Littérature documentaire / Dans un ouvrage à la forme soignée, Stéphane du Mesnildot passe au peigne fin les bouleversements sociaux et esthétiques qui ont inspiré les grands réalisateurs japonais des années 70. Rencontre avec l'auteur et la maison d'édition à la faveur du festival Hallucinations collectives.
« Dans la longue histoire du cinéma japonais, celle qui englobe la décennie soixante-dix fut un tournant », ainsi commence le prologue de l'ouvrage consacré au cinéma "rebel" japonais Soleil Rouge, une histoire du cinéma rebelle japonais, écrit par Stéphane du Mesnildot, critique aux Cahiers du cinéma et spécialiste du cinéma japonais, particulièrement celui fantastique. Celui qui avait notamment écrit Cérémonies : Au cœur de L'Empire des sens (aux éditions Le Lézard Noir, Prix du meilleur livre de cinéma 2021) et officié comme commissaire associé pour l'exposition Ultime combat – Arts martiaux d'Asie au Musée du Quai Branly-Jacques Chirac en 2021 s'est tourné vers l'une des plus ambitieuses maisons d'édition lyonnaise : Façonnage éditions. Née en 2020 des mains fertiles de Jérôme Dittmar et émanant en partie de la regrettée revue Carbone — magazine et site web lyonnais et alternatif célébrant la pop culture —, Stéphane du Mesnildot amarre son ouvrage sur les étagères colorées d'une maison qui fait primer la qualité face à la quantité (publiant trois ou quatre livres par an), et où « chaque ouvrage doit se justifier pleinement, en incarnant une proposition originale qui est à la fois élaborée dans le texte, mais aussi dans la forme du livre » détaille Jérôme Dittmar.

Réveil brutal
Dans le sillage de l'ouvrage Le cinéma américain des années 70 rédigé par Jean-Baptiste Thoret et publié au début des années 2000 — posant une véritable théorie historique, esthétique et politique sur cette période clé du cinéma américain — Stéphane du Mesnildot développe une analyse toute aussi pertinente sur le cinéma japonais des années 70, avant que celui-ci ne soit brutalement empêché par un phénomène mineur qu'on nomme capitalisme. Au-delà de l'évocation d'un cinéma d'avant-garde, en marge des studios, l'ouvrage rassemble et met en cohérence le cinéma de studio avec un cinéma d'auteur plus radical comme celui de Kōji Wakamatsu, rappelant que le Japon fut lui aussi un laboratoire de la contre-culture qui, du film de sabre aux films de yakuzas ou de gangs de filles, passait le plus souvent par les marges : « un cinéma du peuple, parfois malfamé, insalubre, brûlant, provocant, vivifiant, expérimental, révolutionnaire, tour à tour progressiste et conservateur ». Rencontre avec l'ouvrage et son auteur, avant que celui-ci ne disparaisse jusqu'au 12 juin prochain, date officielle de publication du livre.
Soleil Rouge, une histoire du cinéma rebelle japonais (Façonnage éditions) ; prix encore inconnu
Stéphane du Mesnildot en dédicace vendredi 18 avril à 18h30 à l'espace rencontre du Comœdia (Lyon 7e) ; gratuit