Sélection / La Fête des Lumières et la Biennale n'éclipsent pas la présence de nombreuses lucioles artistiques voletant dans la capitale des Gaules jusqu'à la fin de l'année. Apparitions sylvestres, traversées marines, interrogations architecturales, collisions temporelles et un adieu douloureux ponctuent ce début d'hiver rigide mais profondément lumineux.
Écoute-moi par Estelle Delon et Corinne Héraud
Estelle Delon, La petite fille et la mer, 20x30cm, technique mixte ©DR
Provoquant à nouveau la rencontre entre deux univers divers et résonnants, Catherine Manguy a conçu une exposition au fort pouvoir curatif. Dans l'intimité de sa galerie, les œuvres d'Estelle Delon se déclinent en collages, photomontages et superpositions de matériaux visant une narration inédite d'images anonymes, occasionnant des formes surréalistes et thérapeutiques de la mémoire. Dans les Errances de Corinne Héraud, le travail de la remémoration s'insinue en revanche dans le boitier sténopé par l'entremise d'une recherche discrète dans les lieux poussiéreux et oubliés, laissant plus loin la place à une symphonie sombre et vitale, dans laquelle l'humanité semble retrouver le lien perdu avec la partie la plus impénétrable de la forêt.
FM
Jusqu'au 19 Décembre à la galerie C.Manguy (Lyon 1er) ; entrée libre
Arborescences par Yovan Dragic
Vue de l'expo ''Arborescences'' ©Autour de l'image
A l'abri du vacarme des abords de la place Bellecour, après s'être engagé dans le passage privé s'ouvrant sur la rue Sala, on accède à un lieu singulier et intime, où le travail artisanal de cadreur borde une intense activité expositive. Pour le dernier rendez-vous de cette année, Thierry Bounan a convié un ancien collaborateur, Yovan Dragic, pour sa deuxième exposition dans la grande salle de la galerie. Le travail patient, minutieux et rigoureux de l'artiste, en mesure de donner à la mine de plomb des formes recherchées et épurées, lénifie le regard et insuffle un sentiment de communion avec la nature, sans tenter de parcourir la voie de l'imitation, mais restituant essentiellement la partie résiduelle d'un souvenir.
FM
Jusqu'au 21 décembre à la galerie-atelier Autour de l'image (Lyon 2e) ; entrée libre
Trames
Xiaojun Song, Méditation Rouge, 2024 ©DR
1 parcours = 5 lieux, 5 artistes. Trames propose de tisser des liens entre la France et la Chine, entre les artistes et les publics, entre le patrimoine et l'art contemporain. Xiaojun Song sera exposée au Nouvel Institut Franco-Chinois, Cai Yaling à la Fondation Renaud, Xue Feng Chen au parc de Lacroix-Laval, Kong Shengqi au musée de l'Hôtel-Dieu de Belleville-en-Beaujolais et enfin MoBai Lin à la galerie Françoise Besson. Peinture, sculpture, installation, œuvres minutieuses ou monumentales, en intérieur ou en extérieur, les pratiques volontairement éclectiques sont pensées et présentées en harmonie avec le lieu qui les accueille afin d'enrichir le dialogue. En résonance avec la 17e Biennale d'art contemporain.
LD
Soudain éclaircie par Viriya Chotpanyavisut
Vue de l'exposition "Soudain éclaircie" ©BF15
Jusqu'à la fin de l'année, l'espace triparti de la BF15 est investi par des images subtiles et discrètes. Résultat d'un an de préparation, Soudain éclaircie est le projet in situ de l'artiste thaïlandais Viriya Chotpanyavisut, se focalisant sur la tension entre caducité et persistance inhérente de la nature. Les détails de l'univers forestier de la première pièce annoncent la suite consacrée à l'attention portée à la légèreté et à l'enfance, à travers la danse d'un sac en plastique ou à une minuscule écharde pénétrée dans la paume de la main. Le dernier espace, lieu de dialogue avec la lumière changeante de la journée, accueille deux vidéos où le tissage du temps laisse entrapercevoir la spiritualité bouddhiste et la pratique de la méditation par l'entremise d'une fluctuante relation entre intérieur et extérieur.
FM
Jusqu'au 25 décembre à la BF15 (Lyon 1er) ; entrée libre
Histoire(s) sans fin
Après 43 ans de rigoureux et passionné travail de galeristes, Catherine Derioz et Jacques Damez se voient contraints (économiquement) de fermer Le Réverbère, lieu emblématique de la photographie à Lyon. Pour leur dernière exposition, les deux comparses rendent hommage à l'ensemble des artistes qu'ils représentent : de William Klein à Julien Magre, de Denis Roche à Bernard Plossu, de Pierre Canaguier à Yves Rozet... Fidèles à leur amour de la photographie, ils ont choisi d'exposer des images singulières, peu connues, pas forcément bankable, où la précision du regard se marie à l'émotion.
JED
Jusqu'au 28 décembre à la galerie Le réverbère (Lyon 1er) ; entrée libre
Inner World par Ebru Ceylan
Ebru Ceylan, Self portrait, 2018 ©DR
Fidèle à lui-même, le centre photographique de la rue des Fantasques accueille une nouvelle et puissante exposition. Ebru Ceylan, photographe et réalisatrice turque, exposera jusqu'à la fin de l'année vingt-quatre traces de ses voyages dans les terres anatoliennes. Son regard, se posant sur les corps et sur les choses avec un respect rare, saisit l'exceptionnel dans l'ordinaire, l'instant lumineux et imprévisible dans le continuum temporel. Avec ses clichés, Ebru Ceylan nous offre le privilège d'une découverte d'un ailleurs chargé de contrastes et d'histoire, lieu de rencontre non seulement avec l'Autre mais également avec nous-même : l'occasion précieuse d'une introspection par images.
FM
Jusqu'au samedi 28 décembre au Bleu du ciel (Lyon 1er) ; entrée libre
Best Regards par Nils Vandevenne
Nils Vandevenne, Modus Operandi, 2023 ©DR Vouzelaud
Avec ses œuvres récentes, Nils Vandevenne ne pose pas simplement son geste sur une surface apte à l'accueillir, mais se glisse entre les choses, entre une couche et l'autre. Les surfaces resplendissantes et laquées subissent ainsi une intervention qui vise à soustraire de la matière, un allégement dramatique qui écorche l'œuvre. La rencontre avec les puissants Seagram murals de Rothko, moment capital dans son parcours, entraîne chez l'artiste une réflexion énergique. Excavant et sculptant le support, il opère une mise à nu forcenée de l'œuvre, exhibant une tridimensionnalité secrète et établissant une relation épineuse avec le regard. Si le plus grand membre du Colorfield painting souhaitait « ruiner l'appétit » aux commensaux de restaurant de Manhattan, Best Regards déguise derrière sa superficielle politesse, une menace énigmatique.
FM
Jusqu'au 4 janvier 2025 à la galerie Houg (Lyon 1er) ; entrée libre
Mermed par Jean Jullien
Vue de l'exposition "Mermed" ©Galerie Slika
« Tout a commencé sur la plage à Lesconil » annonce le petit personnage dessiné qui nous accueille dans la grande salle de la galerie Slika. Cet avant-propos breton incarne le prétexte d'une narration marine entre France, Italie et Grèce, traversant non seulement villes, panoramas et découvertes culinaires, mais aussi techniques, matériaux et objets. Pour son périple très méditerranéen, Jean Jullien récite une histoire composée de dessins délinéés directement sur les murs de la galerie, de toiles encadrées mais aussi d'un bateau échoué et investi par la narration par images de l'artiste nantais. Un minimalisme joyeux et caboteur.
FM
Jusqu'au 18 janvier 2025 à la galerie Slika (Lyon 2e) ; entrée libre
Voir vivre l'architecture par Gilles Aymard
Gilles Aymard, Roseraie du parc de la Tête d'Or, 2017 ©DR
135 photographies de Gilles Aymard forment un parcours qui retrace l'ensemble de sa carrière. Photographe d'architecture, Gilles Aymard rend cette dernière vivante, notamment grâce aux jeux de lumières, cruciaux. Ses clichés subliment le bâti, au point de leur donner une dimension de portrait. Le photographe a d'ailleurs tiré le portrait de nombreuses vies de l'architecture : des concepteurs et des constructeurs. Volumes, formes, détails, lumières qui captent un moment, ceux des hommes et des femmes qui l'habitent. Mais aussi l'esthétique de la ruine : pour poser son œil sur la vie et la mort de nos constructions.
LD
Jusqu'au 8 février 2025 aux Archives municipales de Lyon (Lyon 2e) ; entrée libre
Zurbarán. Réinventer un chef-d'œuvre
Francisco de Zurbarán, Saint François d'Assise, vers 1640-1645, huile sur toile, Musée des Beaux-Arts de Lyon © Lyon MBA - Photo Martial Couderette
Pour la fin de l'année, le musée des Beaux-Arts prépare une exposition mémorable. Les trois versions de Saint François debout momifié peints par Francisco de Zurbarán, conservées au museu nacional d'art de Catalunya de Barcelone et au museum of Fine Arts de Boston, ainsi que celle datant de 1659 et visible au palais Saint-Pierre depuis 1807, seront réunies pour la première fois. Trois chefs-d'œuvre dialoguant avec une centaines d'autres pièces, parmi lesquelles un ensemble des peintures de Zurbarán et nombreuses œuvres montrant l'influence de cette iconographie du XVIe au XXIe siècle.
FM
Du 5 décembre 2024 au 2 mars 2025 au musée des Beaux-Arts (Lyon 1er) ; de 0 à 12 euros
Masculin / Féminin : la beauté du XVIIᵉ siècle à nos jours
Théophile Vauchelet, Ulysse et Néoptolème venant chercher Philoctète dans l'île de Lemnos, 1828 ©Tomaselli Collection
Après les splendides Lyon et sa région vus par les artistes et La Modernité à Lyon : 1900 – 1925, la Tomaselli Collection poursuit son aventure expositive, axant le regard sur le rapport entre féminin et masculin et sur les déclinaisons artistiques en peinture, en dessin et en photographie. Une longue traversée de quatre siècles plongeant dans environ 300 œuvres, dépeignant maintes factures d'incarner les genres et fixant pour les générations à venir des esthétiques fascinantes, comme le néo-classicisme de Hyppolite Flandrin, le pré-impressionnisme tressaillant de Jean-Louis Appian, le romantisme symboliste de Louis Janmot, le fauvisme alangui de Jacqueline Marval ou la puissance contemporaine du signe de Marie-France Chevalier.
FM
Jusqu'au 8 mars 2025 à la Tomaselli collection (Lyon 5e) ; de 0 à 10 euros
Le temps d'un rêve
Hans Op de Beeck, My bed a raft, the room the sea, and then I laughed some gloom in me, 2019 © Adagp, Paris, 2019 - Studio Hans Op de Beeck
Espace poreux avec le surnaturel et les dieux (selon certaines croyances et religions), simple dérèglement cérébral (selon certains scientifiques), expression déguisée de désirs infantiles (Freud et la psychanalyse), ou encore source d'inspiration (artistes, écrivains, poètes), le rêve se décline et se perçoit de bien des manières à travers les âges, les cultures et les savoirs. Le musée des Confluences nous propose une traversée synthétique de toutes ces facettes oniriques en s'appuyant sur quelque 200 objets (documents, œuvres d'art, etc.) et sur une scénographie jouant des frontières entre réalité et fiction.
JED
Jusqu'au 25 août 2025 au musée des Confluences (Lyon 2e) ; de 0 à 12 euros