Fabien Hyvernaud : « on fait quelque chose qui a du sens »

Fabien Hyvernaud : « on fait quelque chose qui a du sens »

Ninkasi / Programmateur, directeur de production et administrateur de Ninkasi Musiques de 2008 à 2015, Fabien Hyvernaud y revient pour occuper le poste de directeur général. Il nous parle de son rôle, de programmation et de l'évolution du Ninkasi Music Lab.

Après trois ans passés au Sucre comme directeur de production, vous revenez en cette rentrée dans le groupe Ninkasi en tant que directeur général de Ninkasi Musiques. En quoi consiste ce poste exactement ?
Fabien Hyvernaud :
Mon travail, c'est de manager l'équipe de Ninkasi Musiques qui s'est enrichie d'une administratrice, d'un régisseur, d'un chef de produit musique, et d'incarner la direction artistique du groupe, du Ninkasi Kafé à l'ensemble des quinze établissements actuels, sachant qu'il en ouvre environ trois par an et que chaque nouvel établissement est désormais équipé d'une scène pour accueillir des concerts.

Ça représente combien de concerts par an sur l'ensemble des enseignes ?
Plus de mille. À Gerland, il y a quasiment une date tous les jours rien que sur le live. Et ça se développe constamment avec les enseignes et le champ animation.

Pour combien de spectateurs ?
66 000 pour le Kao l'an dernier et 62 000 pour le Kafé. On est à pratiquement 130 000 sur Gerland. Sur les lieux Ninkasi il est plus difficile d'avoir des estimations, comme ce sont des lieux de vie, c'est compliqué et pas forcément pertinent. Sur le réseau, l'info numéro un c'est l'ambiance et le retour sur les concerts.

Est-il compliqué de trouver des artistes pour toutes ces dates ?
Honnêtement, en dépit de notre exigence, non. Il y a un tissu de groupes inimaginable sur la région Rhône-Alpes et puis Ninkasi a une aura, les gens ont envie de venir jouer chez nous. Je ne passe pas beaucoup de temps à chercher des groupes, c'est davantage le cas sur le Kao.

Quel est le cahier des charges du Kao en termes de programmation ?
On a retrouvé une activité de production assez soutenue sur le quadrimestre. On essaie de s'allier aussi avec des promoteurs locaux comme Mediatone, SLH... Et puis il y a des jeunes structures sur la partie club, comme Exoria, THS... La politique c'est d'entretenir l'existant et de faire passer un cap à des structures qui sont encore amateures ou en structuration. C'est notre rôle que de permettre à ces petites graines de grandir. On a aussi une grosse activité sur certaines esthétiques comme le hip-hop.

Et je suis un gros fan de punk, de hardcore, j'ai envie de développer ça, au Kao mais aussi au Kafé parce que c'est une jauge parfaite pour ces esthétiques. Si je prend le cas de Gerland, ce qu'on adore, c'est quand le lundi de la salsa, une institution ici, cohabite avec un concert de métal au Kao. En gros, on consolide, on refait du rock qui tâche tout en conciliant avec les aspects un peu cultes et notre credo qui est le brassage. Tout ça avec un nouveau système de diffusion au Kao qui sera installé début octobre. On va gagner en qualité parce qu'on monte en gamme. C'est une grosse décision, financièrement lourde, mais qui va dans le sens de l'exigence.

L'absence de subventions publiques du Kao avait conduit à l'arrêt de la production de concerts par Ninkasi, où en êtes-vous aujourd'hui ?
Je pense que désormais les institutions ne vont plus être les cheffes de fil des financements. En reprenant une activité de production, on a quand même des subventions du CNV, de la Sacem... Surtout on a des partenaires-mécènes qui nous aident à financer le projet culturel, les groupes du Ninkasi Music Lab [ex-Tremplin découvertes, NdlR] ou les premières parties. Et ces mécènes sont à 100% des gens qui travaillent avec le Ninkasi dans son activité globale... On a cette chance d'avoir écrit une histoire avec des gens qui nous aident à la poursuivre.

À combien s'élève le budget musique ?
900 000 euros pour le Kao (artistique, technique, etc). 230 000 euros pour la programmation du Kafé et 200 000 euros pour l'ensemble des autres établissements Ninkasi. 93 000 euros sont dédiés exclusivement à l'aide à l'émergence.

Un mot sur le Ninkasi Music Lab ?
Le principe reste le même : une phase de présélection, quatre dates de décembre à mars avec trois groupes à chaque fois. Trois sont sélectionnés par le public et neuf par le jury. Et le best of des groupes repérés en mai au Kao. Mais on repasse un cap cette année. L'ensemble des artistes va bénéficier d'une formation dispensée par AFX. On assume vraiment le fait qu'il ne s'agit pas d'un tremplin mais d'un dispositif plus large que ça.

Ce sont des groupes qui ont tous pour ambition de vivre de leur musique. Ça nous permet de voir quels sont les plus prometteurs et de les accompagner. Ce n'est pas forcément l'artiste repéré de l'année, l'artiste accompagné gagnant du prix de 5000 euros, qui est le seul bénéficiaire du projet. Certains d'entre eux finissent par devenir des têtes d'affiche chez nous. Et puis les groupes vont être rémunérés, c'est très important pour moi. On ne peut plus en 2018 demander à des gens de venir jouer gratuitement pour la beauté du geste. Et le fait que ce soit des partenaires du Ninkasi qui contribuent à cela, me donne l'impression qu'on fait quelque chose qui a du sens.

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