrondissement. Lyon aurait de quoi en être fière, du fait de sa réputation internationale, mais les élus de la Métropole ont décidé d’éloigner les...
Vendredi 16 septembre 2016 « Gloire à l'art de rue, jusqu'au bout art de rue » : c'est par ces premiers mots en 2001 que la Fonky Family rendait hommage aux activistes de l'art (...)
Mardi 7 avril 2015 Du colosse en tenue de marin Harry Merry (dont on a découvert la glam-pop pouet-pouet en première partie d'Ariel Pink) au guitariste-chanteur du duo (...)
Vendredi 3 mai 2013 Déformés, noyés dans un brouillard de lignes, les personnages de Nicolas Le Borgne, a.k.a. Odö, échappent à l'iris. Mais peu à peu l'univers sarcastique de l'artiste apparaît, dans lequel pin-up cadavériques, Mickey dégoulinant et autres figures de...
Mercredi 15 juin 2011 Entre l'art et le monde du skate c'est... compliqué ! Autant certains artistes, comme le photographe et cinéaste Larry Clark (dont on peut voir deux (...)
Mercredi 13 septembre 2006 Galerie / "Si la presse en parle moins, le circuit du street art existe et dure depuis 25 ans. Pour une simple mode, ce serait un peu long", assure (...)

Suivez la guide !

Clubbing, expos, cinéma, humour, théâtre, danse, littérature, fripes, famille… abonne toi pour recevoir une fois par semaine les conseils sorties de la rédac’ !

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X