Photographie / La galerie Françoise Besson présente une très belle exposition monographique consacrée à la photographe Yveline Loiseur. Une exploration de l'éphémère et de la fragilité des êtres.
Paul Celan, Samuel Beckett, Charles Baudelaire, Henri Michaux.... Les titres et l'esthétique des séries photographiques d'Yveline Loiseur (née en 1965 à Cherbourg, vivant et travaillant à Lyon) sont souvent placées sous l'égide d'un poème ou d'un texte littéraire. Écritures de l'éphémère, de la fragilité, de l'entre-deux. Soit quelques-unes des caractéristiques de l'art photographique en général, et des œuvres de l'artiste en particulier.
Pour sa première exposition personnelle à la Galerie Besson (Les formes de l'attention ), Yveline Loiseur a sélectionné une trentaine d'images appartenant à plusieurs de ses séries, pour les ré-agencer en trois grands ensembles. En introduction, nous découvrons trois images de lits blancs et vides cernés de rideaux, « des théâtres du regard » nous confie Yveline Loiseur. Ensuite, son premier ensemble d'images se propose « comme une histoire du regard, avec tour à tour Narcisse, le flou, la fenêtre... » Une jeune femme se courbe sur sa propre image, une fillette nous toise derrière une fenêtre, un garçon mélancolique regarde à travers des traînées de gouttelettes, une femme de dos regarde dehors... Le tout est travaillé dans des des gammes de gris et perturbé par un certain nombre de voiles ou de strates entre le sujet et l'objectif : écume, rideaux, gouttelettes... qui donnent aux images une épaisseur, un trouble, un mystère.
Double face
Le deuxième ensemble est consacré à la vie familiale avec, par exemple, un enfant porté par son père, une femme chuchotant à l'oreille de sa mère, une femme démêlant les cheveux de sa fille... Là encore, les voiles, les jeux d'ombres, les reflets, viennent dédoubler et troubler les images. Toutes les photographies sont mises en scène avec précision par Yveline Loiseur, et sans travail de post-production. On pense beaucoup devant l'ensemble dédié à la famille aux films de Bergman et à son film Persona notamment, avec ses dédoublements de sujets féminins, ses jeux d'ombres et de voiles, entre rêve et réalité, masque et vérité. De plus, les poses hiératiques scénographiées par Yveline Loiseur insufflent une certaine ambiguïté à ses images : les gestes sont doux et tendres, mais les postures et les regards sont aussi fixes et dénués de toute spontanéité. L'artiste accentue l'effet de coupe dans le temps, de révélation, et d'apparition à la fois figée et fragile, propres à toute photographie. Le vif et le mort sont comme les deux faces d'une même figuration. D'ailleurs, le troisième ensemble dédié à la nature, montre surtout des natures mortes. Dans le même geste, l'artiste montre la vie et la mort, l'existence et sa ruine, la présence et l'absence qui la menace instantanément.
Yveline Loiseur, Les formes de l'attention
Jusqu'au 11 janvier 2025 à la Galerie Françoise Besson (Lyon 1er) ; entrée libre.
