Mardi 12 septembre 2017
« Moeder ne parle pas d’une mère, mais de plusieurs mères. On parle de la maternité, de l’absence, du manque. La pièce fouille dans la mémoire et (...)
"War and breakfast" : à leurs corps défendus
Par Nadja Pobel
Publié Mardi 12 septembre 2017
Photo : © DR
War and breakfast
Théâtre des Clochards Célestes
ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement
Théâtre / En adaptant plusieurs des dix-huit courtes pièces de War and Breakfast, Amine Kidia signe un cinglant spectacle, avec une justesse d'interprétation parfois stupéfiante. C'est le spectacle rugueux obligatoire de cette rentrée.
Au Lavoir Public où ils l'ont créée en 2016, les comédiens de War and Breakfast ont joué de la peu commune et peu facilitatrice géographie du lieu. Cette inventivité va fatalement être moins originale aux Clochards Célestes. Quoique... le public sera à nouveau en bi-frontal : un premier indicateur de la manière (avec poigne et poignante) dont cette jeune troupe s'est accaparé ce texte violent de Mark Ravenhill.
L'auteur britannique y dresse en une vingtaine de tableaux un réquisitoire sans état d'âme de l'Occident guerrier et meurtrier et de la violence avec laquelle l'horreur s'invente au petit déjeuner. Amine Kidia met en scène (et lui-même) des élèves sortis du Conservatoire de Lyon, tous impeccables de densité pour ces rôles qui exigent un travail minutieux tant le pathos guette ou, pire, un excès de ton dramatique qui soulignerait des mots suffisamment radicaux pour qu'ils ne soient pas boursouflés par les acteurs.
Fast and furious
Dans la pièce 12, Mer(e), Savannah Rol est cette mère dont le fils a été tué. Elle monologue, se traite de « grosse conne de flemmarde qui fout rien » et demande aux deux officiers présents pour lui annoncer le couperet tombé sur son enfant qu'ils la battent. Mais c'est elle qui mord, à l'énoncé de son nom. Les assassins sont des animaux ? Elle fait quelques bruits de bête, pour l'exprimer. Un des actes les plus casse-gueule en théâtre, si vite ridicule : elle touche, pourtant. De même que ses spasmes de pleurs, ses hurlements ne sonnent jamais creux. Ce travail sublime permet au texte de Mark Ravenhill, ce représentant du courant in-yer-face, d'être incarné pleinement.
Dans Intolérance (pièce 2), c'est Claire-Marie Daveau qui, avec retenue parfois, torsion du corps, d'une lèvre dit la douleur qui ne peut plus se contenir et rend presque visible le profond mal de ventre de cette femme qui se coupe du monde peu à peu pour ne pas entendre le bruit des bombes au dehors. Ce n'est pas tant le récit qui intéresse Amine Kidia que la façon de transmettre. Peut-être même que si la pièce était muette, les attitudes des comédiens permettraient de relater le propos.
Le jeune artiste qui avait fait d'une de ses pièces son sujet de diplôme d'études théâtrale, annonce avant chaque scène le titre et de quoi il va être question, sans jouer du suspens. Cette distanciation rappelle forcément Brecht auquel le metteur en scène adjoint l'enseignement d'Antonin Artaud et d'un théâtre de la cruauté tel que l'écrivain l'a théorisé dans Le Théâtre et son double.
War and breakfast
Au théâtre des Clochards Célestes du 15 au 22 septembre
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