Chacun cherche sa châtaigne

Ardèche / Pour que soit préservé leur métier, les cultivateurs de châtaignes ont initié il y a une trentaine d’années la création du Parc naturel des Monts d’Ardèche sur lequel pousse ce fruit délicieux, AOP, et célébré en cet automne par des fêtes dédiées : les castagnades.

150 communes et un bon tiers du territoire départemental : c’est sur cet espace que se déploie le Parc naturel des Monts d’Ardèche, de Saint-Agrève aux Vans et de Saint-Laurent-les-Bains à Saint-Cierge-la-Serre, qui lèche le Rhône. Ouvert en 2001, ce parc constitué de plateaux (pour l’élevage du bœuf Mézenc AOP notamment et pour les myrtilles), de pentes et du piémont cévenol (avec vignes et oliviers) ne serait pas né sans la volonté des castanéiculteurs de sauver leur production.

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À la fin des années 1990, l’engouement des sixties et seventies pour l’Ardèche s’est tari et s’opère alors un dépeuplement ; l’agriculture est en recul et les châtaigneraies s’embroussaillent dans ces pentes, compliquées à travailler. Pour ces agriculteurs particuliers, la création du PNR — Parc Naturel Régional — sera une planche de salut puisque sa fonction est d’être « un outil de développement de territoire sur une zone rurale en difficulté », nous confie sa chargée de mission communication Vanessa Nicod. Aujourd’hui 30 000 hectares de châtaigneraies sont recensés mais seuls 5000 sont cultivés — le problème étant que la transmission de fonciers entre les générations coûte cher. D’où un plan de reconquête élaboré depuis six ans, financé par la Région, le PNR et la chambre d’agriculture de l’Ardèche, qui abonde pour moitié aux factures d’élagage, de débroussaillage et à la création de pistes d’accès.

2000 châtaigniers ont été reconquis : ce n’est pas assez pour faire face à la demande — il manque 2000 tonnes de châtaignes par an — mais ça n’empêche pas l’Ardèche d’être le premier producteur national, conforté par l’attribution du label AOC en 2006 puis AOP en 2014. La plupart des castanéiculteurs sont toutefois doubles actifs (apiculteur, éleveur) car leur travail n’est pas assez rentable et peu nombreux sont ceux qui transforment eux-mêmes leur production. Le relais est souvent passé aux trois acteurs locaux en la matière : Imbert, Sabaton et Clément Faugier, avant d’être exporté à l’international (50% de la production de Sabaton part au Japon).

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Le parc s’est vu affublé d’un autre label, international cette fois-ci, celui de Geopark de l’UNESCO, comme huit autres en France (le PNR du Lubéron, le massif des Bauges ou encore le Beaujolais) pour leur qualités géologiques remarquables. La preuve par l’exemple ci-dessous.

Une balade

Les Grottes de la Jaubernie. Voici un circuit de 4, 8 km parcouru en à peine deux heures pour un léger dénivelé de 230 m. Au départ de Coux (se garer vers le vieux pont face à la nouvelle halle), suivre le parcours très balisé en jaune et blanc une fois traversée la D104 et atteindre le point Salière puis Monchamp. Marcher 1, 4 km pour arriver sur une impressionnante dalle de grès. Le label Geopark UNESCO se justifie notamment par cette grande plaque de calcaire gréseux d’environ –190 millions d’années ; les cavités circulaires qui se trouvent à la surface émanent de l’extraction de meules pour faire tourner les moulins de la vallée de l’Ouvèze en contrebas. Cette impressionnante pierre toiture un rocher abritant des habitats troglodytes remontant à la Préhistoire. Durant les guerres de religions, elles ont servi de refuges, d’où leur aménagement en fortifications. L’une a été murée, une autre a été dotée d’un encadrement de pierre où est même gravé un écusson. En faire le tour, traverser la dalle et redescendre par le chemin d’Auréac sur une route goudronnée mais très peu fréquentée.


Le fruit !

Ses premières traces dans ces contrées remontent à 8 millions d’années ! Et on ne sait pas comment elle se nommait. Aujourd’hui, la crème de marrons et les marrons glacés sont bien issus de la châtaigne, car le marron des cours de récré n’est pas comestible. Les Monts d’Ardèche comptent 65 variétés complexes à reconnaitre pour les novices et rarement mentionnées sur les marchés lyonnais. En Ardèche, vous pouvez acheter de la comballe (la plus courante et la plus sucrée), de la bouche rouge (celle qui est traditionnellement rôtie sur les marchés de Noël car elle est facile à conserver) ou encore de la garrinche. Ce fruit se stocke au frigo pour être mangé dans les sept à huit jours car il craint l’humidité et la chaleur. Il a le vent en poupe puisqu’il ne contient pas de gluten. Sa farine qui nécessite 3 à 5 kg de fruits pour faire un kilo de poudre est très prisée par les personnes atteintes de maladie cœliaque. Le bois de ces arbres a aussi une utilité : il sert à la menuiserie, la parqueterie ou la tonnellerie par exemple.


La fête : les castagnades

Depuis 22 ans que le Parc naturel des Monts d’Ardèche existe, en octobre-novembre au moment de la récolte, la châtaigne est célébrée lors des castagnades qu’il coordonne, comme les viticulteurs font la fête au beaujolais nouveau ou les producteurs drômois de Nyons font la fête de l’olive à chaque fin de récolte le premier dimanche de février, l’Alicoque.

Désaignes, Privas, Antraigues et Joyeuse ont été pionnières. Désormais onze communes proposent ces festivités avec ventes de produits, défilé de la confrérie, intronisation d’un nouveau membre, rôties dans un immense grilloir de cinq mètres de long, rencontre avec des castanéiculteurs… et même parfois randonnées dans le parc, jeux pour enfants. Chaque lieu organisateur se doit aussi de proposer des menus à base de châtaignes dans un ou plusieurs restaurants. Deux castagnades sont encore à venir en novembre.

Vesseaux (6 et 7 novembre). Village de l’Ardèche méridionale proche d’Aubenas, Vesseaux accueille la castagnade au pied de son étonnante église aux tuiles vernissées et multicolores. Balade, dégustation, etc.

Joannas (13 et 14 novembre). C’est la plus petite des communes à organiser cette fête, la 11e et dernière pour 2021, plus au sud encore que la précédente. La fête a lieu sur le parvis du château de ce village tout en pierre adossé à l’imposante Cham du Cros de plus de 1000 m d’altitude. Là encore, dégustation, atelier de réalisation de desserts, visite de châtaigneraies sont au programme.


Où dormir ?

Domaine du Clap. Ce Gîte de France se trouve dans une splendide demeure du XVe siècle que la famille Delon habite depuis 1812. Au bout d’une petite route jonchée de châtaignes à cette période, accueil très chaleureux d’André qui dispose de cinq chambres (pour une capacité totale de quinze personnes) et des petits prix en rapport avec la qualité : 64 ou 68€ la nuit petit-déjeuner compris. Tout est fait maison (le pain au levain, les mini brioches, les confitures de gingérine-orange, abricots et… châtaignes). Aucune raison de ne pas y manger le soir ce qui vient du jardin pour 24€ entrée-plat-fromages-dessert (cette glace aux myrtilles avec son fondant à la châtaigne à tomber à la renverse !) + apéritifs et vin compris. Le site est le point de départ d’une randonnée très réputée, celle du Volcan de Chirouze.

À Pranles
T. 04 75 64 22 05


Comment y aller ?

En voiture. Privas est à 140 km de Lyon. Pas de gare TER en Ardèche mais des bus.


Où acheter des produits aux châtaignes ?

Chez Patrice Galiana et Véronique Dupuis. Vente directe chez les producteurs. Tout est à la châtaigne cultivée et transformée sur place : biscuits, galettes, flans, pâte à tartiner, purée, farine, sirop et même chips ! En 2022 cet atelier de transformation pourra se visiter en autonomie.

À Laboule
T. 04 75 37 12 83

La Ferme du châtaignier. Chez Michel Grange. L'atelier de travail se visite déjà et la boutique regorge de bons produits à la châtaigne, de vins ardéchois et bière locale.

À Lamastre
T. 33 04 75 06 30 19

Renseignements

Maison du Parc naturel régional des Monts d'Ardèche. Expositions (sur les pollinisateurs et les abeilles), idées de parcours découvertes, sentiers…
Domaine de Rochemure à Jaujac
T. 04 75 36 38 60
Attention, ouverture jusqu’au 7 novembre (10h30 à 12h30 et 14h à 18h), ensuite fermeture au public jusqu’à mi-juin

Musée Castanea. Dans un bâtiment du XVIIe siècle, parcours sur deux étages consacré à ce fruit et valorisation des savoir-faire des producteurs et transformateurs locaux
À Joyeuse
T. 04 75 39 90 66
Du mardi au dimanche de 14h à 18h
Tarif : 6, 50€

S'organiser pour venir aux fêtes de la châtaignes (hébergements, découvertes...) https://les-castagnades.milligo.fr/ et plus généralement en Ardèche

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