Théâtre jeune public / Avec du papier et des céramiques, la compagnie Écoutilles invente un monde lointain et d'une grande fragilité pour les tous petits (dès 3 ans). "Oizo" sera aux Clochards Célestes.
Elles ne nous voient pas, un pot de terre leur mange la tête. Leur langage se fait au son de leur tapotement sur ce couvre-chef qui les enserre. D'emblée, dans Oizo, il est question d'une communication autre que la nôtre. Très rares seront les mots au cours de ces quarante minutes de spectacle si ce n'est pour nous dire, via une vieille radio égarée que « nous sommes sans nouvelle » de « deux exploratrices envoyées en mission oiseau depuis 17 ans, 3 mois, 4 jours, 11 heures, 10 minutes et 3 secondes ». Mona Hackel et Romane Lasserre abolissent ainsi la temporalité et la notion d'espace. Elles évoluent ailleurs que sur terre. Posées sur une étendue de papier froissée dans une lumière basse à peine réchauffée par quelques luminaires sur mâts, elles observent ce qui se trouve à leurs pieds. À commencer par une sorte de vase à l'embout très fin dans lequel l'une souffle comme s'il s'agissait d'un ballon de baudruche, mais en dur. Stupéfaction. Leurs gestes sont minimaux mais l'effet est maximal sur le jeune public puisqu'elles parviennent à transmettre cette sensation de la découverte et de la première fois. Sous-titré « exploration d'un monde de céramiques bavardes », Oizo va de trouvailles en trouvailles. Les sens sont tous convoqués, comme le goût quand elles portent à leur bouche des granulés (sucre ? sel ?) ou le toucher quand une nuée de plumes s'échappe d'une petite amphore. Peu à peu elles vont même donner vie, avec des bois et d'autres plumes, à une sorte d'autruche qui poursuit leur défrichage du bout de son bec.
Lourd-léger
Depuis 2021, ces deux jeunes femmes, entourées de six autres, ont créé, en Saône-et-Loire, la compagnie Écoutilles — du nom de ce système de fermeture sécurisé sur les bateaux qui empêche toute intrusion _ et déjà créé quatre spectacles à destination du jeune public, en utilisant notamment des céramiques qu'elles fabriquent, comme les Baro d'Evel qui ont triomphé avec cette matière à Avignon. Passées par La Villette à Paris, elles sont cette saison associées au théâtre des Clochards Célestes qui a accueilli trois de leurs propositions. Après Ma Vie taupe secrète et Eri, voici leur dernier opus. L'aspect marionnettique y est moins central que dans les deux autres mais l'univers de clair-obscur et de travail sur l'objet ainsi que sur le son y est constant. D'une grande délicatesse.
Oizo
Du 19 au 26 février aux Clochards célestes (Lyon 1er) ; de 8 à 10€
Éri
Mercredi 23 et jeudi 24 avril au musée des Arts de la marionnette — Gadagne (Lyon 5e) ; 4€
