38e Festival du film court de Villeurbanne : une édition fantastique

Court-Métrage / Vigie d’une production européenne très orientée genre cette année, le Festival du Film Court de Villeurbanne participe de surcroît au rayonnement de la création locale. Clap clap !

Nul besoin de tortiller en tout sens la compétition européenne pour dégager la dominante thématique de ce 38e millésime villeurbannais : le fantastique infuse et irrigue près de la moitié des 48 films en lice. Et il ne s’agit pas d’une lubie hexagonale : tous les pays représentés connaissent la même résurgence pour ce cinéma de genre que les jeunes cinéastes maîtrisaient parfois mal autrefois. Ce n’est plus cas.

Pour Laurent Hugues, directeur des festivals du Zola, « si le goût pour le fantastique a toujours été là, il avait du mal à passer le stade des commissions d’aide à la production, qui donnaient leur préférence aux films à caractère social. Aujourd’hui, on trouve davantage de personnes aspirant à élargir le spectre des œuvres financées. » Quant au volume… Le fantastique ne naît pas dans une société apaisée : « L’air du temps inspire une inquiétude grandissante chez les auteurs, un malaise qui s’accroit depuis deux ou trois ans. » Et le comité de sélection du festival a peut-être, lui aussi, gagné en audace.

Mise en bouche

Faut-il plaindre le jury qui aura à départager les films ? Envions-le, plutôt, de découvrir le lave-linge enchanté inversant les têtes signé par la triplette batave Job, Joris & Marieke (Kop Op), et la balade métaphorique dans un monde d’amour et d’infection vu par Rune Spaans (The Absence of Eddy Table). Il verra que Guillaume Foresti avec Escamotage n’est pas loin de Philip K. Dick, que la figure tutélaire de Rémy Rondeau pour J’aime Eva Marsh se nomme Stephen King et que Miyazaki est l’ange inspirateur du poétique Pépé le Morse de Lucrèce Andreae. Il perdra pied et ses sensations tel le photographe aveugle dans Der blinde Fotograf de Max Walter ou la violoncelliste dans Houvast de Charlotte Scott-Wilson.

Mais il goûtera aussi à la politique, notamment à la situation des réfugiés, à l’envers comme à l’endroit, avec le renversant Home de Daniel Mulloy. Il vivra la guerre en direct grâce à Sophie Tavert et le cas de conscience de son Mad, (tourné à Villeurbanne !) et testera l’amère saveur des lendemains d’une révolution avec Les Serviteurs de Marwan Khneisser — leçon d’épure cinématographique.

Des pros et des locaux

Toujours soucieux de s’ouvrir au monde professionnel, le “FFC” a troqué le forum des métiers du cinéma qu’il organisait jadis à destination des lycéens et étudiants contre une kyrielle de rendez-vous rythmant sa semaine. La proximité géographique avec le pôle d’industries créatives Pixel — où se sont implantés Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma et ses studios — n’est pas étrangère à cette évolution touchant de nouvelles cibles : qu’ils soient aspirants, émergents ou confirmés, artistes et techniciens aiment en effet à s’y retrouver.

Déjà conquis par la masterclass en compagnie d’un·e pro réputé·e (cette année, le compositeur Bruno Coulais, voir encadré), les acteurs du paysage audiovisuel local disposent d’une valorisation supplémentaire grâce à une case à part, la soirée “le Bureau des auteurs présente”. « Il ne s’agit pas d’une sélection compétitive, insiste Marie Le Gac, dudit Bureau, mais d’une projection de courts-métrages accompagnés par la Région à l’étape d’écriture ou aidés par le fonds régional. Ou encore de films signés par des auteurs locaux. »

Très dynamique en Rhône-Alpes, le secteur de l’animation est cette année mis à l’honneur, avec des œuvres ayant bénéficié d’une partition musicale originale. Autre pierre à cet édifice : la séance Mèche courte, un florilège de courts-métrages tout juste intégrés dans le catalogue de films proposés aux salles d’Auvergne-Rhône-Alpes pour leurs premières parties.

Complétant la sélection officielle, ces programmations permettent au Festival de présenter la majeure partie de la production locale annuelle la plus “mature”, émanant de quinze à vingt cinéastes. « Et la qualité a significativement progressé en une décennie », se réjouit Laurent Hugues. Autant de vitrines supplémentaires pour les spectateurs, mais aussi les professionnels de passage découvrant les potentialités du territoire. On peut parler de cercle vertueux. Cela aussi, c’est fantastique.

38e Festival du Film court
Au Cinéma le Zola ​du 17 au 26 novembre

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