Gastronomie / Un nouveau restaurant gastronomique a ouvert dans le 6ᵉ. Celui-ci très porté sur le légume. Avec une pointe d'iode aussi.
Comment décrire la cuisine lyonnaise ? Rabelais, quand il officiait à l'Hôtel-Dieu, en faisait ainsi l'inventaire : « saucissons, cervelas, jambons, andouilles, hures de sangliers, gigots à l'aillade, [...] gibiers à poil et à plumes, [...] carpes farcies [et] bugnes ». A-t-elle tant changé depuis le XVIe siècle ? Il y a au moins cette différence notable : les légumes se sont fait une place. Les cuisines lyonnaises se sont ouvertes au vent frais qui s'était levé au début des années 2000 et intensifié quinze ans plus tard, quand le Bocuse d'Or imposait le végétal comme thème pour l'une de ses épreuves. L'année suivante ouvrait d'ailleurs à Lyon le premier restaurant gastronomique entièrement végétarien : Culina Hortus. Mais déjà le légume s'était invité dans les assiettes des jeunes adresses et aujourd'hui. Même dans ces temps mélancoliques, on imagine donc mal un retour en arrière.
Cave bien garnie
Si Culina Hortus existe toujours, son second de cuisine, Flavien Guarato, après cinq ans passé rue de l'Arbre-Sec, vole désormais de ses propres ailes. Il a pris la place, dans le 6e arrondissement, du Passe-Temps le restaurant étoilé de Younghoon Lee, qui après dix ans de succès s'est expatrié à Paris. L'intérieur est resté quasi inchangé : c'est minimaliste, blanc et boisé. À part les quelques branches accrochées sur un mur, une très grande armoire à vin attire l'œil. On y extrait encore de belles choses – on y a d'ailleurs aperçu le vin des Allobroges des Vignes du Paradis, en Savoie, ou un Beaujolais blanc de David Large, servi au verre.
Dessert au riz
Flavien a nommé son établissement, ouvert début février, Mertensia. Comme la mertensia maritima une plante vivace au feuillage vert et argenté, qui a un étonnant goût iodé rappelant l'huître. Ce que le chef veut nous dire c'est que, bien qu'il structure son menu autour des légumes, des plantes, des champignons, il aime aussi y introduire des produits de la pêche. C'est cet assemblage végétal et marin qu'on a essayé, un midi, quelques jours après l'ouverture. Passés les amuse-bouches, des takoyakis, boulettes japonaises remplies d'un shiitake et posées sur un tapis de mousse ; on commence le repas avec un joli salsifi. Le légume est rôti, bien fondant, mais aussi frit, et pris entre deux feux, piquant et amer : en dessous une crème d'ail et au-dessus des lamelles de cédrat et quelques œufs de truite. Vient ensuite le maquereau, sorti de la Méditerranée vers le Grau-du-Roi. Il s'accompagne d'une polenta, mais surtout de deux beaux jus végétaux, l'un tout vert au cresson, l'autre, très brun, très concentré, aux amandes. Le plus marquant dans l'enchaînement est peut être le premier dessert autour du riz : glace au saké, mousse de mirin, miso de riz, riz soufflé, déconcertant mais équilibré. Ce menu gastronomique, épatant pour une première ouverture, finit tout en douceur avec des carottes, hyper confites, à la texture presque élastique, et associées à une glace au foin.
Mertensia
52 rue Tronchet, Lyon 6e
De midi à 15h et de 19h15 à 23h
Menu déjeuner 32 (végétarien) ou 39€. Le soir 58 ou 72€
