Dans les salles du GRAC, il était une fois… des révolutions

Patrimoine / La fortune sourit aux audacieux, prétend un proverbe. Il faut toutefois nuancer en art, et notamment au cinéma, où le fait d'oser ne délivre pas de sauf-conduit automatique pour la richesse. Reste la postérité : sans les devanciers, pas d'évolution ni de révolution possibles. C'est ce que nous rappelle ce nouveau cycle Ciné-Collection. 

En janvier, les salles du réseau GRAC ont plus que jamais bonne mémoire, rappelant à la nôtre quatre films dont l’influence sur le 7e Art n’est pas près de s’éteindre. Quatre jalons internationaux prouvant l’universalité du langage cinématographique et la complémentarité des formes ; un carré de chefs-d’œuvre (osons le mot) contaminant encore et toujours les images contemporaines.

De Rome à Cuba

Premier mouvement du cycle, Rome, ville ouverte (1945) pose un regard neuf à mi-chemin entre la fiction et la reconstitution documentée sur l’Histoire en train de s’écrire, permettant à Rossellini d’inventer un genre : le néo-réalisme dans les décombres fumants de la Seconde Guerre mondiale. Nul besoin de rechercher la vérité : elle sourd des décors, terriblement authentiques, et des interprètes réunis autour d’Anna Magnani. Suit Rashômon (1950) où Akira Kurosawa met en évidence la question de la subjectivité des personnages à travers un récit apparemment identique mais raconté différemment par chacun d’entre eux — un procédé qui a depuis fait florès, repris notamment par Alfred Hitchcock (Incident At a Corner, 1960) à Ridley Scott (Le Dernier Duel, 2021) en passant par… un épisode de la série Magnum, Le Témoin (1984).

Tout ceci vous semble encore un peu timoré ? Vous avez envie de vous faire insulter plein cadre par un comédien brisant le 4e mur et rudoyer par un réalisateur jumpcutant son film dans l’irrespect le plus total de la continuité comme des règles de raccord ? Alors il est temps de passer à À bout de souffle (1960), certificat de naissance théorique et d’anarchie de Jean-Luc Godard bardé d’irrévérences, cousu d’impros culottées et de nudités osées. À la fois brûlot et farce d’un voyou aussi potache que lettré, c’est un pied-de-nez avec un doigt d’honneur ouvrant de nouvelles portes grâce à la grâce de Bebel.

Enfin, curiosité suprême, c’est par l’œuvre d’un sorcier de l’image que l’on achève ce tour d’horizon, Soy Cuba de Mikhaïl Kalatozov (1964). Un film de propagande célébrant la révolution cubaine certes, mais surtout une nouvelle occasion pour le réalisateur de Quand passent les cigognes de faire la démonstration de sa virtuosité inégalée : plans-séquences impossibles, noir et blanc au piqué sans défaut, cadrages hyper-composés… Et même Jean Bouise en vedette américaine. Le TNP mène à tout…

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