Jeunesse / L'accès aux activités sportives et culturelles est un défi majeur pour les familles. À Lyon, les MJC, prisées pour leurs tarifs abordables, illustrent la recherche de solutions économiques par les familles mais elles peinent à répondre à une demande croissante.
Il est 8h45 le 7 septembre devant la MJC Maison pour Tous Les Rancy (MPT) dans le 7ᵉ arrondissement de Lyon. Une file de plus de 300 personnes s'étire déjà devant l'entrée, alors que les réinscriptions, prévues pour 9h, n'ont pas encore commencé. Parmi ceux qui attendent, certains parents ont commencé à camper dès 19h la veille. Fanny, arrivée à 5h du matin pour inscrire sa fille de 3 ans aux cours d'éveil à la danse, explique : « Chaque année, je dois être là à l'aube pour espérer obtenir une place. »
« Il y a quinze ans, c'était bien plus simple. Maintenant, il faut s'y prendre encore plus tôt »
Jean-Pierre, qui inscrivait pour la première fois sa fille de 4 ans et demi à la danse et aux arts plastiques, a, lui aussi, fait le déplacement dès 5h, « Il y a quinze ans, c'était bien plus simple. Maintenant, il faut s'y prendre encore plus tôt » observe-t-il.
Face à l'attente, certains préfèrent mêler l'utile à l'agréable. Antoine, habitué à ces longues attentes, raconte : « On discute, on joue aux cartes. Ça rend l'attente plus agréable, même si c'est absurde de devoir en arriver là. » Ariane de son côté s'interroge : « Je me mets à la place d'un parent isolé, ça doit être un enfer. Arriver ici dès 19h la veille, c'est impossible. Toutes les MJC devraient prioriser les familles de leur quartier ou les parents seuls. »
Un choix défendu par Olivier Jarret directeur de la MTP évoquant les limites actuelles : « Nous accueillons chaque année près de 40 % de nouveaux adhérents, mais les créneaux ne suffisent pas toujours. Ceux qui n'ont pas pu obtenir de place aujourd'hui pourront revenir essayer jeudi ou vendredi. Nous ne faisons pas de réinscription automatique pour permettre à de nouveaux venus d'accéder à nos activités. » Quant à l'ouverture des créneaux supplémentaires, Olivier répond « On constate aussi des effets de modes sur certaines activités que l'on ne peut toujours prévoir. Il y a quelques années par exemple, la zumba était plébiscitée et ce n'est plus du tout le cas aujourd'hui. »
Les prix des clubs privés, un obstacle pour de nombreuses familles
Si les MJC attirent autant, c'est aussi en raison des coûts souvent prohibitifs des clubs privés. En 2023, une étude du Défenseur des Droits a révélé qu'en France 71 % des enfants de familles à faibles revenus n'y ont pas accès, contre 38 % pour ceux de milieux plus favorisés. Pierre-Yves et Céline, qui viennent d'inscrire leurs deux enfants à l'escalade et au judo, expliquent : « Les tarifs dans les salles d'escalade privées sont exorbitants. Ici, on a accès à des activités de qualité, à des prix abordables. » Pour certaines familles, des activités comme la poterie en centre-ville peuvent coûter jusqu'à 300 euros par trimestre.
À l'inverse, certaines structures privées comme l'Académie de Ballet Nini Theilade située dans le 1ᵉʳ arrondissement de Lyon peinent à retrouver leur public après la pandémie. « Avant, nous avions 2 400 élèves, maintenant nous dépassons à peine les 1 000 », déplore Marie-Danielle Grimaud, directrice de l'académie. La concurrence des MJC et autres offres privées comme les salles de sport, avec des tarifs bien plus bas, et la crise économique ont fortement impacté ces écoles. « Il est difficile de rivaliser, surtout dans le contexte actuel où chaque euro compte pour les familles » reconnaît-elle.
Un territoire en manque d'équipements
Les Jeux Olympiques de 2024 promettent également de bouleverser encore davantage la demande pour les activités sportives à Lyon. Interrogé, Florestan Groult, vice-président en charge des politiques sportives et de la vie associative à la Métropole de Lyon, admet que le phénomène pourrait être à double tranchant. « Nous constatons déjà une hausse des inscriptions dans certaines disciplines, notamment le badminton et l'escalade. Nous espérons que les JO serviront de levier auprès de l'État pour accroître les infrastructures sportives, car la Métropole manque cruellement d'équipements. » La Métropole aide les collèges en matière de transports et de location d'équipement, soutient les clubs, et est à l'initiative des 10 îlots sportifs de la métropole. La Ville de Lyon, notamment en charge des infrastructures, n'a pour l'instant pas répondu à nos questions.