Coupe budgétaire / Sur fond de désaccords croissants au sujet de la liberté académique, la Région Auvergne-Rhône-Alpes suspend ses subventions à Lyon 2 et s'en explique par la voix de son ancien président Laurent Wauquiez.
La déclaration est tombée sur les ondes de CNews et Europe 1, ce mercredi matin. Laurent Wauquiez, député et candidat à la présidence des Républicains, annonce la suspension des aides régionales à l'université Lyon 2. Il évoque une « dérive islamo-gauchiste » sans apporter plus de précisions. Ce n'est pas lui, pourtant, qui préside aujourd'hui la Région Auvergne-Rhône-Alpes — il a cédé sa place à Fabrice Pannekoucke en 2023 — mais l'ancien président conserve un rôle de « conseiller spécial », titre flou mais visiblement efficace.
C'est donc en duo que les deux hommes ont décidé de supprimer les subventions dites "de coopération" accordées à Lyon 2. Le motif, la perte supposée de neutralité idéologique de l'université, jugée perméable à « l'extrême gauche universitaire » par Fabrice Pannekoucke, et accusée de céder aux pressions militantes.
Un climat tendu à l'université
La décision intervient dans un contexte déjà très inflammable. Le 1er avril dernier, un groupe de personnes encagoulées a interrompu un cours de géopolitique donné par Fabrice Balanche, spécialiste du Moyen-Orient. Accusé de « racisme » et de « sionisme » par des militants, le chercheur a quitté la salle. L'incident, condamné unanimement, a donné lieu à l'ouverture d'une enquête pour entrave à l'exercice de la fonction d'enseignant.
Depuis, Fabrice Balanche dénonce ce qu'il appelle un climat de censure et d'intimidation à Lyon 2, pointant la passivité de sa direction. Le 29 avril, un nouveau front s'est ouvert : une enquête pour « apologie du terrorisme » a été ouverte contre le vice-président de l'université, Willy Beauvallet-Haddad, à la suite d'un signalement lié à des propos supposés favorables au Hezbollah. Il a démissionné de ses fonctions exécutives peu après, tout en contestant les accusations.
La gauche dénonce une manœuvre politique
Face à ce que la droite régionale présente comme une mesure de « salubrité » académique, l'opposition dénonce un coup de force. Pour Johann Cesa, conseiller régional socialiste, la décision est « brutale », « sans nuance » et surtout « anti-républicaine ». Elle priverait des milliers d'étudiants de moyens indispensables à leur formation et à leur mobilité.
La méthode n'est pas inédite. Déjà en 2022, la Région avait suspendu ses partenariats avec Sciences po Grenoble, alors en proie à de vives dissension autour de la notion d'islamophobie.
Une université instrumentalisée ?
Reste à savoir ce que recouvre exactement la notion de « subventions de coopération » : les montants précis et les projets visés n'ont pas été rendus publics à ce jour. Le recteur n'a, pour l'instant, pas réagi publiquement. La séquence n'est pas sans coïncider avec la campagne pour la présidence des Républicains, où Laurent Wauquiez entend bien réaffirmer son ancrage conservateur.