MENDELSON

Personne ne le fera pour nous


LiFe-liVe/ReC-Son
Mendelson et son auteur-chanteur Pascal Bouaziz sont depuis longtemps la pierre angulaire du rock français, son diamant noir et brut. Mais là, avec ce double-album que l'on ne peut que qualifier de chef-d'œuvre absolu, Mendelson fait tout péter, jusqu'à sa propre implosion finale - le groupe n'existe aujourd'hui plus que par Bouaziz lui-même, ce disque n'est disponible que sur son site internet (mendelson.free.fr). En deux longues sessions live, chaque musicien a fourni aux textes monstrueux de Bouaziz, au sommet de son art de la narration dépressive, l'écrin qui leur manquait jusqu'ici. Aussi magnifiques soient-ils, ces arrangements ne font pourtant qu'ouvrir la voie à une langue qui parle de nous et d'aujourd'hui, avec un désespoir plein d'ironie. Ou l'inverse... Bouaziz qui énumère dans le chaos tout ce qu'il n'aime pas (J'aime pas les gens), Bouaziz qui relate un fait-divers comme une tragédie métaphysique (Le Sens commun), Bouaziz qui fait le portrait de l'humiliation ordinaire du cadre déchu (Dans tes rêves), Bouaziz qui écrit son testament au passé («J'ai la nostalgie de ma vie future comme si elle allait jamais arriver» sur Le Monde disparaît)... Et puis une chanson, immense : 1983 (Barbara). Un court roman de plus de dix minutes, peut-être autobiographique, sur une mémoire qui se rembobine et défile comme un film super-8, une tranche de l'enfance «normale» d'un gamin de banlieue qui cherche l'amour dans un monde où il n'y a que de la misère. Juste pour ce monument, l'avenir, si noir soit-il, est devant Mendelson... CC


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