Steve Gunn, ombre est lumière


Sonic

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Folk / Éternel second couteau, brillant, affûté et du meilleur métal, certes, Steve Gunn n'est jamais vraiment parvenu à imposer une personnalité qui semblait attirer l'ombre. C'est peut-être enfin le cas sur "The Unseen in Between", album de deuil qui paradoxalement semble assumer de chercher la lumière.

On s'est peut-être mépris sur Steve Gunn. Car en dépit du mini-culte dont le guitariste fait l'objet dans certains cercles indés et chez les amateurs de folk pointu, le Philadelphian n'a jamais vraiment dépassé sa réputation d'homme-lige des démiurges Adam Granduciel (The War on Drugs), Kurt Vile et Kevin Morby ou d'héritier putatif mais discret d'un Michael Chapman (légende qu'il a épaulé pour son disque du cinquantenaire de carrière notamment), d'un John Fahey et de l'American primitive guitar ou, si l'on regarde de ce côté ci de l'Atlantique, d'un Bert Jansch. Ce, malgré une œuvre en solo considérable marquée par des disques importants.

Sans doute parce que, comme on le disait dans un précédent article, Steve Gunn semblait n'avoir « que faire de sa surcompétence », ou du moins ne pas savoir qu'en faire, ne pas totalement parvenir à s'assumer en songwriter à part entière. Entendons par là : à s'impliquer personnellement et complètement, à mettre autre chose sur la table qu'une virtuosité et un savoir-faire jamais démentis par quiconque. C'est ce pas qu'il semble avoir franchi avec son dernier disque The Unseen in Between, comme si c'était Steve Gunn qui s'était finalement mépris sur lui-même.

Vagabond

Il aura fallu pour cela que le guitariste perde son père et se plonge, comme poussé par ce cruel déclic, dans une écriture de l'intime qui semble comme par magie, en plus de personnaliser son écriture, ouvert en grand la palette d'influences pourtant déjà considérable. De la douceur aride du bouleversant Stonehurst Cowboy, dédié à son père dont c'était le surnom à Luciano qui convoque le côté lumineux de Nick Drake et ses arrangements de soie en passant par Vagabond, directement inspiré par le film Sans toit ni loi d'Agnès Varda et les arpèges d'un certain Johnny Marr (même la basse y est smithienne à souhait).

Le tout sans jamais se départir de ce psychédélisme qui tricote les matières électriques et acoustiques en un cachemire pour les oreilles (New Familiar). Car paradoxalement, ces influences, cette érudition, Steve Gunn semble aussi s'en délivrer. Il le reconnaît : jamais il n'était entré à ce point en lui-même, et c'est paradoxalement par là que le guitariste a rencontré le proverbial éblouissement, ce Graal mystique et intime après lequel ont couru des générations de folkeux cosmiques.

En se préoccupant moins du savoir-faire que du laisser-aller, en étant moins respectueux des canons et des formes, en s'affirmant enfin comme son propre maître et non plus comme le plus brillant des disciples, Steve Gunn semble trouver peu à peu et au fil des années sa voix, en libérant ce qui, dans l'entre-deux qui donne son titre à cet album, était jusqu'ici invisible.

Steve Gunn
Au Sonic le lundi 1er avril

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