Onirisme / L'exposition "Le temps d'un rêve" au Musée des Confluences nous remet un "trousseau de clefs" pour parcourir le vaste domaine des songes, chacune permettant d'ouvrir une approche différente du rêve : ethnographique, historique, scientifique, artistique...
« Le rêve est une seconde vie. Je n'ai pu percer sans frémir ces portes d'ivoire ou de corne qui nous séparent du monde invisible. Les premiers instants du sommeil sont l'image de la mort ; un engourdissement nébuleux saisit notre pensée, et nous ne pouvons déterminer l'instant précis où le moi, sous une autre forme, continue l'œuvre de l'existence. » Ainsi Gérard de Nerval, dans Aurelia, décrivait la bascule d'une réalité à l'autre. Sans être aussi poétique, la scénographie de l'exposition « Le temps d'un rêve » tente avec succès de nous immerger dans un état cotonneux et onirique : nappes sonores hypnotiques, projection d'images en perpétuelle mutation en hauteur des salles, cocons intimistes ici et là où l'on peut écouter des extraits de textes littéraires...
Le parcours se décline en sept salles thématiques comme autant d'approches du phénomène onirique : scientifique, ethnologique, artistique, psychanalytique... Avec pour chaque univers une mise en scène idoine. Sans se vouloir exhaustive (comment le pourrait-on sur un sujet aussi vaste ?), l'exposition constitue une belle introduction à la polyphonie du rêve, introduction qui en tant que telle peut nous occuper plusieurs heures, tant les objets, les documents (sonores et audio-visuels), les œuvres d'art ou ethnologiques sont ici nombreux, et souvent passionnants.
De l'Antiquité aux neurosciences
Dans la première salle, le rêve est attrapé, d'abord, sous son aspect scientifique le plus contemporain, les neurosciences tentant ici de répondre à toutes vos curiosités sur les phases du sommeil, le phénomène du rêve lucide, la somniloquie ou le somnambulisme... Puis on bascule sans transition au sein du temple d'Asclépios où les Grecs venaient chercher quelque vision onirique thérapeutique. Et, plus loin, parmi les conceptions amérindiennes ou africaines d'un rêve ouvrant les frontières d'un autre monde. On y apprend par exemple, devant leurs statuettes, que pour les Baoulé en Côte d'Ivoire, chacun(e) d'entre nous a un époux ou une épouse dans cet autre monde, ce que notre conjoint(e) bien terrestre ne peut accepter sans une (grosse) once de jalousie !
Une autre salle très réussie présente, autour d'une très belle sculpture-installation contemporaine de rêveuse alitée (signée Hans Op de Beeck), plusieurs œuvres d'art en lien avec le rêve : un dessin d'Odilon Redon, des nymphes endormies de Toulouse-Lautrec, une photographie de Delphine Balley... Ici comme ailleurs, les commissaires ont dû se contenter d'une sélection restrictive, invitant à poursuivre l'exploration par soi-même. On ressort, en tout cas, de cette belle exposition avec le désir enjoué de prêter davantage attention à notre vie onirique.
Le temps d'un rêve
Jusqu'au 24 août 2025 au Musée des Confluences (Lyon 2e) ; De 0 à 12 euros.