Mardi 28 novembre 2023 Le spectacle commence par une séquence de chant collective et ludique. Pouvez-vous entonner les premiers mots de cette chanson ? Et celle-ci, la (...)
Fabien Gorgeart : « je n'en aurai jamais fini avec l'enfance »
Par Vincent Raymond
Publié Mercredi 23 mars 2022
Photo : © VR
La Vraie famille
De Fabien Gorgeart (Fr, 1h42) Avec Mélanie Thierry, Lyes Salem, Félix Moati
La Vraie Famille / Présenté en ouverture du dernier festival de Sarlat, le deuxième long-métrage de Fabien Gorgeart raconte le déchirement vécu par Simon, enfant placé depuis son plus jeune âge et d'Anna, sa mère d'accueil, mais aussi le reste de la fratrie et la famille, lorsque le père biologique vient faire valoir ses droits. Rencontre avec le cinéaste en Dordogne...
Qu’y a-t-il de personnel dans cette histoire ?
Fabien Gorgeart : Quand j’étais enfant, on était famille d’accueil. Dans le film, je serais Adrien. Mais bon, ça faisait longtemps que je voulais faire quelque chose de cette histoire-là, je me suis autorisé à le faire quand j’ai vu la manière d’en détacher. La base de l’histoire est très proche de la mienne : une cellule familiale, l’arrivée de l’enfant à 18 mois son départ à 12 ans ; ensuiten l’histoire du petit garçon que je raconte, c’est autre chose, pas du tout celle de celui placé dans notre famille. J’ai fait un travail d’enquête, j’ai rencontré d’autres familles d’accueil, des éducateurs. Et quand j’ai entendu l’histoire un peu équivalente à celle de Simon, ça a été une sorte de de de première étape qui m’a rassuré sur le fait que je pouvais y aller. Quelque part, ça me bloquait ce genre d’histoire presque caricaturale d’un père qui se reconstruit et qui veut retrouver sa place de père. Pourtant, dans une situation où il n’y a pas d’antagoniste, où tout le monde aime, ça peut rester complexe et déchirant. Et je pouvais m’inscrire dans un genre de cinéma, qui est le mélodrame populaire.
C’est un film où l’amour est partout, y compris dans la mise en scène, extrêmement lyrique, avec des mouvements de caméra qui vont jusqu’à envelopper en permanence les personnages. Comment avez-vous imaginé cette mise en scène avant le tournage ?
Cette notion “d’envelopper” se rapproche en fait de l’idée d’utiliser le 18mm qui est un format qui élargit : ça permettait d’être très proche des personnages tout en permettant d’englober la famille à tout moment dans le cadre. Je sentais que particulièrement pour ce film, il fallait que je raconte une historie et que je fasse vivre une expérience — et en l’occurrence, en étant à l’intérieur de cette famille tout le temps, suffisamment en proximité avec eux pour que quand il leur arrive ce qui leur arrive, on soit au même niveau émotionnel. Effectivement, même si c’est le personnage d’Anna [joué par Mélanie Thierry, ndlr] qui nous entraîne dans cette histoire-là, il fallait qu’à tout moment on puisse basculer sur le point de vue des enfants et sur le point de vue du personnage de Driss [joué par Lyes Salem, ndlr], qu’il y ait une circulation permanente, avec — c’est la dernière couche — une notion d’instantané. On est dans du présent ; tout ce qu’ils vivent ils le vivent pour la première fois ou il l’ont toujours vécu.
Le film s’ouvre sur séquence joyeuse, dans l’eau d’une piscine. Faut-il y lire une symbolique particulière ?
C’est le lieu qui a inspiré cette scène avec le toboggan, elle n’était pas forcément prévue. Il y avait en tout cas l’idée de pouvoir aller sous l’eau, ressortir ; et qu’Anna soit seule avec lui. L’autre point point important de ce début, c’était d’être dans un paradis aussi artificiel que cette famille l’est. Mais même dans l'artifice, il va y avoir une forme de vérité et de réalité. J’avais aussi plaisir à filmer ce genre de lieux — comme les campings dans lesquels j’ai passé mes étés —, et à filmer la classe moyenne dans les endroits qui leur correspondent, sans mettre un regard distant ni sociologique.
Pourquoi avoir composé une famille mixte, chose encore très rare à l’écran ?
Ce n’était pas une idée forcément ancrée dans le scénario du tout. Quand je me suis dit : « tiens, quel pourrait être le couple autour de moi auquel ça pourrait arriver ? », en tentant de me détacher de mon histoire personnelle, je ne me suis pas tant détaché puisque le couple auquel je me suis référé, c’est celui de ma sœur et de mon beau-frère… qui est d’origine algérienne, tout simplement. Et quand avec la directrice de casting on s’est demandé qui pourrait être le personnage, il y avait la possibilité que ce soit aussi quelqu’un de cette origine-là. Et Lyes [Salem] m’a donné envie d’accorder beaucoup plus de place au personnage de Driss.
Le personnage de Mélanie Thierry pleure beaucoup. Qu’est-ce que cela représente comme enjeu d’interprétation ?
Je n’ai pas encore beaucoup d’expérience en tant que réalisateur, mais j’ai vécu une expérience de travail très forte sur ce film. Notamment en voyant la capacité que Mélanie a de reproduire à l’infini l’abandon, parce qu’on s’est retrouvé à faire beaucoup de prises pour certaines scènes dans lesquelles il y avait des enfants. En tant que réalisateur, c’est assez impressionnant à voir. Autant que de voir des enfants, que l’on avait repérés dans des castings sauvages, devenir des comédiens au fur et à mesure que l’on travaillait. On n’est pas passé par de la manipulation, on leur a juste donné suffisamment de temps et d’énergie pour qu’ils comprennent ce qu’ils jouaient. Un des moteurs tous bêtes pour eux a été pour l’un d’eux d’arriver à pleurer comme Mélanie. Ils s’entraînaient entre eux à se faire pleurer ; c’est comme s’ils étaient en train de regarder Mbappé et voulaient faire pareil. Ça m’a fait cet effet-là, et ça m’a beaucoup aidé.
Et puis le chef-opérateur était collé à eux. Ce qui était important, c’était de chercher le sentiment présent. C’est passé par une exigence de mise en scène qui a fait qu’on a tourné énormément de plans-séquences où l’on commençait par des improvisations pour que tout le monde soit dans la bonne énergie au moment où l’on passait sur le texte du scénario. C’était très éprouvant, on était bien rincés !
Est-ce qu’avec ce film, après Diane a les épaules, vous en avez fini d’explorer le désir de maternité ou d’enfance sous toutes ses formes ?
Alors c’est ce que je pense (sourire) Mais je suis en train de commencer à poser les bases du prochain et je vois très bien et que je vais revenir sur le sujet. Non, j’en aurai jamais fini. Mais je ne donne pas l’impression de refaire la même chose.
à lire aussi
vous serez sans doute intéressé par...
Mercredi 15 mars 2023 Douze ans après sa dernière réalisation, Et soudain tout le monde me manque, Jennifer Devoldère est de retour avec un “roman d’apprentissage” en milieu hospitalier, non exempt de rires, de larmes et de sang. Rencontre avec la cinéaste et ses...
Vendredi 17 février 2023 Inspiré du destin tragique de son frère mort lors d’un bizutage à Saint-Cyr, le film de Rachid Hami se transforme en fresque familiale et met en scène l’un des comédiens de l’année dont le talent n’est plus à démontrer, Karim Leklou, justement...
Mardi 17 janvier 2023 Figurant dans la très qualitative sélection du dernier Festival de Sarlat, "Youssef Salem a du succès" marque les retrouvaille de Baya Kasmi avec Ramzy Bedia autour d’une superbe comédie à tiroirs sur les grandeurs et misères des créateurs,...
Jeudi 17 novembre 2022 Judicieusement choisi pour effectuer l’ouverture du festival de Sarlat, "Reste un peu" donne à son auteur-interprète l’occasion d’effectuer un virage personnel et professionnel : jamais en effet Gad Elmaleh n’avait été aussi lui-même à l’écran qu’en...
Mardi 15 février 2022 Voici les films qui sortent à Lyon en ce mercredi 16 février. Tour d'horizon.
Mardi 4 janvier 2022 Sauf impondérables ou nouveau variant — touchons du bois — les sorties devraient reprendre une cadence "à peu près" normale dans les salles. Petit tour d’horizon de ce qui nous attend dans les premiers mois de 2022…
Mardi 4 janvier 2022 Dopée en fin d’année par une morsure d’araignée, les cinémas repartent d’un bon pied en multipliant les (...)
Lundi 11 octobre 2021 La Forme de l’eau, Roma, Nomadland… Depuis 2017, l’avant-première lyonnaise de la projection du Lion d’Or de Venise prenait place dans la programmation (...)
Lundi 13 juillet 2020 Algérie, années 1990. Depuis qu’il a été témoin d’un attentat, un policier dont la raison défaille est persuadé que le responsable de tout est le terroriste Abou Leila. Son ami et collègue Lofti l’accompagne dans sa traque loin de la capitale, vers...
Mardi 23 janvier 2018 de Emmanuel Finkiel (Fr, 2h06) avec Mélanie Thierry, Benoît Magimel, Benjamin Biolay…
Mardi 14 novembre 2017 de Fabien Gorgeart (Fr, 1h27) avec Clotilde Hesme, Fabrizio Rongione, Thomas Suire…
Mardi 27 septembre 2016 de Stéphanie Di Giusto (E-U, 1h48) avec Soko, Gaspard Ulliel, Mélanie Thierry…
Mardi 15 mars 2016 de Fernando León de Aranoa (Esp, 1h46) avec Benicio Del Toro, Tim Robbins, Mélanie Thierry…
Mardi 18 novembre 2014 De et avec Lyes Salem (Alg-Fr, 2h10) avec Khaled Benaissa, Djemel Barek…
Mardi 25 juin 2013 De Diane Kurys (Fr, 1h50) avec Benoît Magimel, Mélanie Thierry, Nicolas Duvauchelle…
Mardi 26 octobre 2010 De Bertrand Tavernier (Fr, 2h19) avec Lambert Wilson, Mélanie Thierry…
Mardi 15 septembre 2009 De Philippe Godeau (Fr, 1h47) avec François Cluzet, Mélanie Thierry, Michel Vuillermoz…